Intervention de Sébastien Denaja

Réunion du 11 juin 2013 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Denaja, rapporteur pour avis :

S'agissant de la création d'un fichier positif, je tiens à rappeler que la commission des Lois ne s'est saisie que des deux premiers articles du projet de loi, ceux relatifs à l'action de groupe. De plus, la rédaction actuelle du texte gouvernemental ne prévoit pas la création d'un tel fichier, même si chacun sait que le Gouvernement déposera probablement un amendement en ce sens. Ce dispositif, dont l'instauration est éminemment souhaitable pour s'attaquer au problème dramatique du surendettement qui touche des millions de nos concitoyens, exige parallèlement de prendre aussi toutes mesures de protection des libertés. En effet, constituer un fichier de plusieurs millions de personnes ne va pas sans soulever des difficultés, notamment d'ordre technique, qui appellent des précautions extrêmes. Je suis certain qu'après avoir demandé l'avis de la Commission nationale consultative des droits de l'homme et celui du Conseil d'État, le Gouvernement sera en mesure de proposer un dispositif satisfaisant à tous égards que, je n'en doute pas, la majorité soutiendra.

Je me suis moi-même longtemps demandé s'il fallait réserver l'action de groupe aux associations de consommateurs agréées nationales ou s'il ne fallait pas l'élargir notamment à des associations ad hoc. Les associations actuellement agréées ayant un large spectre d'actions potentielles, les consommateurs sont assurés de les voir défendre leurs intérêts. De plus, ces associations offrent des garanties non seulement de sérieux, mais aussi en matière d'indemnisation au stade final de la procédure. Certains craignent que, ne pouvant matériellement engager toutes les actions de groupe souhaitables, elles ne mettent en place des « politiques » – telle année, tel secteur, etc. –, en laissant les consommateurs au bord du chemin. Ce risque me semble très faible compte tenu du nombre d'associations agréées existantes, lequel n'est d'ailleurs pas figé puisque d'autres associations pourront bénéficier de l'agrément. De surcroît, cette loi présentant un caractère un peu expérimental, son évaluation pourra être l'occasion d'en réaliser un bilan.

J'ajoute que l'actuelle limitation aux associations agréées constitue un choix politique résultant d'un équilibre obtenu notamment au sein du Conseil national de la consommation. Nous tenons à respecter l'esprit de cette concertation, car c'est l'une des conditions de l'acceptation et de la réussite du dispositif. En effet, c'est bien parce que les gouvernements successifs n'ont pas su trouver le consensus nécessaire qu'il n'a pas été possible, en trente ans, d'instaurer un tel dispositif.

Le lobbying intense auquel nous avons pu assister jusque dans ces murs et les propos tenus par certains représentants du patronat montrent bien que ce n'est pas une action de groupe « au petit pied », monsieur Houillon ! Au contraire, grâce à ce texte, c'est un grand pas qui va être fait !

L'action de groupe doit en effet être la plus dissuasive possible, monsieur Clément, et représenter une véritable menace, sans pour autant être un élément de déstabilisation de notre économie. Elle doit jouer un rôle de prévention en incitant les entreprises à s'auto-discipliner. C'est ainsi que nous parviendrons à assainir l'économie de marché.

Enfin, le texte vise à dépasser la logique binaire entre opt-in et opt-out, même si la procédure relève plutôt de l'opt-in : au final, c'est bien au consommateur de se manifester pour adhérer au groupe. Il est également vrai que la phase initiale comporte une sorte d'opt-out virtuel.

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