Intervention de Denis Baupin

Réunion du 5 juin 2013 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Baupin :

Je rejoins les différents propos qui viennent d'être tenus sur le débat en cours et les enseignements que l'on peut tirer de six mois de discussion. En premier lieu, comme l'a indiqué la ministre, le statu quo ne constitue effectivement pas une option. J'ajoute que nous avons le choix de différentes trajectoires énergétiques. Certes, aucune n'est simple mais, au moins, nous avons cette capacité qui nous est offerte quant aux différentes orientations stratégiques. Je partage par ailleurs le constat qui a été dressé d'un consensus sur la question de l'efficacité énergétique de la part de tous les acteurs, même si les horizons retenus diffèrent. Une grande majorité d'acteurs partage l'idée, que vous avez exprimée madame la Ministre, que le facteur 4 en matière d'émission de gaz à effet de serre équivaut à un facteur 2 en matière de réduction de la consommation énergétique à l'horizon 2050. C'est d'ailleurs l'objectif qui a été retenu par plusieurs pays, dont l'Allemagne et la Grande-Bretagne. En second lieu, le soutien aux énergies renouvelables nécessite un choc de simplification pour favoriser le développement de ces énergies. Enfin, il existe un accord sur le fait que la transition énergétique ne peut se faire contre la compétitivité économique et la justice sociale. Ce constat constitue un élément important du rapport – que j'ai rédigé avec Vincent Mages et que je vous remercie d'avoir cité – qui souligne la nécessité de protéger certains industriels « énergo-intensifs » et, dans le même temps, de faire de la transition énergétique un levier pour notre compétitivité car il y a matière, en fonction des choix qui seront faits, de promouvoir les énergies vertes.

J'ajoute que quel que soit le scénario retenu, une réduction de la consommation énergétique est nécessaire et chacun s'accorde à reconnaître que notre économie y sera, de toute façon, gagnante en dépit de certains investissements de départ qui s'imposeront. La question qui se pose aujourd'hui est celle des critères de nos choix. Pour ma part, j'en retiens deux : tout d'abord, l'emploi. Nous devons privilégier les choix intensifs en emplois. Ensuite, je retiens la robustesse et c'est là que nous rejoignons un sujet qui fait divergence entre nous, à avoir le nucléaire. Le débat et les auditions de l'Autorité de sûreté nucléaire montrent que nous sommes dans une impasse sur la poursuite du nucléaire ainsi que sur l'évaluation des coûts. Sur ce dernier point, le rapport de la CRE met d'ailleurs « les pieds dans le plat ». Il existe, en effet, une distorsion entre la réalité du prix – qui, en France, est réglementé – et celle du coût du nucléaire. C'est en réalité le prix de l'électricité d'origine nucléaire qui est favorable à l'industrie, pas son coût dans lequel devraient être intégrées les dépenses de développement des réseaux, de gestion des déchets, de recherche – financées par l'État - et de démantèlement des centrales – question sur laquelle la Cour des comptes s'est récemment prononcée. Car, une question est également de savoir ce qu'on fait ensuite des installations nucléaires : quelle est leur durée de vie ? 30 ou 40 ans ? Quel référentiel privilégie-t-on ? L'autorité de sûreté ne s'est prononcée que sur une durée de vie à 30 ans, centrale par centrale ; au-delà, le référentiel n'existe pas. On ne sait pas si un référentiel à 40 ans est souhaitable – vous connaissez mon opinion -, voire possible et à quelles conditions de coût ? Tout cela doit être chiffré, ce qui démontre l'impasse dans laquelle nous sommes pour penser l'avenir énergétique de la France. Et ce d'autant que rien n'a été provisionné pour les installations nucléaires existantes, que ce soit pour les prolonger (renforcement) ou pour les remplacer (quelles options ? ). Toutes ces questions sont devant nous. J'en termine pour dire que le choix qui a été fait par le Gouvernement de réduire cette incertitude et cette vulnérabilité consistant à dépendre à près de 78 % du nucléaire pour notre production d'électricité est un choix qui s'impose à nous et que l'objectif de réduire la part de l'énergie nucléaire à 50 % de la production en 2025 est indispensable. Ce choix nous permettra de réduire une vulnérabilité soulignée par l'Autorité de sûreté nucléaire elle-même et d'être plus robustes demain.

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