Intervention de Laurence Abeille

Réunion du 19 juin 2013 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Abeille :

Le titre de votre rapport – « La biomasse au service du développement durable » – revêt à mon sens une importance toute particulière : il ne s'agit pas de mesurer la compatibilité du développement de la biomasse et du développement durable, mais bien de mettre l'un au service de l'autre.

Ce rapport pose bien des questions, identifie des technologies et évalue les conséquences de leur déploiement sur notre territoire : il s'agit d'un gisement de pistes de réflexion fort riche et fort utile.

La question du bilan carbone de la biomasse, mais aussi de son bilan écologique global, dès lors que l'on prend en compte son impact sur la biodiversité et sur les ressources forestières et agricoles, reste posée. De nombreux rapports et avis d'agences publiques citent la biomasse comme l'exemple même de la fausse bonne idée pour réduire notre empreinte carbone. Je pense également au rapport de Greenpeace en 2011, qui allait jusqu'à parler de « bio-mascarade ». Le comité scientifique de l'Agence européenne de l'environnement affirmait la même année « qu'une législation qui encourage le remplacement des carburants fossiles par des carburants d'origine agricole sans prendre en compte la source de la biomasse pourrait avoir pour résultat d'augmenter les émissions de carbone, accélérant ainsi le réchauffement climatique ». Avez-vous donc évalué l'impact de la biomasse sur le climat et sur l'évolution des forêts ?

Ceci dit, s'agissant du bois-énergie, lorsque la filière alimente localement des unités de production avec des résidus de coupes locales pour produire de la chaleur en co-génération, l'impact environnemental peut être positif. Mais si cette même filière se transforme en mode de combustion à grande échelle des forêts, il en va tout autrement, en raison du carbone libéré, même s'il serait, semble-t-il, recapté par la pousse de nouveaux arbres. Mais ce processus peut prendre entre 40 et 50 ans : que se passe-t-il pendant ce laps de temps ? Peut-on de plus remplir nos objectifs de réduction des gaz à effet de serre (GES) si l'on prend en compte ce déficit carbone ?

Quid par ailleurs du bilan carbone des agro-carburants, dès lors que sont prises en compte la concurrence sur les terres agricoles et l'utilisation des engrais azotés ? De celui de la méthanisation, si l'on considère les fuites de méthane, qui est un GES vingt et une fois plus nocif de ce point de vue que le CO2, au sein des installations ?

Il faut produire grâce à la biomasse de l'énergie, mais également rester dans la sobriété, le raisonnable, la proximité : ce n'est qu'à cette condition que la biomasse pourra trouver toute sa place dans notre mix énergétique. Il nous faut imaginer sur nos territoires des économies circulaires en matière de production et de distribution d'énergie, avec des ressources locales, mais sans les piller et sans alourdir le bilan carbone.

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