Intervention de Jean-Marc Manach

Séance en hémicycle du 11 juin 2013 à 15h00
Débat sur internet et la protection des données personnelles — Table ronde

Jean-Marc Manach, journaliste :

Ayant beaucoup travaillé sur les marchands d'armes numériques, je suis en mesure de répondre à cette question. Un rapport de 600 pages sur les raisons de l'échec d'HADOPI a été publié il y a un mois, mais, à ma grande surprise, aucun sur l'affaire Amesys – du nom de la société française qui a vendu un système de surveillance d'Internet à Kadhafi. Celui-ci n'est plus là, le logiciel non plus, et pourtant des dirigeants d'Amesys – dont le nom a changé – se trouvaient en février dernier à Tripoli pour proposer le système dans le cadre d'un salon de marchands d'armes et de télécommunications. Il serait en outre utilisé au Maroc, au Kazakhstan et dans un certain nombre d'autres pays, sans que les pouvoirs publics en pipent mot. Au contraire, en Grande-Bretagne, en Allemagne et aux États-Unis, les pouvoirs publics ont infligé des amendes aux entreprises britanniques, allemandes et américaines qui ont vendu des systèmes de surveillance à des dictateurs. Je m'étonne donc du silence total du Gouvernement sur ce point. Alors que des gens se battent au niveau européen sur ce sujet, je ne comprends pas comment la France, patrie des droits de l'homme, peut laisser la situation en l'état, sans qu'il y ait aucun débat politique pour remettre en cause la fourniture, proprement scandaleuse, d'armes de surveillance à des dictateurs.

Quant à l'affaire Prism, je suis toujours très étonné de constater que l'on dépense des dizaines, voire des centaines de millions de dollars, peut-être même des milliards, en systèmes de surveillance généralisée des télécommunications au nom de la lutte contre le terrorisme, alors même que l'on n'arrive pas à trouver ne serait-ce que 1 % de ces sommes pour surveiller les transactions financières et lutter contre les paradis fiscaux, alors même qu'il y a évidemment là de l'argent à récupérer ? Je ne parle même pas de la fiscalité du numérique et de la question de savoir s'il faut ou non taxer les données personnelles : je parle de traquer des gens qui violent la loi au moyen des réseaux de communication.

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