Intervention de André Chassaigne

Réunion du 5 juin 2013 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Le Conseil constitutionnel a censuré la principale mesure de la loi du président Brottes sur le dispositif de bonus-malus sur l'argumentation que le principe d'égalité devant les charges publiques n'avait pas été respecté car les consommations professionnelles n'étaient pas incluses dans le dispositif. C'était en effet un des problèmes majeurs du texte, avec la complexité et l'inégalité qu'il était susceptible de créer entre les territoires et les ménages.

Le Conseil a également dénoncé l'application du bonus-malus pour les particuliers vivant dans des immeubles collectifs « pourvus d'installations communes de chauffage » et, par conséquent, impossibles à régler de manière individuelle. J'avais, durant les débats, dénoncé la situation que ne manquerait pas de créer l'absence de réel levier de pression pour les locataires.

Encore hier, j'ai eu connaissance d'une personne âgée, locataire, dans un immeuble très mal isolé, qui venait de se faire couper l'électricité pour une facture impayée de 1 500 euros de consommation pour l'année, qu'elle était dans l'incapacité de régler, alors qu'elle n'a aucun moyen de pression pour faire changer par son propriétaire son installation de chauffage.

Aussi, ma première question : vous avez annoncé suite à cette censure « ne pas renoncer à une tarification vertueuse et responsable de l'énergie », laquelle trouverait place, à travers « une solution juridiquement solide », dans « projet de loi de programmation sur la transition énergétique. Quel dispositif envisagez-vous et avec quels objectifs en terme de réduction des consommations ?

La question du plan de rénovation des logements est directement liée à la précédente.

La maîtrise de la consommation énergétique des logements est une priorité d'action puisque le secteur résidentiel représente environ 40 % des consommations énergétique en France. Le parc ancien représente 30 millions de logements. Le plan d'investissement pour le logement prévoit de rénover 500 000 logements par an d'ici 2017, avec des guichets uniques et des ambassadeurs de l'énergie pour accompagner notamment les ménages précaires. Le Grenelle de l'environnement ambitionnait déjà de rénover 400 000 logements par an, mais dans la réalité ce sont seulement 120 000 logements qui sont effectivement rénovés, dont 25 000 logements sociaux.

Pour 2014, l'objectif du nouveau plan est fixé à 270 000 logements rénovés. Le Gouvernement propose une nouvelle aide de 1 350 euros par opération pour les ménages dont les revenus annuels n'excèdent pas 35 000 euros qui s'ajoutera aux dispositifs existants (crédit d'impôt développement durable, aides Anah et éco PTZ).

Or, selon un rapport du CESE, le coût de la rénovation énergétique d'un logement va de 20 000 à 30 000 euros. Soit entre 10 milliards et 15 milliards d'euros par an, pour 500 000 rénovations. Les aides de l'État : une enveloppe de 500 millions d'euros. De très nombreuses associations, ONG, et personnes ressources du secteur de l'énergie et du bâtiment ont souligné l'extrême insuffisance des moyens consacrés par l'État.

Il y a pourtant urgence et il faut des moyens dans un contexte de perte de pouvoir des ménages, avec 8 millions de personnes en situation de précarité énergétique. Imaginez ce que représente une rénovation de 20 000 ou 30 000 euros pour un ménage qui n'arrive même pas à finir les fins de mois. Quelle que soit la possibilité d'amortissement rapide de cette dépense en réduisant leur facture énergétique, ce ne sont pas 1 350 euros d'aide publique qui vont permettre de les décider.

Ma deuxième question, le gouvernement est-il prêt à mettre les moyens de son ambition en direction de la rénovation thermique des logements dès le budget 2014 ?

Alors que la France connaissait une période de fortes pluies et de températures très basses en ce printemps 2013, les concessions hydroélectriques de notre pays ont une nouvelle fois démontré toute leur importance, en fournissant beaucoup d'électricité sans émission de CO2 à un moment où la consommation était supérieure au niveau habituel à cette période de l'année.

Ces ouvrages, dont le propriétaire est l'État, sont actuellement concédés très majoritairement à EDF, une part moins importante revenant à GDF Suez. Une nouvelle fois donc, la gestion par EDF de 80 % d'entre eux a démontré son efficacité. Pourtant, dans le cadre de l'ouverture aux marchés de l'énergie électrique, on pousse notre pays à vouloir céder à d'autres opérateurs privés l'exploitation des ouvrages hydrauliques, sans garantie en matière de sécurité et d'approvisionnement futur en électricité, sans garantie en terme d'aménagement des territoires, de la gestion des usages de l'eau, de la situation des salariés…

Vous le savez Mme la ministre, d'ici à fin 2015, la concession d'exploitation de 49 grands barrages devrait être soumise à appel d'offres européen.

Les députés Marie-Noëlle Battistel et Éric Straumann doivent présenter prochainement leur rapport définitif sur l'hydroélectricité. Je sais que vous êtes prête à résister au diktat de la mise en concurrence d'un patrimoine financé par les citoyens français et essentiel au maintien d'un mix énergétique peu émetteur de CO2. Vous vous êtes déjà déclarée ici défavorable à la libéralisation du secteur. Effectivement, l'énergie hydraulique est un bien commun !

Pouvez-vous nous en dire plus sur les intentions du Gouvernement, sur sa volonté d'action au niveau européen et sur les moyens de contrer les intentions de la Commission européenne ?

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