Intervention de Murielle Maffessoli

Réunion du 11 avril 2013 à 9h00
Mission d'information sur les immigrés âgés

Murielle Maffessoli, directrice de l'Observatoire régional de l'intégration et de la ville, ORIV :

Je vous remercie de votre invitation. Le fait d'intervenir à la fois en Alsace et en Lorraine permet à notre centre de comparer les problèmes qui se posent dans différents territoires. Mais même si chacune de ces deux régions présente une configuration sociodémographique spécifique, la première question à laquelle on est toujours confronté lorsqu'on entreprend de travailler sur le problème des personnes âgées immigrées, est la question de la nécessité de montrer que celles-ci existent et de mettre au jour leurs besoins. Ce public exprimant peu de demandes, il faut encourager les acteurs concernés à s'y intéresser. Au-delà des seules populations immigrées, le vieillissement constitue d'ailleurs, aujourd'hui encore, une zone d'ombre au sein de la politique de la ville, la rénovation urbaine n'en tenant pas compte.

Les immigrés âgés ne formulant pas de revendications, on considère souvent qu'il faut concevoir une action spécifique à leur intention, et non les inclure dans les dispositifs de droit commun – débat qui concerne l'ensemble des politiques publiques en France. Nous estimons que, si la singularité de ce public justifie une approche particulière, le droit commun et les politiques sectorielles doivent néanmoins être mobilisés. Reste à convaincre et à sensibiliser l'ensemble des acteurs publics à cette idée.

Depuis peu, on parle de personnes âgées immigrées et non plus de chibanis – terme très restrictif – ou de migrants ; ce dernier mot renvoie au mouvement permanent, alors qu'il faut précisément noter la sédentarisation de ces populations.

En Alsace, les immigrés représentent 10,3 % de la population, pourcentage supérieur à la moyenne nationale. Parmi eux, 70 % viennent de pays hors Union européenne – chiffre là encore supérieur à la moyenne. La part des personnes âgées y est toutefois assez faible, car l'immigration alsacienne – alimentée notamment par le flux migratoire turc – est relativement récente. Les immigrés âgés de plus de cinquante-cinq ans, originaires de pays tiers à l'Union européenne, représentent ainsi en Alsace 28,4 % du total ; leur nombre connaît en revanche une croissance de 4 % par an.

En France, c'est l'isolement des hommes résidant au sein des foyers de travailleurs migrants qui a surtout retenu l'attention. Mais le cas des foyers n'épuise pas la diversité des situations observées sur le territoire alsacien et interdit de penser la prise en charge des populations immigrées par le droit commun dans le cadre de l'aide à domicile. Ces interventions se révèlent complexes dans les zones d'habitat diffus – particulièrement lorsqu'il s'agit de territoires peu accessibles – et auprès des familles réunissant plusieurs générations. Il faut territorialiser notre réflexion en adaptant le travail aux caractéristiques du lieu, des publics et des acteurs concernés afin de mettre en place des solutions pérennes et non spécifiques.

Il y a cinq ans, l'Association meusienne d'accueil des travailleurs migrants (AMATRAMI) a souhaité travailler sur les femmes immigrées âgées – de plus en plus nombreuses depuis la récente vague de demandes d'asile – que le décès précoce du mari laisse souvent seules, isolées et sans ressources. Elle a développé une action en direction de tous les acteurs du territoire pour prendre ce public en charge à l'égal des autres personnes âgées.

La caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) de Lorraine a également lancé des actions spécifiques en direction du public âgé immigré. Le principal problème tient à l'inadaptation des relais de communication, les initiatives ne parvenant pas toujours à trouver leur cible. L'enjeu consiste donc à rapprocher les associations de ce public.

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