Intervention de Martial Saddier

Séance en hémicycle du 4 juin 2013 à 15h00
Fiscalité écologique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier :

C'est toujours un honneur, quand on cite des montagnards dans cet hémicycle…

Ce doute est d'autant plus important que la mise en place de prélèvements verts à hauteur de trois milliards d'euros d'ici à 2016 n'aurait pour seul objectif que de boucler le financement des vingt milliards d'euros du crédit d'impôt compétitivité emploi pour les entreprises, car c'est cela, en fait, qui se cache derrière votre action. Ce choix, plus économique qu'écologique, nous semble vraiment incompréhensible car il est en totale rupture avec ceux de notre majorité, qui avait souhaité affecter entièrement le produit de la fiscalité environnementale au financement de dépenses de protection de l'environnement. C'est là le fond du problème. Je sais pouvoir compter sur vous sur ce point, madame la ministre de l'écologie : il ne faut pas que le produit de la fiscalité écologique soit affecté à autre chose que le financement de la protection de l'environnement. C'est un combat que nous menons au sein du comité pour la fiscalité écologique, c'est le combat de son président, et, franchement, cette proposition de résolution nous fait peur, parce qu'il semblerait que la logique du groupe majoritaire à l'Assemblée nationale soit de sortir la fiscalité écologique du financement de la protection de l'environnement.

De plus, près d'un an s'est écoulé depuis les nombreuses annonces en termes de fiscalité écologique faites par le Gouvernement au cours de la conférence environnementale. Aujourd'hui, peu de mesures ont été prises, et nous avons peu de visibilité.

Vous proposez aujourd'hui d'ajouter notamment un alignement de la fiscalité du diesel, l'introduction d'une taxe carbone ainsi que des mesures fiscales en faveur de la biodiversité.

Alors que de nombreux couacs et discours contradictoires ont émaillé l'annonce d'une éventuelle taxation du diesel, nos collègues du groupe SRC reviennent donc aujourd'hui à la charge. Avec 18,8 millions de véhicules, c'est la majorité de nos concitoyens qui roulent avec un moteur diesel, ceux qui vont travailler tous les jours, y compris dans les zones rurales où il n'y a pas de transports collectifs.

L'alignement de la taxation du diesel et de l'essence aura un impact catastrophique pour nos concitoyens, pour l'industrie automobile, pour l'outil de production, si on ne lui laisse pas le temps de s'adapter. Comme vous le savez, les entreprises françaises, Renault et PSA, sont à la pointe de cette technologie.

Ce sont nos constructeurs qui sont les meilleurs dans le monde. Ce sont eux qui ont inventé le filtre à particules. Nous leur avons demandé de se mettre aux normes Euro 5. Aujourd'hui, tous les moteurs diesel sont équipés d'un filtre à particules. Ils viennent d'investir 1,5 milliard d'euros chacun pour l'Euro 6 et la réduction de l'émission des NOx, les oxydes d'azote. À volume constant, la distance parcourue est plus grande avec un carburant diesel qu'avec un carburant essence. Il n'y a dans votre proposition, aucune prise en compte de la spécificité d'un ancien moteur diesel, qui pollue et sur lequel il faut mettre en place un outil pour favoriser le renouvellement du parc, et de tous les efforts faits en matière de recherche et développement sur les nouveaux véhicules diesel Euro 5 et Euro 6, dernier cri au regard de la norme anti-pollution.

Nous faisons cavalier seul. La proposition de résolution européenne a été abandonnée. À ce jour, le compromis élaboré en 2012 par le groupe de travail du conseil ECOFIN n'a toujours pas été adopté et il semble qu'aucune mise à jour de la directive énergie en ce sens ne soit actuellement à l'ordre du jour. Bref, une fois de plus, vous nous proposez de faire cavalier seul au sein de l'Union européenne, alors qu'il faudrait se battre pour harmoniser et emmener l'ensemble de nos partenaires européens.

Je souhaite également revenir sur la proposition de contribution climat-énergie sur le carbone qui figure également dans le texte que nous examinons. Vous le savez, notre majorité avait déjà tenté d'introduire un tel dispositif dans le projet de loi de finances pour 2010. Or le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition. Pour éviter une nouvelle censure, nos collègues du groupe SRC nous proposent donc aujourd'hui un dispositif qui s'appliquera à tout le monde, ménages et entreprises, pour envoyer un signal prix dissuasif. Nous pensons que c'est encore un impôt de plus. Bien que la proposition de résolution suggère la mise en place de mesures d'accompagnement et de redistribution, aucune précision n'est apportée quant aux formes que pourraient prendre ces différents dispositifs.

Enfin, le groupe SRC souhaite revenir sur les mesures d'exonération dont bénéficient notamment les agriculteurs, les pêcheurs, les transporteurs routiers, les ambulanciers et les taxis.

Je le répète, mes collègues du groupe UMP et moi ne pensons pas que la France doive faire cavalier seul au sein de l'Union européenne.

Vous l'aurez compris : au-delà des couacs qui ont émaillé l'annonce de certaines mesures, au-delà de l'absence de visibilité quant au calendrier de mise en oeuvre, cette fiscalité verte est loin d'être claire et précise. La proposition de résolution pour une fiscalité écologique au coeur d'un développement soutenable qui nous est présentée aujourd'hui n'est tout simplement pas acceptable. Vous cherchez de l'argent, eh bien le signal envoyé par cette résolution est clair à cet égard : vous vous apprêtez à créer des impôts supplémentaires non pas pour protéger l'environnement, mais pour financer la politique du Gouvernement.

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