Intervention de Laurence Dumont

Réunion du 18 juin 2013 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Dumont :

Mon seul point d'accord avec M. Guy Geoffroy sera pour déplorer la simultanéité des travaux de la mission sur le statut de l'élu avec ceux de notre Commission.

Les parlementaires déclarent souvent, lors des campagnes électorales, que la classe politique doit comporter davantage de femmes, de jeunes, de salariés du privé et de Français dont la famille est issue de l'immigration ; de nombreux citoyens demandent depuis plusieurs années la fin du cumul des mandats. Plus de 70 % des militants socialistes se sont prononcés en faveur de la limitation des mandats. De nombreux constitutionnalistes et politologues le préconisent également, car ce cumul constitue chez nous un « sport national ».

Le temps de l'action est venu et je suis ravie que cette promesse du président de la République ait été transcrite dans deux projets de loi ; je comprends d'ailleurs mal, monsieur Geoffroy, que des engagements de campagne soient qualifiés de dogmes et que l'on puisse regretter qu'on les mette en oeuvre.

Bien qu'ils aient d'autres priorités – le pouvoir d'achat et l'emploi, notamment –, les Français plébiscitent cette mesure. À l'heure où l'on parle de transparence de la vie publique, il est du devoir des élus de réconcilier les citoyens avec la politique. Ce texte y contribuera, comme y avait réussi la loi du 5 avril 2000, voulue et votée par les socialistes. Ce sont souvent eux qui ont fait avancer la démocratie et la parité dans notre système institutionnel, et nous avions d'ailleurs déposé une proposition de loi au cours de la précédente législature pour poursuivre ce mouvement, mais le Gouvernement de l'époque l'avait rejetée. Monsieur le ministre, ayons le courage de nos valeurs, de l'intérêt général et franchissons cette nouvelle étape de la limitation du cumul.

Le texte a le mérite d'être clair, simple, précis, et il doit conserver ces qualités. L'article 1er interdit à tous les parlementaires de cumuler leur mandat avec une fonction exécutive locale, y compris celles exercées dans les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, ainsi que celles de maire, de président de collectivité territoriale, d'adjoint et de vice-président. Ce périmètre doit rester inchangé. Les sénateurs, comme les députés, représentent la Nation et non les territoires au sein desquels ils sont élus ; à ce titre, la limitation du cumul doit leur être appliquée, ainsi qu'aux parlementaires européens. Les membres du Parlement ont pour mission de voter la loi et de contrôler le Gouvernement, et ils doivent pouvoir exercer ces compétences sans conflit d'intérêts avec un mandat local. Un député-maire ne cesse de songer, dans son travail de législateur, aux conséquences de la loi sur les citoyens qui l'ont élu : c'est cette confusion qu'il faut éliminer, car, comme le dispose la Constitution, la loi est l'expression de l'intérêt général et non la somme d'intérêts particuliers. En outre, un député qui ne possède pas de mandat local n'est pas « hors sol », contrairement à ce que l'on entend souvent ; il se trouve même plus souvent sur le terrain.

Le texte prévoit une application du nouveau système à partir de 2017, et les citoyens peuvent éprouver quelques difficultés à comprendre la nécessité de ce délai de quatre ans entre le vote de la loi et sa mise en oeuvre : si le Parlement devait conserver cette date, il nous faudrait déployer beaucoup de pédagogie pour la justifier ; il me semble de même, à titre personnel, que devient indéfendable le mécanisme – prévu à l'article 3 du projet de loi organique – de remplacement d'office du parlementaire dont le siège devient vacant par son suppléant.

Monsieur le ministre, vous avez qualifié cette réforme de palier ; il faudra en effet en franchir d'autres, notamment sur le cumul des mandats locaux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion