Je centrerai mon intervention sur les points du texte qui concernent les trois plus grandes villes de France. Monsieur le ministre, plusieurs députés et sénateurs maires d'arrondissements de ces trois villes vous ont écrit le 10 janvier dernier, ainsi qu'à d'autres responsables nationaux. Contrairement à ces derniers, vous n'avez pas répondu à notre courrier, et j'en retire l'espoir que votre réponse sera positive.
Les maires d'arrondissement ne sont pas des maires de plein exercice ; leurs mandats sont à considérer comme des mandats simples, au sens de la commission Jospin, et c'est pourquoi nous souhaitons qu'ils soient retirés du champ du non-cumul. Un conseil d'arrondissement n'est qu'une commission administrative consultative, qui ne décide de rien ; les votes acquis lors des séances sont soumis au bon vouloir du maire de la collectivité et de son conseil municipal.
Les maires d'arrondissement ne sont pas dotés de la personnalité juridique ; ils ne peuvent pas ester en justice et leurs pouvoirs sont extrêmement limités – ils sont purement consultatifs. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Conseil constitutionnel a consenti à leur existence à l'échelle inframunicipale et n'a pas censuré la loi « Paris-Marseille-Lyon » : dans sa décision du 28 décembre 1982, il considère que les arrondissements ne sont pas des collectivités territoriales, mais des échelons inframunicipaux qui ne portent atteinte ni à l'unité communale ni à la compétence de droit commun du conseil municipal et du maire de la commune.
Leur absence d'autonomie administrative se double d'une absence d'autonomie financière, puisqu'ils n'ont pas la capacité de lever l'impôt ni celle de voter les taxes, et qu'ils ne disposent d'aucun budget propre – hormis une simple ligne budgétaire nommée « État spécial d'arrondissement », qui est gérée par la mairie centrale, dont les chapitres ne sont pas fongibles et dont les montants sont ridiculement faibles ; alors que le budget de la ville de Paris est de 8 milliards d'euros, celui de son arrondissement le plus peuplé – un quart de million d'habitants –, que je dirige, est ainsi de 10 millions d'euros.
En matière d'urbanisme, les avis rendus par le maire d'arrondissement sur les permis de construire sont purement consultatifs ; toutes les opérations sont décidées par la mairie centrale. Celle-ci décide aussi des préemptions, en informant simplement les maires d'arrondissement, de même qu'elle a toute compétence en matière de voirie, de propreté et de parcs et jardins.
Tous les personnels des mairies d'arrondissement, sans exception – sauf les membres des cabinets des maires –, relèvent de la mairie centrale. Et je pourrais continuer ainsi.
Les maires d'arrondissement ne veulent pas subir une « double peine » : ne pas être de véritables maires, mais être frappés par l'interdiction de cumul – d'autant que leur statut et leur mode de rémunération sont très inférieurs à ceux des maires de plein exercice.
Une autre option serait d'aller jusqu'au bout de la démarche, en leur attribuant des compétences plus importantes, comme la possibilité de donner des avis conformes en matière d'urbanisme, de nomination des fonctionnaires ou d'attribution des logements sociaux, en les dotant d'un budget et de moyens humains, en leur permettant de décider des politiques locales de sécurité, etc. Voilà une ambition qui eût été véritablement réformatrice – mais elle ne figure pas dans votre projet de loi, qui s'est arrêté au milieu du gué.