Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission du développement durable, régulièrement, l'évasion fiscale fait la une des journaux et relance le débat sur l'harmonisation fiscale au sein de l'Union européenne. Or, il est une fiscalité qui est loin d'être utilisée de façon équivalente : il s'agit de la fiscalité écologique qui, pourtant, pourrait constituer un puissant levier de transition énergétique et servir à la conservation de la biodiversité.
En effet, la fiscalité écologique doit être perçue comme la possibilité d'encourager les comportements vertueux ou de dissuader des pratiques néfastes en termes de consommation de ressources, d'émissions de gaz à effet de serre et de pollution, qu'il s'agisse de pollution de l'air, des sols, des eaux, ou encore de pollution sonore. Pour chacune de ces catégories, des instruments fiscaux existent déjà dans notre pays, mais ils demeurent incomplets ou perfectibles.
De fait, la mise en oeuvre d'une fiscalité écologique reste largement inaboutie en France. En 2010, notre pays était à l'avant-dernière place des pays de l'Union européenne, juste devant l'Espagne, pour ce qui concerne la place de cette fiscalité dans le PIB, soit 1,86 %, contre 2,37 % en moyenne dans l'Union. En Allemagne, notre modèle épouvantail préféré, dont les entreprises sont souvent considérées comme plus compétitives que celles de la France, ce chiffre est de 2,21 %. Voilà de quoi pousser les sceptiques à accepter d'y réfléchir sérieusement.
Le 1er mars 2013, la Cour des comptes a jeté un froid supplémentaire dans le climat frileux actuel de la fiscalité écologique en rendant public un référé sur les niches fiscales relatives aux énergies fossiles. Gazole, charbon et kérosène constituent autant de ressources énergétiques fossiles qui bénéficient d'un régime fiscal allégé. Elles sont au coeur de la réflexion sur la fiscalité écologique menée au sein d'un comité installé par le Gouvernement en décembre 2012.
La Cour des comptes s'est penchée sur les conséquences de ces « dépenses fiscales » énergétiques, rattachées à la mission « Écologie, aménagement et développement durable ». Ses conclusions vont dans le sens des demandes de toutes les associations de protection de l'environnement et de nombreux parlementaires. Elles soulignent un absent de taille, le kérosène, dont la non-taxation entraîne un manque à gagner estimé à 3,5 milliards d'euros en 2009, alors que c'est le mode de transport le plus polluant par passager ou par tonne transportée.
C'est à notre initiative, celle de la gauche, que le débat sur la fiscalité écologique s'est développé à partir de 1997. Il s'agissait de déplacer la fiscalité du travail vers la consommation de ressources rares et l'émission de polluants. Il fallait détaxer le travail, qui constitue une ressource trop réduite par rapport au nombre d'actifs, et taxer la pollution, qu'il faut au contraire rendre rare. Avec la droite, en 2002, on a observé un enterrement des politiques fiscales environnementales sacrifiées sur l'autel de la sacralisation de la baisse des prélèvements obligatoires.