L'Union européenne, fidèle à sa politique ultralibérale, incite les États comme le nôtre à ouvrir leur marché du travail. Pour compenser un euro trop fort et la concurrence intenable des pays émergents sans faire jouer le protectionnisme, il n'y a rien de mieux qu'une délocalisation à domicile, donc d'une importation de main-d'oeuvre bon marché !
Le rapport souligne, ensuite, le peu d'effectivité de la règle de l'opposabilité du marché de l'emploi qui oblige les employeurs à pourvoir, en priorité, les postes ouverts avec des demandeurs déjà inscrits sur le territoire. C'est une mesure logique et de bon sens que des dérogations, malheureusement extrêmement nombreuses, rendent, dans les faits, assez peu effective. En effet, il existe une liste des métiers dits « sous tension », qui n'ont, en soi, pas grand sens, et des accords bilatéraux dérogatoires entre la France et des pays, essentiellement africains. De plus, de nombreuses associations de salariés nous ont rapporté qu'une fois les visas accordés, la rémunération des travailleurs étrangers en France était souvent inférieure à celle de leurs homologues français, et ce en dépit de l'obligation légale. Vous le savez, la loi imposant un recrutement avec un salaire équivalent au marché du travail français est rarement scrupuleusement respectée par les services préfectoraux de délivrance des autorisations de travail. Le plus souvent, ils connaissent mal les salaires réels du marché dans les différents secteurs d'activité et ils se contentent, dans le meilleur des cas, de vérifier simplement le respect des minima conventionnels.
Parmi les pistes de réflexion, je citerai la renégociation de la liste des marchés en tension, la remise à plat des accords bilatéraux et le maintien des professions interdites aux non-nationaux ou non-communautaires. Il faut également mettre en place un mécanisme afin de supprimer la concurrence déloyale des entreprises de service étrangères qui détachent sur le territoire national des salariés employés aux normes sociales et aux salaires de leurs pays d'origine. Il convient, enfin, de donner la priorité à la lutte contre le travail clandestin et l'immigration irrégulière, faute de quoi les leviers de la politique sur l'immigration professionnelle seront évidemment totalement biaisés.
L'immigration étudiante, dont nous nous accordons à reconnaître qu'elle est tout à fait souhaitable en soi, participe du rayonnement de la France et forme les jeunes des pays en développement. Néanmoins, il ne faut pas vider les pays source de leurs cerveaux et cette filière ne doit pas devenir une filière bis d'immigration pérenne. Vous regrettez que notre pays n'accueille que peu d'étudiants chinois. S'il est vrai que les lourdeurs administratives sont une réalité, il conviendrait que vous vous attardiez sur le classement et les qualités de nos universités, éléments déterminants.
Pour redonner toute sa dimension à une politique d'immigration étudiante, il est nécessaire d'instaurer un contrôle du niveau de français et un examen de la cohérence du projet d'étude en amont de la délivrance du visa ; de privilégier une politique d'accueil qualitative afin d'attirer les meilleurs dans les secteurs stratégiques plutôt que de faire du chiffre et de remplir des filières telles que la sociologie et l'histoire, qui n'apportent pas de réelle plus-value sur notre marché du travail ; de mettre en place une durée maximum d'études par cursus et de limiter les redoublements. Il conviendrait également de développer des bourses au mérite, par exemple sur le modèle de la fondation Odon Vallet avec les ingénieurs d'Asie du Sud-Est.
Je vois que j'ai largement dépassé mon temps de parole, je vais donc conclure. Je vous incite, car ce serait peut-être plus intéressant, à vous occuper de vos concitoyens au lieu de satisfaire aux exigences du MEDEF !