Intervention de Isabelle Attard

Séance en hémicycle du 11 juin 2013 à 15h00
Débat sur internet et la protection des données personnelles — Débat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

Je voudrais revenir sur une question qu'a évoquée Mme la présidente de la CNIL, à savoir l'ajout, dans le projet de règlement européen, d'une disposition qui me paraît dangereuse et qui va complètement modifier ce texte magnifique et le rendre contraire aux objectifs poursuivis : je veux parler des données pseudonymes. Les entreprises disposeraient en effet du droit de créer des bases de données très complètes en retirant simplement les éléments permettant d'identifier les personnes, à savoir leurs nom et prénom.

Or on sait très bien que déduire d'une telle base de données l'identité d'une personne est un vrai jeu d'enfant. Il semblerait même que le numéro de sécurité sociale doive être considéré comme une donnée pseudonyme. Autant dire l'hypocrisie d'un tel concept !

L'anonymisation des données est une escroquerie intellectuelle. Considérez une base de données de clients d'un opérateur de télécommunications, de laquelle sont retirés les éléments permettant une identification immédiate : nom, prénom, adresse, numéro de téléphone et relevé d'identité bancaire. Cette anonymisation est supposée protéger la vie privée de tout individu figurant dans cette base de données. Pensez-vous vraiment qu'il soit compliqué de retrouver l'identité d'un individu, lorsque l'étude des déplacements de son téléphone portable permet de déterminer son lieu de résidence, son lieu de travail, l'école de ses enfants et les magasins dans lesquels il se rend ?

Un article de la revue Nature de mars 2013 précise qu'en partant d'une telle base de données, appartenant à un opérateur de télécoms belge, des chercheurs ont réussi à contourner les mesures d'anonymat, avec un taux de réussite de 95 %. Il est donc totalement illusoire, voire malhonnête de prétendre que l'anonymisation suffit à protéger la vie privée des personnes.

Pensez-vous, madame, la ministre, pouvoir empêcher un tel ajout dans ce projet de règlement européen ?

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