Madame la ministre, je vous remercie de votre exposé liminaire qui témoigne de votre connaissance fine de la situation des immigrés âgés, en particulier de ceux encore présents dans les foyers de travailleurs migrants. Vous avez évoqué la quasi-totalité des sujets qui nous ont préoccupés dans le cadre de cette Mission. Je souhaite néanmoins revenir sur un certain nombre de questions cruciales pour nous au regard de la problématique du logement.
D'abord, sur les sept cents foyers de travailleurs migrants que compte notre pays, environ 50 % ont été soit reconstruits, soit réhabilités au titre du plan de traitement des foyers. Néanmoins, si l'on additionne le nombre de foyers qui n'ont pas encore été traités par le plan et ceux qui n'en ont jamais fait partie, ce sont environ trois cent quarante foyers qui sont aujourd'hui en mauvais état, puisqu'ils ont été construits dans les années soixante-dix à quatre-vingt et n'ont malheureusement pas bénéficié des travaux nécessaires.
Depuis 1997, Action Logement a participé au financement du plan de traitement à hauteur de 37 %. Suivent l'État à 23 % et les collectivités territoriales à 10 %. Cette répartition de l'effort financier vous semble-t-elle pérenne ? La poursuite du plan de traitement rend-elle nécessaire de repenser la répartition de son financement, voire de mobiliser des fonds nouveaux, comme nous l'a suggéré le directeur général d'Adoma ? En effet, dans le cadre de la répartition capitalistique de cette société, un pacte d'actionnaires est en cours de renégociation, et M. Bruno Arbouet nous a soumis l'idée de faire bénéficier cette dernière de crédits supplémentaires, condition indispensable selon lui à l'accélération du plan de traitement des foyers. Cette piste sera probablement reprise dans les préconisations de notre rapport.
Un grand nombre de communes ne considèrent pas les travailleurs migrants vivant dans les foyers comme des résidents à part entière, en raison de l'extraterritorialité liée à l'implantation et à l'histoire de ces foyers. Ce faisant, elles refusent de leur accorder l'accès à un logement social – auquel ils ont pourtant droit – au motif qu'elles n'ont pas à assumer, en plus de l'accueil dans les foyers, leur relogement dans un parc social, souvent géré par des bailleurs municipaux. Par conséquent, les immigrés âgés sont victimes d'une discrimination, alors que certains d'entre eux souhaiteraient bénéficier d'un logement social de droit commun pour des raisons de vie privée, de regroupement familial ou tout simplement parce qu'ils en ont les moyens.
La transformation des foyers en résidence sociale est indispensable car elle permet une adaptation du bâti et du mobilier au vieillissement des résidents. Néanmoins, cette adaptation entraînera une augmentation des redevances et donc du « reste à charge » de ces personnes dont la modicité des pensions de retraite a été soulignée. Avez-vous des pistes à nous proposer pour remédier à cette situation ?
Il est relativement aisé de disposer d'informations sur les résidents des foyers de travailleurs migrants par l'intermédiaire des bailleurs, au premier rang desquels Adoma. En revanche, comme nous l'ont confirmé des historiens et des sociologues, il est beaucoup plus compliqué d'en obtenir sur les immigrés âgés vivant en habitat diffus, en raison du manque d'études et de recherches sur leur situation économique et sociale. Certes, tous ne subissent pas des conditions de logement précaires ou difficiles, mais beaucoup se sont réfugiés dans de l'habitat privé, souvent indigne. Comment évaluer les besoins de ces personnes isolées vivant dans des logements privés et des quartiers anciens dégradés ?
Enfin, comment faire en sorte que les programmes locaux de l'habitat (PLH) prennent systématiquement en compte la situation des personnes immigrées vieillissantes ? Certaines communes le font déjà, d'autres n'en tiennent pas compte, ce sujet étant laissé à la libre appréciation des collectivités locales. D'ailleurs, certains conseils généraux n'ont pas inscrit dans leur schéma gérontologique cette préoccupation.