Intervention de Bernard Roman

Réunion du 18 juin 2013 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Roman :

Lorsqu'on abordait avec lui la question du cumul des mandats, Guy Carcassonne évoquait volontiers une conversation entre le général de Gaulle et Michel Debré au cours de laquelle ce dernier – qui rédigeait la Constitution de la Ve République – demandait s'il fallait introduire dans la loi fondamentale des dispositions limitant le cumul des mandats pour les parlementaires. Interrogé sur les conséquences d'une telle limitation, Michel Debré répondit que les parlementaires seraient davantage présents dans leur assemblée : le général de Gaulle décida de maintenir le cumul. Souhaitons-nous des parlementaires qui se consacrent pleinement à leurs fonctions ou acceptons-nous que la France continue de constituer une exception au sein des démocraties ?

La première loi sur la limitation du cumul des mandats date de 1985 : un consensus entre la majorité et l'opposition avait conduit à une adoption très large du texte que défendait Pierre Joxe et à une absence de saisine du Conseil constitutionnel. De ce fait, la notion d'exécutif local ne fut pas définie, alors que la loi intégrait sous ce terme les exécutifs au sens du code général des collectivités territoriales – les présidents et les maires, mais aussi les adjoints et les vice-présidents à partir d'un certain seuil de responsabilité. Vous élargissez, monsieur le ministre, la conception de l'exécutif local aux adjoints et aux vice-présidents. La question a-t-elle été examinée par le Conseil d'État ? Les vice-présidents et les adjoints sont élus par leur assemblée, mais ils ne détiennent leur pouvoir que par des décisions discrétionnaires des exécutifs – au sens du code général des collectivités territoriales. Il se peut très bien qu'un adjoint aux finances d'une grande collectivité choisisse cette fonction au détriment du mandat de parlementaire et que le maire décide de lui retirer sa délégation dès le lendemain. Une définition plus large crée donc une situation bien différente de celle où une acception restrictive de l'exécutif local serait retenue.

Les communautés urbaines, de communes et d'agglomération sont des EPCI et non des collectivités locales, ce qui pourrait créer un risque juridique pour la loi. Le Conseil d'État s'est-il prononcé sur ce sujet ?

À l'initiative du Gouvernement de Lionel Jospin, nous avons débattu de la limitation du cumul des mandats pendant près de deux années avant l'adoption de la loi du 5 avril 2000, qui s'est principalement concentrée sur les mandats locaux plutôt que sur les mandats parlementaires. En effet, nous élaborions une loi organique relative au Sénat, qui devait, à ce titre, être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées – la jurisprudence du Conseil constitutionnel ayant depuis, paraît-il, évolué en cette matière en donnant le dernier mot à l'Assemblée nationale – et, comme la Haute Assemblée avait refusé de s'appliquer ces dispositions, nous avons voté le texte sans les mesures qui concernaient les parlementaires. Il est important de rappeler que nous avons avancé sur la limitation des mandats locaux il y a quinze ans. Mais, si, comme je le souhaite, nous votons ces projets de loi d'interdiction de cumul d'un mandat parlementaire avec l'exercice d'une fonction exécutive locale – au sens élargi de cette notion –, nous ne pourrons pas éluder la question du cumul des mandats locaux en intégrant l'acception étendue de l'exécutif local, puisque le cumul de deux exécutifs locaux – au sens strict du code général des collectivités territoriales – est interdit. À ce sujet, le cumul d'une fonction de vice-président à l'action économique dans une région et dans un département – avec l'existence de la clause de compétence générale – ne crée-t-il pas un conflit d'intérêts ?

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