Je remercie ceux qui ont exprimé leur soutien à ce projet de budget, dont ils ont compris et approuvé l'équilibre. Je vais bien sûr m'efforcer de répondre aux autres.
Je pense en toute conviction et en toute sincérité, messieurs Mariton et Sansu, qu'il est nécessaire de respecter le critère des 3%. Il est certes difficile – et douloureux – de bâtir un budget avec l'effort de 30 milliards d'euros que nous proposons. Mais y renoncer serait plonger la France dans une spirale récessive, la livrer en pâture aux marchés, et donc abandonner notre souveraineté. Nous nous retrouverions en effet rapidement avec des taux d'intérêt croissants, à la fois pour notre dette souveraine et pour nos entreprises. Or l'expérience de certains de nos voisins, qui ont cru à un moment donné au laisser-faire budgétaire, nous enseigne que cette hypothèse est bien pire que celle du sérieux que nous vous proposons. Du reste, c'est un sérieux de gauche : il y a l'objectif, mais aussi le chemin pour y parvenir. Nous préservons à la fois l'offre, la demande et la justice. J'assume ce choix.
La fin 2013, monsieur Mariton, c'est le 31 décembre 2013. Il n'y a là-dessus ni tergiversation, ni échappatoire : le calendrier sera respecté.
Je vous remercie pour votre satisfecit sur notre prévision de croissance pour 2013. Je la crois réaliste. Elle incorpore la part de volonté nécessaire pour donner une impulsion forte.
Permettez-moi maintenant de tenter de vous convaincre sur notre prévision de croissance à partir de 2014. Avec une croissance effective de 2 %, notre niveau d'activité ne rejoindrait toujours pas son potentiel en 2017. Ce taux de croissance est d'ailleurs nettement inférieur à ceux que l'on observe habituellement en sortie de crise. Notre scénario de croissance potentielle est prudent. Nous retenons l'hypothèse conventionnelle, prudente, d'un redressement progressif de la croissance potentielle d'ici à 2017, l'accélération reflétant l'impact des réformes engagées au cours du quinquennat. Nous partons de 1,1 % en 2011 pour arriver à 1,6 % en 2017. Ces hypothèses se fondent évidemment sur un agenda de croissance. Le sentiment général chez les acteurs économiques que je suis amené à rencontrer, tant à l'étranger que dans notre pays, est que l'Europe est en train de sortir de la crise, mais cela ne se traduira par des investissements supplémentaires, des créations d'emplois et une hausse de la croissance qu'avec un certain décalage. Le retour de la stabilité dans la zone euro et les réformes que celle-ci engage sont un facteur de croissance important.
Au plan national, nous entendons soutenir la demande afin d'accélérer la croissance effective et de combler son retard par rapport à la croissance potentielle. Les mesures que nous envisageons à moyen terme portent sur la politique de l'emploi, sur une politique fiscale plus neutre, plus stable, plus favorable aux PME et à l'innovation et qui préserve l'investissement, et le financement de l'économie. Nous ne manquons pas d'épargne en France, mais l'orientation de celle-ci vers l'investissement productif fait défaut. Les réformes structurelles que nous allons mener, notamment dans les secteurs du logement et des transports, doivent favoriser l'investissement et la productivité des entreprises qui contribuent à la hausse de la croissance effective et potentielle. C'est en tout cas le schéma sur lequel est construite cette prévision.
En ce qui concerne la compétitivité, je n'aurai pas la cruauté de rappeler que la TVA sociale, que nous avons supprimée, avait été proposée en 2007. Rien n'a été fait pendant cinq ans. C'est donc une mesure assez factice que vous avez prise en février, puisqu'elle ne devait entrer en vigueur qu'en octobre, après les élections présidentielles. Laissez-nous donc un peu de temps ! En outre, la compétitivité de la France s'est dégradée ces dix dernières années, qu'il s'agisse de la compétitivité prix ou de la compétitivité hors prix. Nous aborderons cette question sans tabou, dans la foulée du rapport Gallois et à la lumière des travaux du Haut conseil sur le financement de la protection sociale. Nous adopterons une approche globale de la compétitivité, dont j'ai esquissé la définition dans l'agenda de croissance. J'ajoute que les mesures du PLF ne sont pas anti-compétitives, puisqu'elles viennent soutenir la croissance, préserver les entreprises les plus vulnérables et celles dont la compétitivité et les capacités d'investissement sont les plus contraintes, à savoir les PME. Comme vous l'a dit Jérôme Cahuzac, celles qui sont davantage sollicitées sur le plan fiscal sont celles dont les capacités d'investissement ne seront pas atteintes par les efforts que nous demandons. Enfin, nous favorisons la recherche, le développement et l'innovation à travers l'extension du crédit impôt recherche.
Vous commettez une erreur, monsieur de Courson, en pensant que la mesure sur la déductibilité des charges financières contrariera le cycle. Elle ne présente pas le même inconvénient que le système allemand, qui instaure un plafonnement par rapport à l'excédent brut d'exploitation – EBE – et est donc pro-cyclique – lorsque les entreprises vont mal et que leur EBE baisse, leurs charges d'intérêts s'envolent. Ce n'est pas davantage une mesure anti-investissement : il ne me semble pas que l'on puisse dire que les pays qui pratiquent la limitation de la déductibilité – je pense par exemple à l'Allemagne – souffrent d'un déficit d'investissement et de compétitivité. Les groupes internationaux seront sans doute moins incités à localiser leur dette en France pour financer des opérations financières à l'étranger. L'optimisation internationale sera donc rendue plus difficile, mais je ne suis pas certain que cela constitue une vraie difficulté. La franchise de 3 millions d'euros de charges financières nettes devrait en outre mettre la quasi-totalité des PME à l'abri. J'ai eu l'occasion de m'en entretenir avec M. Roubaud, président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises – CGPME –, qui a bien compris le sens de cette politique.