Tout en partageant votre analyse du mythe de la société postindustrielle, la CGT considère également que ce n'est pas sur les ruines de l'industrie d'aujourd'hui nous ne construirons celle de demain. Si notre pays est celui qui se désindustrialise le plus en Europe, c'est parce que l'industrie n'offre pas la rentabilité de court terme à deux chiffres qu'exige la financiarisation de l'économie.
Quant à la recherche, elle constitue en matière industrielle un enjeu central dont tout le monde parle. Le Président de la République a d'ailleurs reconnu l'importance d'y consacrer 3 % de notre PIB, conformément à l'objectif de Lisbonne. Cependant, la réalité est tout autre : loin d'atteindre ce taux, la France reste un très mauvais élève en ce domaine – que ce soit en termes de masses financières, d'orientation des travaux de recherche, d'articulation entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée ou d'implication des industriels.
En matière environnementale, si la France doit demeurer un modèle, le facteur 4 est cependant largement compatible avec sa réindustrialisation. Car l'industrie, qui a déjà accompli des efforts importants et qui continue à en faire – comme en témoignent souvent les projets alternatifs proposés par les salariés, tels le haut-fourneau électrique –, se trouve loin derrière les secteurs des transports, du logement et de l'agriculture en termes d'émissions de CO2. En outre, notre désindustrialisation a entraîné un quasi doublement de nos importations de dioxyde de carbone au cours des dernières années. Et si la consommation d'électricité a diminué pour la première fois en France, c'est parce que les usines ferment.
Quant à l'énergie, son prix et sa qualité constituent un facteur de choix important dans la localisation des industries. La France doit donc conserver ses atouts en ce domaine. Ainsi, par exemple, à Saint-Jean-de-Maurienne, Rio Tinto s'est contenté de mettre la clef sous la porte au lieu de réaliser les investissements nécessaires à la modernisation de son appareil productif. De fait, les grands groupes appliquent aujourd'hui une stratégie consistant à se recentrer sur l'amont minier qui est beaucoup plus rentable. Ayant fait réaliser un audit sur les questions énergétiques, la CGT a constaté, d'une part, que le site serait rentable dès lors que le prix du mégawattheure s'élèverait à 35 euros – sachant qu'il s'élève actuellement à 38 euros grâce au tarif Exceltium qui sera supprimé en 2014. Et que, d'autre part, si l'on modernise le site en y installant des cuves plus économes de 20 % en énergie, il sera rentable à 42 euros le MWh, ce qui correspond au tarif de l'Agence régionale de l'environnement et des nouvelles énergies (ARENE).
La CGT a donc soumis il y a plusieurs mois au ministère un projet – sur lequel elle n'a encore reçu aucune réponse – permettant de réindustrialiser la région grâce à de nouveaux programmes d'équipement hydraulique. Un certain nombre de stations de pompage y sont effectivement implantées : ce type de stations constitue actuellement l'un de seuls moyens de stocker l'électricité – et ce, à un faible tarif et sans émettre de CO2 de surcroît. Or, il est encore possible d'en installer à plusieurs endroits en France. Conçus par EDF, ces projets n'ont finalement pas été développés au motif de la déréglementation et de la libre concurrence. C'est pourquoi nous les avons repris et fait réétudier par les ingénieurs. Nous proposons notamment d'installer de telles stations en Savoie – le profit dégagé permettant alors de revivifier notre région et de la réindustrialiser en conservant le site de production d'aluminium de Saint-Jean-de-Maurienne. Nous tenons à votre disposition ce projet baptisé « Hydralu » – qui « tient la route » sur les plans technique et économique.
Enfin, la transition énergétique nécessitera la production de davantage d'acier – notamment pour les transports et le logement. Il nous faut donc disposer de l'outil industriel correspondant.