Intervention de Elisabeth Moiron-Braud

Réunion du 12 juin 2013 à 14h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Elisabeth Moiron-Braud :

Non, je n'ai de données qu'au niveau de l'Union européenne. Les femmes représentent 60 % des victimes, les mineurs 27 %.

Je vous adresserai davantage d'informations sur les chiffres disponibles. En ce qui concerne les mineurs, le nombre de victimes de la traite est en progression extrêmement forte et pour la majorité d'entre elles, elles sont contraintes à commettre un délit, par exemple les vols, notamment dans le métro. En 2010, un réseau de traite d'enfants avait été démantelé : il s'agissait de jeunes filles de Bosnie-Herzégovine qui étaient exploitées afin de voler dans la région parisienne, certaines auraient été également sexuellement exploitées à partir de 15 ans. En France, la majorité des mineurs se retrouve dans les catégories mendicité, délit et un peu dans le travail forcé. Pour l'exploitation par le travail, il semblerait qu'il y ait plus d'hommes que de femmes. Les femmes sont en majorité concernées par l'exploitation sexuelle et la servitude domestique.

Actuellement, un phénomène préoccupant se manifeste: l'exploitation sexuelle se pratique beaucoup à l'intérieur, c'est-à-dire dans des lieux fermés, dans des salons de massages notamment avec beaucoup de victimes chinoises. Ces circonstances rendent les modalités de l'enquête beaucoup difficile, le travail de démantèlement de ces réseaux très cachés est complexe et les associations ont un travail d'accès plus difficile aussi pour entrer en contact avec ces victimes.

Je reviendrai sur les objectifs de la MIPROF. La mission doit jouer un rôle de coordination et contribuer à mettre en place une stratégie nationale pour la lutte contre la traite des êtres humains, stratégie nécessitant une mobilisation interministérielle et un partenariat actif avec les acteurs associatifs et territoriaux.

La France a souscrit toutes les grandes conventions ou directives au niveau européen ou international, et nous avons transposé dans notre législation le protocole de Palerme du 15 novembre 2000 et la directive européenne du 29 avril 2004 du Conseil de l'Union européenne. Elle a également ratifié le 9 janvier 2008 la convention du Conseil de l'Europe dite convention de Varsovie, entrée en vigueur en France le 1er mai 2008. Cette convention a trois objectifs à travers l'expression des « trois P » : protéger les victimes, prévenir et punir les auteurs, on tendrait aujourd'hui à ajouter le partenariat. Enfin la directive du 5 avril 2011 de l'Union européenne sur la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène va bientôt être transposée dans notre droit interne.

Je voudrais rappeler que la mise en place d'une instance de coordination nationale était une obligation de la Convention de Varsovie. La France a mis beaucoup de temps à y répondre. L'instance de coordination a donc été mise en place, selon les préconisations de la convention de Varsovie, qui soulignait que la traite des êtres humains est une forme de criminalité organisée transnationale pour laquelle la coordination est essentielle : chaque État membre doit absolument mettre en place une stratégie nationale pour lutter contre ce phénomène. C'est ce que nous avons l'intention de faire.

Pour cela, nous procèderons d'abord à la révision du projet de plan d'action national qui avait été élaboré entre 2008 et 2010 par un groupe de travail piloté par le ministère de la Justice et le ministère de l'Intérieur, et composé de représentants des ministères concernés et d'associations spécialisées. Ce groupe a travaillé pendant deux ans, et a élaboré en 2010 un projet de plan, certainement perfectible mais qui avait fait l'objet d'un consensus. Ce plan n'a pas connu de traduction concrète, il n'a jamais été vraiment examiné, aucune réunion interministérielle n'a été convoquée.

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