Ce projet de loi illustre la détermination du Gouvernement à lutter contre la fraude fiscale. Il s'agit d'un enjeu considérable : en 2012, les redressements fiscaux ont atteint 18 milliards d'euros, soit – comme le ministre de l'Économie et des finances l'a rappelé la semaine dernière – presque le montant du crédit d'impôt compétitivité emploi.
À l'échelle internationale, la nécessité de la lutte contre la fraude fiscale fait également l'objet d'une prise de conscience. Longtemps tolérée, l'opacité financière apparaît désormais comme une manière de faciliter la prédation de ressources qui manquent cruellement aux finances publiques de tous les pays. Profitant de ce contexte, la France – soutenue par ses partenaires – a pris la tête d'une mobilisation européenne.
L'Assemblée nationale s'est elle aussi saisie du problème ; deux missions d'information de la commission des Finances travaillent actuellement sur ces sujets. L'une – à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir –, consacrée à la fraude fiscale des personnes physiques, est présidée par Gilles Carrez ; Christian Eckert en est le rapporteur. L'autre – dont le rapporteur est Pierre-Alain Muet et le président Éric Woerth – se penche sur l'optimisation fiscale des entreprises. Ces deux missions d'information rendront bientôt leurs conclusions.
Quelques mots sur les quatre articles dont notre Commission est saisie pour avis. L'article 2 étend le champ de compétence de la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale – BNRDF – au blanchiment de la fraude fiscale complexe. Notre Commission étant à l'origine de la création de la BNRDF, cet article devrait recueillir une large approbation.
L'article 3 définit comme circonstances aggravantes le fait de commettre une fraude fiscale en bande organisée, le recours à des comptes bancaires ou à des entités détenus à l'étranger – quel que soit l'État concerné –, les domiciliations fictives ou artificielles à l'étranger et les manoeuvres telles que la falsification ou l'interposition d'entités fictives ou artificielles. Il prévoit ainsi de sanctionner plus sévèrement la fraude commise à l'aide de procédés qui la rendent plus difficilement détectable par les services de l'administration fiscale.
Dans les cas de fraude fiscale aggravée, l'article octroie également aux enquêteurs le bénéfice des « techniques spéciales d'enquête » : la surveillance, l'infiltration, la garde à vue de quatre jours, la sonorisation et la fixation d'images de certains lieux et véhicules, les captations des données informatiques et les saisies conservatoires, à l'exclusion des perquisitions de nuit.
L'article 10 sécurise l'action des services de l'administration fiscale en leur permettant – hors le cas des procédures de visite domiciliaire – de recourir aux preuves illicites si celles-ci ont été régulièrement portées à sa connaissance par une autorité judiciaire ou dans le cadre d'une assistance administrative internationale.
Enfin, l'article 11 renforce les moyens de l'administration fiscale en matière de recouvrement des créances publiques, notamment fiscales. Elle pourra ainsi saisir les droits rachetables de la part en euros d'un contrat d'assurance-vie souscrit par un redevable.