Mme la Présidente, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur le travail accompli en première lecture par notre commission. En revanche, je rappellerai qu'en séance publique, à mon initiative, l'Assemblée nationale a apporté trois modifications à ce dispositif.
Notre assemblée a, tout d'abord, opéré un fléchage des fonds débloqués vers « l'achat d'un ou plusieurs biens ou la fourniture d'une ou plusieurs prestations de services », pour éviter les comportements d'optimisation et de transfert entre supports d'épargne. En effet, l'objectif de la mesure reste d'alimenter la consommation des ménages. Afin de garantir l'effectivité de ce fléchage, nous l'avons assorti d'un dispositif de contrôle, imposant au salarié de conserver les pièces justificatives attestant l'usage qu'il a fait des sommes perçues, qu'il devra présenter, le cas échéant, à l'administration fiscale.
Deux autres modifications, plus techniques, ont été apportées au dispositif, l'une portant sur les modalités de déblocage, et l'autre instaurant une période de déblocage fixe, de date à date, du 1er juillet au 31 décembre 2013.
Enfin, à l'initiative du groupe UDI, l'Assemblée nationale a ajouté un article additionnel, l'article 1er bis, demandant au Gouvernement la remise au Parlement, dans un délai d'un an, d'un rapport qui dresse un bilan de la mesure de déblocage exceptionnel. En effet, un tel bilan n'avait pas été réalisé lors des déblocages précédents et il me semble nécessaire d'assurer le suivi et l'évaluation des lois que nous votons.
La commission des affaires sociales du Sénat a, ensuite, rejeté la proposition de loi. La Haute assemblée a donc examiné, en séance publique, le texte issu de nos travaux. Elle adopté l'article 1er bis conforme, puis maintenu la suppression de l'article 2, qui comportait un gage « levé » par le Gouvernement. Elle a apporté une modification singulière à l'article 1er, sur laquelle je souhaite m'arrêter un instant.
Formellement, cette modification a été adoptée à l'initiative du Gouvernement, car le délai de dépôt des amendements était clos. Mais, en réalité, elle est issue d'une demande du groupe UDI-UC, qui souhaitait restreindre l'utilisation des sommes débloquées au paiement de prestations de services, soit des prestations non délocalisables. Cette limitation d'objet posait d'évidents problèmes, comme l'a démontré M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation : un salarié aurait ainsi pu débloquer des fonds pour financer la pose d'une cuisine, mais pas, dans le même temps, l'achat d'un nouveau réfrigérateur ou d'un four.
Un compromis, assez étonnant, je vous le concède, a donc été trouvé, qui consiste à maintenir le dispositif de fléchage des sommes que nous avons adopté, tout en soulignant que l'achat d'un bien doit intervenir « en particulier dans le secteur de l'automobile ».
Cet amendement rédactionnel, ou plutôt cette « verrue » rédactionnelle, ne me semble pas constituer un apport majeur, je ne peux pas vous le cacher. Cette modification me paraît dépourvue de toute portée normative. De plus, il ne me semble pas opportun de viser un secteur économique particulier. Le secteur de l'automobile connaît certes des difficultés, mais ce n'est malheureusement pas le seul. Je ne vois pas, de surcroît, la protection que peut lui apporter la modification introduite par le Sénat.
Cependant, je tiens à rappeler l'importance de la mesure portée par la proposition de loi, qui peut constituer un fort levier de croissance et de relance de la consommation. Dans le contexte économique difficile que connaît aujourd'hui la France, il m'apparaît donc nécessaire de mettre en oeuvre rapidement le dispositif de déblocage que nous avons adopté.
Or, si nous décidions de modifier le texte adopté par le Sénat, par exemple pour y supprimer la mention du secteur automobile, dont nous sommes tous d'accord qu'elle est inutile, cela rendrait impossible l'entrée en vigueur de la mesure de déblocage au 1er juillet prochain. En effet, devraient alors intervenir une deuxième lecture au Sénat, puis, si le Sénat rétablissait son texte, une commission mixte paritaire, qui, si, elle échouait, entraînerait une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale puis au Sénat, et, enfin, une lecture définitive à l'Assemblée nationale. Au vu de l'ordre du jour très chargé des deux assemblées, il semble impossible que l'ensemble du processus soit accompli avant le 1er juillet.
Bien que je sois très réservé sur la modification apportée par le Sénat, je pense que nous ne devons pas pénaliser les salariés qui attendent cette mesure, à cause d'une disposition qui, somme toute, n'a pas de portée normative. Pour cette raison de fond, je vous invite, mes chers collègues, à adopter sans modification le texte de la proposition de loi tel que voté par le Sénat. Je vous remercie.