Intervention de Delphine Batho

Séance en hémicycle du 4 juin 2013 à 15h00
Fiscalité écologique

Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

Le précédent gouvernement n'a rien fait non plus pour le déploiement de bornes de recharge des véhicules électriques ; avec Arnaud Montebourg, nous mettons en place un programme de 50 millions d'euros à cette fin.

J'ai été étonnée aussi de vos questions sur les énergies renouvelables. Nous avons dû prendre un certain nombre de mesures d'urgence et de relance pour les énergies renouvelables, à savoir l'éolien, la géothermie, la méthanisation, les énergies marines et le photovoltaïque. À cet égard, je salue la décision que vient de prendre la Commission européenne pour rééquilibrer les échanges dans le secteur des panneaux photovoltaïques.

S'agissant des transports, vous avez évoqué des projets d'infrastructures qui se caractérisent par un manque de financement de 120 milliards d'euros.

Enfin, j'ai été surprise par votre jugement à l'emporte-pièce sur le débat national sur la transition énergétique, où vous y représentez pourtant l'Assemblée nationale.

Je reviens aux orientations de la résolution. Le Gouvernement partage les considérants et les orientations principales de ce texte. Oui, la fiscalité écologique est un instrument indispensable de la transition vers un modèle de développement durable. Oui, cette fiscalité a pour finalité l'incitation aux comportements vertueux et le financement de la transition écologique. Non, elle n'est pas l'ennemie de la croissance, de la compétitivité et du pouvoir d'achat, pourvu que sa trajectoire soit correctement calibrée et que des mesures d'accompagnement efficaces soient prévues.

Je veux dire à M. Carvalho que, naturellement, la question du pouvoir d'achat est majeure. Oui, la France est en retard dans ce domaine, et le Gouvernement s'est engagé à amorcer le comblement de son retard avec des mesures qui prendront effet dès 2014 et s'inscriront dans une trajectoire de long terme.

Monsieur Ginesy, la méthode que je rappelais au début de mon intervention ne se caractérise pas par la précipitation : en effet, nous travaillons sur ces sujets depuis plusieurs mois déjà, dans le cadre d'une concertation qui associe les représentants des entreprises, des syndicats, des associations de consommateurs, des élus locaux et des ONG environnementales. L'ensemble des parties prenantes de ce débat contribuent à la réflexion, et nous cherchons à forger un certain nombre de points de consensus.

Pour la fiscalité écologique comme pour les autres volets fiscaux du projet de loi de finances pour 2014, les mesures ne sont pas encore stabilisées à ce jour. Pour la fiscalité écologique encore plus que pour les autres volets, un examen très attentif s'impose compte tenu des contraintes juridiques, constitutionnelles et communautaires dans lesquelles ces mesures doivent s'insérer. Les arbitrages budgétaires seront rendus dans les prochaines semaines ; je peux néanmoins vous indiquer d'ores et déjà que les mesures auxquelles nous travaillons tiennent compte des débats en cours au sein du comité Perthuis.

Elles visent : à mieux prendre en considération des enjeux de qualité de l'air et de réchauffement climatique ; à raboter les niches fiscales défavorables à l'environnement ; à lutter contre les pollutions et les atteintes à la biodiversité.

À la suite de l'intervention de Jean Launay, j'évoquerai la question du carbone et du « facteur 4 », que beaucoup d'entre vous ont abordée. Je suis favorable à l'introduction progressive d'une composante carbone dans la fiscalité. Aussi neutre que possible au départ, elle évoluerait ensuite en fonction de la conjoncture économique. Elle permettrait d'orienter la croissance, une fois celle-ci repartie, vers une économie à bas carbone. L'équation n'est pas facile, mais l'entreprise est à la fois nécessaire et possible, y compris dans le laps de temps qui nous sépare de l'accueil par la France, en 2015, de la Conférence internationale sur le climat.

M. Pancher et M. Leroy ont évoqué l'articulation avec le cadre européen, question essentielle en raison des difficultés actuelles du marché carbone européen. Nous soutenons les initiatives de la Commission européenne en faveur du back loading. Désormais, nous ne séparons plus cette question de celle d'une réforme structurelle, passant notamment par l'affirmation d'un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans l'Union européenne à l'horizon 2030, par une évolution de la gouvernance du marché carbone, par la fixation d'un système de prix plancher ou de retrait automatique de quotas, c'est-à-dire d'un mécanisme de flexibilité qui évoluerait en fonction de la conjoncture économique, et par un mécanisme d'inclusion carbone.

L'empreinte carbone par habitant de la France a augmenté de 15 % en vingt ans du fait des importations ; nous devons y être extrêmement attentifs. La lutte contre les fuites de carbone est une question majeure par rapport à un certain nombre de secteurs industriels. Il conviendra de réserver aux industries sous quotas un traitement particulier, tenant compte de la contrainte économique objective qui résulte du contingentement de leurs émissions.

Le comité Perthuis a accompli un travail très important sur la taxation des fluides frigorigènes. Il a conclu que la solution la plus pertinente du point de vue environnemental consisterait à taxer les fuites de ces substances plutôt que leur mise sur le marché. Une taxation des émissions fugitives pendant la vie de l'équipement inciterait les fabricants à améliorer l'étanchéité de leurs circuits.

En matière de politique industrielle, Éva Sas a rappelé un certain nombre d'exemples étrangers tout à fait importants, notamment celui de la Suède qui, par le biais d'une taxe sur les émissions d'oxyde d'azote, a déposé de nombreux brevets pour des technologies de filtrage de ce polluant. Grâce à une politique très exigeante de recyclage industriel, la Suède ou l'Allemagne – autre exemple évoqué – conquièrent des parts de marché. C'est un élément qui peut être mis au service de la compétitivité industrielle.

Comme beaucoup d'entre vous, Jean Launay a évoqué la fiscalité des carburants. Le comité Perthuis a considéré que l'écart de taxation au profit du gazole est injustifié au regard des coûts externes environnementaux des différents carburants. Comme l'a rappelé Geneviève Gaillard, la Cour des comptes a recommandé, dans un référé récent, de requalifier en dépenses fiscales le différentiel de taxation entre le gazole et l'essence et d'étudier un alignement progressif.

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