– DCNS est une entreprise française publique vieille de 400 ans, elle a été créée par Richelieu pour construire des bateaux militaires. Société anonyme depuis 2003, elle est détenue depuis 2007 par Thales à hauteur de 35 %. Elle emploie environ 12 000 personnes et son chiffre d'affaire s'élève à environ 4 milliards d'euros. Actuellement ce chiffre d'affaire résulte quasi exclusivement de l'industrie navale militaire ; à échéance de 2020 le chiffre d'affaire devrait s'élever à 5 milliards d'euros, avec un tiers dans l'industrie navale nationale, un autre tiers dans l'industrie navale exportée et un tiers produit dans le secteur de l'énergie. La mer est en effet l'avenir de la planète.
Nous sortons actuellement de la phase de laboratoire pour entrer dans celle de la maturité, qui dépend des différentes technologies. Pour ce qui est de l'hydrolien, nous commençons à sortir de la phase de R&D pour nous mettre en situation de capacité de développement commercial. La France fait la course en tête, avec plusieurs acteurs de poids, les industriels de DCNS étant les seuls à développer de front les quatre grandes filières technologiques.
Le développement de ces technologies se fera en trois étapes avec des enjeux différents. Le premier enjeu est d'ordre purement technologique, pour faire des démonstrations à l'échelle unitaire dans les quatre filières ; c'est fait. Le deuxième enjeu est industriel, celui de la ferme pilote, pour faire marcher toutes ces machines ensemble avec un coût de l'énergie pertinent et un développement commercial. Il s'agira ainsi de produire à Cherbourg 100 hydroliennes par an, donc tous les deux jours une machine de la taille d'un immeuble de 7 étages.
Une nouvelle industrie va naître d'ici à quelques années. Le stade de la commercialisation est prévu entre 2016 et 2018. La France est le seul pays avec les États-Unis à être présent dans tous les segments ; elle est l'actuel leader mondial, avec plus de 500 millions d'euros d'investissement par an. Les industriels français occupent la première place mondiale sur l'énergie thermique des mers. Sur l'éolien flottant, la France a 3 projets parmi les 5 premiers au monde. Pour l'hydrolien, la France a 2 projets parmi les 5 premiers, qui ont été rachetés à des entreprises étrangères. La France est également bien placée pour l'houlomoteur, avec 2 projets parmi les 10 premiers. Il n'est donc pas vrai de dire que nous marquons le pas. L'effort de développement technologique, public et privé, est conséquent. Nous attirerons l'industrie en France si nous avons un minimum de visibilité sur un marché de démonstration, puis sur le marché national.
Nous avons le sentiment que le marché sera très international, tourné vers l'exportation, mais il faudra au préalable faire ses preuves en France sur des fermes pilote, au plan industriel et commercial. Nous créons ainsi de nouvelles industries de « cols bleus » avec deux caractéristiques à prendre en compte en considérant que seuls les premiers sur le marché gagneront : les clients énergéticiens sont des investisseurs financiers, par nature conservateurs, et auront confiance dans les premières machines en fonctionnement ; le fait d'avoir une ferme commerciale donne une visibilité suffisante pour investir dans une usine, avec une production en série nécessitée par la taille des engins et un atout économique à produire près de la ressource. La courbe d'apprentissage fait que plus on produit, plus on est compétitif et plus on gagne des marchés.
La carte de la planche n° 3 représente en bleu marine les pays qui ont investi dans des projets à un stade commercial et en bleu clair ceux qui ont investi dans des projets pilote en R&D, sur les quatre filières. Nous voyons que les expressions d'intérêt se multiplient à l'échelle de la planète. Les développements à l'exportation seraient grandement facilités par une démarche de diplomatie des énergies marines. Rares sont les pays (moins de 10) capables de simultanément mener les études d'acceptabilité, mettre en place les financements, identifier les ressources et mener les opérations de concertation publique. Moins de 10 % du potentiel mondial a fait l'objet d'études détaillées. Or nous avons identifié plus de 150 pays qui mériteraient d'être aidés par la France pour accompagner leur développement.
La France dispose de compétences scientifiques, techniques et industrielles sur toute la chaîne de la valeur. Nous disposons en France d'une capacité très étendue pour offrir clé en main des solutions pour des parcs sur toute la planète. Nous sommes capables de construire ensemble, avec le soutien de l'État, une offre française à l'international, permettant de faire la course en tête.
En conclusion, je redirais que nous ne sommes pas en retard et que nous pouvons être optimistes. Le Royaume-Uni a donné un peu plus de visibilité aux industriels, avec des concessions, des ressources et un marché accessible. Mais la course reste ouverte pour le développement de vraies filières industrielles exportatrices, avec des usines implantées sur notre sol. Nous devons nous donner la possibilité de nous développer, en commençant par le marché national de démonstration.