Intervention de Paul Giacobbi

Réunion du 29 mai 2013 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Je souligne à mon tour l'exceptionnelle qualité du travail de la rapporteure.

Peut-on aujourd'hui défendre des présupposés idéologiques allant à l'encontre de l'expérience et de ce que nous a appris la science économique depuis un siècle et demi ? Prétendre que les vertus du libre-échange ne sont vantées que par « des modèles économiques réducteurs aux présupposés libéraux », c'est faire fi du mouvement de pensée, qui a débuté avec David Ricardo, Stuart Mill et Adam Smith, dont les idées ont fait leurs preuves de manière incontestée, comme en atteste l'exemple de l'Angleterre où est née la révolution industrielle et de l'Empire britannique. Votre argument, madame la rapporteure, risque de ne pas rencontrer grand succès dans une négociation internationale. En outre, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. La liberté des échanges a certes conduit, je ne le conteste pas, à des effets pervers, des inégalités, voire des drames. Pour autant, l'expérimentation inverse, que nous avons connue avec l'économie fermée et le rouble non convertible de l'Union soviétique, n'a eu que des succès bien moindres. Ne risquons donc pas le ridicule ! Un accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne est une chance pour les deux entités.

Pour ce qui est de la localisation des investissements, notre commission pourra travailler dans le cadre de la mission commune créée avec la commission des affaires économiques sur l'investissement étranger, présidée par notre collègue François Scellier.

Il faut se garder d'énormes contre-sens sur les différences entre l'Europe et les États-Unis en matière fiscale et sociale. Les charges sociales conventionnelles sur le travail ne sont pas outre-Atlantique ce que l'on a tendance à croire en France, le droit du travail américain non plus. La CGT n'oserait même pas proposer la clause d'exclusivité syndicale (« union shop »), en vigueur dans un grand nombre d'États fédérés américains !

Vous avez raison, madame la rapporteure, de faire allusion aux différences de politique monétaire entre les deux rives de l'Atlantique, et vous abordez le sujet avec justesse. Il y a le rôle des banques centrales, les politiques de change, mais surtout des différences structurelles fondamentales. L'appel public à l'épargne représente 80 % du concours à l'économie aux États-Unis et les concours bancaires 20 %. C'est l'inverse en Europe, ce qui rend difficile toute comparaison.

Ce qui est demandé à l'alinéa 64 du projet de résolution reviendrait à exiger une réforme fondamentale de la Constitution des États-Unis, puisque cela remet en cause rien moins que leur structure fédérale. Je doute donc de la possibilité d'atteindre l'objectif !

Enfin, s'agissant des recommandations du comité de Bâle, dites Bâle III, les États-Unis et l'Europe ont une approche très différente. Les États-Unis souhaitent en théorie interdire le trading pour compte propre. C'était l'un des objectifs du Glass-Steagall Act. En France, le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires n'a, hélas, introduit cette disposition que de façon homéopathique. Cela étant, les États-Unis n'ont pas encore appliqué la Volcker Rule, introduite dans le Dodd-Franck Act de juillet 2010 et qui vise à limiter les investissements spéculatifs des banques.

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