L'État a toujours été un très mauvais actionnaire de la SNCM. Seules la situation de monopole et les subventions qui lui étaient octroyées au titre de la continuité territoriale permettaient de maintenir à flot une entreprise qui n'a jamais consenti les efforts de structuration nécessaires ni fait preuve d'ambition de développement au-delà de la Corse, qui était pour elle un « territoire captif ». La situation de la SNCM était devenue critique quand la décision de privatisation est intervenue. Bruxelles n'acceptant plus de recapitalisation, restait la solution de l'ouverture du capital. C'est pourquoi la décision de privatisation totale a surpris la collectivité territoriale de Corse, qui a été placée devant le fait accompli et a dû en gérer les conséquences.
Je voudrais préciser que le service complémentaire n'a pas été créé à ce moment-là. Cette aberration avait pour fonction de préserver la paix sociale en maintenant l'emploi à Marseille et, dans une bien moindre mesure, en Corse. En réalité, il s'agit d'un faux « service public d'été », et Bruxelles l'a condamné à juste titre. Pour compenser, une aide sociale au passager transporté était octroyée aux lignes maritimes entre Toulon, ou Nice et la Corse. C'est pourquoi je m'étonne que le Gouvernement ait déclaré, par la voix de Mme Batho, qu'il ferait tout pour intégrer le service complémentaire dans la délégation de service public.
Il est vrai que nous subissons aujourd'hui une situation qui peut paraître anormale. Pour ma part, j'étais partisan d'une simple ouverture du capital et de la recherche d'un partenaire dans le secteur des transports. Il faut reconnaître cependant qu'aucun grand opérateur de transport ne s'était porté candidat à la reprise de la SNCM – mais peut-être avait-on tout fait pour les dissuader.
S'il doit y avoir une commission d'enquête, qu'elle se fasse sereinement, en tenant compte du climat politique et social. Je rappelle que la SNCM assure toujours une délégation de service public pour la desserte de la Corse au départ de Marseille.