Intervention de Alfred Rosales

Réunion du 5 juin 2013 à 11h00
Commission d'enquête chargée d'investiguer sur la situation de la sidérurgie et de la métallurgie françaises et européennes dans la crise économique et financière et sur les conditions de leur sauvegarde et de leur développement

Alfred Rosales, président de Rosamon group :

En ce moment, les grands groupes d'aluminium envisagent d'importants projets en Australie, où l'on offre aux industriels une visibilité sur vingt ans en termes de contrat d'énergie. En matière d'électricité, la France ne le fait pas. Or la capacité d'investissement d'un groupe senior dépend de sa visibilité à long terme, c'est-à-dire au-delà de dix ans.

La structure du prix du marché est un second débat. Il existe actuellement, à côté du marché libre, qui manque de visibilité, un marché qu'on pourrait appeler privé. À la suite d'un décret paru en 2005, les industries électro-intensives, consommant plus de deux kilowattheures pour un euro de valeur ajoutée, ont pu intégrer le consortium Exeltium. ArcelorMittal ou Alcan répondaient à ce critère assez politique, imposé par les lobbyistes des grands groupes, tandis que les sites industriels et métallurgiques d'Eramet, qui consommaient plus d'un térawattheure consolidé, sont restés à l'écart, pour la seule raison qu'en 2005, on avait gardé pour référence les chiffres de 2004. À l'époque, j'avais vigoureusement défendu les « petits électro-intensifs », dont le ratio était inférieur à deux. Les exclus ont fini par acheter l'énergie au prix du marché. Quant aux potentiels nouveaux entrants, qui auraient pu produire de l'acier dans des fours électriques plus performants, ils ont été éliminés d'entrée, ce qui explique l'absence de moyenne métallurgie en France. Sur notre territoire, il n'y a pas d'intermédiaire entre les petites fonderies ou les fours électriques de faible puissance, et les grands électro-intensifs.

Perçue à l'origine comme très positive, la création d'Exeltium a réuni en fait une cinquantaine d'acteurs dans un club privé, qui n'en compte plus que vingt. Comilog Dunkerque (Eramet) est le seul petit électro-intensif qui ait accepté d'entrer dans le jeu des grands. Cet exemple nous interroge non seulement sur le niveau mais sur la structure du prix du marché en France.

Dernier point : on parle beaucoup du smart grid, qui vise à optimiser la consommation d'électricité en contrepartie d'avantages économiques substantiels. Pourquoi ne pas y inclure ce qu'on pourrait appeler le smart industry, c'est-à-dire un dispositif générant des économies, moyennant un accord de quelques millions ou dizaines de millions d'euros par sites ? Je regrette que le smart grid ne concerne que les grands opérateurs électriques, les opérateurs de réseau et les grands électro-intensifs, qui savent lire un contrat électrique et comprennent ce qu'est un effacement ou une interruption. N'oublions pas qu'historiquement, c'est la présence de l'industrie dans la vallée de la Maurienne qui a présidé à la naissance d'EDF, ce qui prouve que la dualité entre l'énergie et l'industrie est déterminante.

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