Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 28 septembre 2012 à 12h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

« Nous voulons le tenir », nous a dit M. Moscovici au sujet de l'objectif de 3 % du PIB de déficit. J'ai entendu le rapporteur général parler de 3 % fin 2013, comme l'avait fait le Président de la République à la télévision. Ce « fin 2013 » reflète t-il les débats qui animent la majorité sur une évolution éventuelle de l'objectif, qui deviendrait glissant, ou s'agit-il, plus encore que d'une volonté, d'un engagement de le tenir en 2013 ? Je vous remercie de me rassurer sur ce point.

« Vérité des mots, vérité des chiffres », avez-vous dit. Vous nous parlez de modernisation. Pierre-Alain Muet vient de nous rappeler l'évolution du déficit structurel. Quelles sont les mesures structurelles qui permettent de prédire l'évolution du déficit que vous nous annoncez ? Autrement dit, quelles sont les mesures structurelles et durables qui garantissent que l'effort annoncé est tenable dans la durée ?

Par ailleurs, nous ne discernons pas de mesures en faveur de la compétitivité dans ce budget. Puisque vous avez assez joliment défini le budget politiquement tout à l'heure, pouvez-vous nous expliquer où est la cohérence entre les mesures anti-compétitives que prend ce budget, par exemple sur les modalités de déduction des intérêts d'emprunt des entreprises, et l'annonce de mesures de compétitivité pour le début de l'année prochaine ?

En ce qui concerne les prévisions de croissance, je n'intenterai pas de procès au Gouvernement sur la prévision de 0,8 %. Il est normal que l'exécutif ait une vision raisonnablement positive de la situation, et il n'est ni de votre responsabilité ni de la nôtre de tenir un propos dépressif sur les perspectives de croissance. En revanche, est-il raisonnable de retenir une prévision de 2 % dès 2014 ? Pouvez-vous seulement avancer un début de justification de ce chiffre ?

Vérité des mots, toujours. Vous avez parlé de ceux qui s'enrichissent en dormant. S'agissant de la fiscalité du capital, et aussi de la fiscalité de ceux qui investissent, je doute qu'opposer ceux qui payent l'impôt en travaillant et ceux qui « s'enrichissent en dormant » fasse beaucoup avancer le débat.

Vous annoncez dans vos fiches qu'il s'agit aussi de refuser l'austérité. Vous savez que je regrette que le mot « rigueur » ne soit pas davantage assumé. Je ne suis pas sûr qu'il faille souligner les mots comme vous le faites.

J'en viens aux recettes. Les choses sont claires, même si vous ne vous êtes guère appesantis. La réalité est que le projet de loi de finances augmente l'impôt sur le revenu de 23 % et l'impôt sur les sociétés de 30 %. Vous nous dites que les Français les plus modestes seront préservés. Permettez-moi de prendre deux exemples. Jusqu'à présent, ceux de nos concitoyens qui construisaient eux-mêmes leur maison individuelle étaient exonérés de redevance sur l'archéologie préventive. Sachez, chers collègues, que les membres de cette catégorie favorisée et richissime ne seront plus exonérés de cette redevance ! De même, nos concitoyens saisonniers dans l'agriculture, que leur temps de travail élevé conduit à gagner plus qu'un SMIC mensuel – non que leur SMIC horaire soit exceptionnel, mais parce que leur temps de travail est très important – constateront que le Gouvernement s'attaque à l'exonération de charges sur les salariés agricoles occasionnels au-delà d'un certain montant en proportion du SMIC. Dans les deux cas, les aggravations de charges pèsent sur les catégories les plus modestes ou les classes moyennes.

Par ailleurs, vous avez dit que 4 millions de Français seraient sortis des redevables de l'impôt sur le revenu. Chacun sait pourtant, et vous le reconnaissez vous-mêmes, qu'un des défauts de l'impôt sur le revenu est d'être excessivement concentré. Pourquoi succomber à nouveau à la loi d'airain qui veut que chaque fois que l'on réforme cet impôt, on restreigne encore le champ de ceux qui le payent ?

S'agissant de la fiscalité des intérêts d'emprunt et du calcul de l'impôt sur les sociétés, avez-vous fait procéder à une étude d'impact de cette mesure rétroactive dont le rendement sera élevé en 2013 ? Soit dit en passant, il s'agit de recettes non reconductibles. Quel sera son impact sur l'investissement et sur les partenariats public privé – PPP –, qui ne sont certes pas une méthode miracle, mais peuvent présenter un intérêt dans la conjoncture présente ?

Enfin, vous nous parlez d'une baisse des prélèvements obligatoires en fin de période, en 2017. S'agit-il dans votre esprit d'une ambition de modération de l'impôt, ou simplement de l'effet automatique de l'augmentation de la base taxable ?

Je terminerai par les dépenses. Je constate que vous ne tenez pas l'objectif de « zéro valeur ». Vous nous avez présenté une distinction intéressante entre les dépenses des ministères et celles de l'État. Certes, j'ai entendu les chiffres que vous avez donnés sur les dépenses des ministères, mais j'observe que vous ne respectez pas strictement la règle du « zéro valeur » pour les dépenses de l'État hors charge de la dette et pensions.

S'agissant des emplois, je constate que le solde de l'effet de la loi de finances rectificative et de la loi de finances initiale en 2013 est une augmentation de l'emploi public – + 5491 dans vos tableaux, pour ce qui concerne l'État. Il n'y a donc pas de stabilité de l'emploi public, d'autant qu'on note également une augmentation chez les opérateurs. Vous risquez dès lors d'être confrontés à quelques difficultés de gestion. Vous avez critiqué le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, mais, au ministère de l'Écologie, pour prendre un exemple, ce sont 8 emplois sur 10 qui ne sont pas reconduits dans le budget pour 2013 ! Et comment allez-vous faire pour recruter des enseignants ? Cela reste un problème constant.

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