En effet : un pilote et non deux ! Ou alors, il faut une alliance crédible. J'en discute avec les uns et les autres.
Monsieur Mamère, je suis conscient que les enjeux climatiques peuvent créer des conflits ou des guerres. Même si le Livre blanc ne les mentionne pas explicitement, ils représentent une nouvelle menace.
Monsieur Teissier, je veux dire la vérité, qui comporte des contraintes et des sujets de satisfaction. Quand j'ai quitté Washington, deux communiqués, l'un de Chuck Hagel, l'autre de la Maison blanche, ont salué la qualité du Livre blanc français. Je ne crains pas le déclassement de certaines brigades, au contraire. Si j'avais renoncé à des missions ou à des engagements capacitaires qui me semblaient nécessaires, je me serais senti une responsabilité, mais j'ai adopté une position d'équilibre, compte tenu des contraintes budgétaires et des risques auxquels nous devons faire face.
Pour l'armée de terre, le Livre blanc prévoit plusieurs scénarios de crise : entrée en premier, entrée en coalition, crise grave nécessitant la projection de 15 000 hommes avec équipements et blindés. Nous pouvons répondre à toutes les menaces. Je ne vous apprends pas qu'une partie des 30 000 hommes mentionnés dans l'ancien Livre blanc n'existait que sur le papier. La vérité étant ma marque de fabrique, je leur préfère évidemment 22 000 hommes réels.
En cas de crise, nous disposons d'une capacité renouvelable de projection de 7 000 hommes sur deux ou trois théâtres différents, grâce au paquet des 66 000 hommes des forces opérationnelles de l'armée de terre.
Je comprends votre interrogation sur les ressources exceptionnelles, qui ne peuvent être ciblées que sur l'investissement. Il y en avait avant le Livre blanc 2013. Elles sont au rendez-vous cette année, et je n'imagine pas qu'elles ne le soient pas à l'avenir.
Je recevrai le chef de l'état-major de l'armée indienne. Les discussions, qui avancent dans les meilleures conditions, vont se poursuivre.. Il n'est pas certain que nous parviendrons rapidement à un accord, car le calendrier indien diffère du nôtre, mais nous discutons seuls avec le gouvernement indien.
Sur l'Afrique, monsieur Dufau, aucun « partage du monde » n'est envisagé ni au sein de l'OTAN ni au sein de l'Union, même si celle-ci est présente au Mali dans le cadre de la mission UTM Mali. Je veux aussi saluer la mission Atalante, sur la Corne de l'Afrique, symbole de ce qu'il faut faire au niveau européen en matière de coopération opérationnelle. Cela dit, il faut revoir notre dispositif en Afrique, non pour le réduire, mais pour le répartir différemment en améliorant sa flexibilité. Il n'est pas utile de maintenir trois sites de prépositionnement – Dakar, Djibouti et Libreville –, tandis que d'autres sont considérés comme du non-positionnement. Notre dispositif doit devenir plus cohérent et plus réactif.
Monsieur Glavany, la suppression de 24 000 postes portera sur l'environnement des forces plutôt que sur les forces elles-mêmes. Mon objectif est de limiter le plus possible la réduction des forces opérationnelles, même s'il faudra évidemment supprimer des régiments et des sites, que je n'ai pas encore identifiés. Différents scénarios sont à l'étude. Les restructurations à venir seront toutefois moins importantes que celles qui sont déjà intervenues.
Monsieur Chauveau, je n'ai évoqué la défense antimissiles ni avec Chuck Hagel ni à la Maison blanche. D'autres sujets nous ont davantage occupés, comme la Syrie, la Libye, le Mali ou la question des drones.
La formation militaire serait un bon sujet d'intervention pour l'Union européenne, non seulement au Mali mais dans d'autres pays.
Nos relations avec l'Allemagne, qui prépare ses élections législatives, sont assez calmes, mais j'avance avec mon homologue Thomas de Maizière sur différents sujets, notamment sur les satellites. Lui aussi s'interroge sur les drones. Nous nous reverrons bientôt à ce sujet.
Je suis très attaché au lien entre l'armée et la nation, même si le Livre blanc ne prévoit pas de relancer le service national. Quoi qu'il en soit, jamais l'image de nos armées n'a été aussi forte dans l'opinion publique. Le resserrement du lien entre l'armée et la nation passera par un renforcement des réserves, que mentionne le Livre blanc, par la mobilisation d'expertises dans les réserves, par la valorisation des journées de défense citoyenne, par une bonne articulation avec les entreprises de défense, par un partenariat entre l'industrie, le ministère de la défense et les régions – j'ai signé plusieurs accords de ce type –, ainsi que par des commémorations. Je serai très vigilant à cet égard.
Je veillerai aussi sur l'ensemble de la panoplie capacitaire, même si des acquisitions entraîneront peut-être le lissage de capacités dont nous avons peut-être moins besoin en ce moment. Il n'y aura aucune rupture de process dans les industries de défense. Quoi qu'il en soit, nos ravitailleurs MRTT ayant près de cinquante ans, ce qui est d'autant plus gênant qu'ils servent aussi à la dissuasion, il était grand temps de passer commande.
Monsieur Myard, la coopération européenne fonctionne quand on est concret, réaliste et pragmatique. Dans le cadre du traité de Lancaster House, je viens de parler à mon homologue britannique Philip Hammond pour envisager la coproduction d'un missile antinavires léger, qui sera opérationnel dans six à sept ans. Pour les drones, j'ai proposé de créer un club des utilisateurs du Reaper, pour initier certaines mutualisations et préparer la génération suivante. Les Britanniques sont aussi intéressés par ma proposition de mutualiser le ravitaillement, ce qui permet certaines économies.
Le problème de Louvois se pose depuis beaucoup plus de trois ans. Mon prédécesseur n'avait pas mesuré l'ampleur du désastre, que je juge inacceptable. J'ai été alerté sur ce point en septembre. Chaque fois que je me rends dans une unité – pratiquement une fois par semaine –, je demande où en est le paiement des soldes pour l'ensemble du régiment. De manière exceptionnelle, sous l'arbitrage du Premier ministre, j'ai mis en place un dispositif qui permet à tout soldat constatant une irrégularité déficitaire sur son bulletin de solde de bénéficier d'une compensation immédiate. J'ai aussi institué un numéro vert. En outre, j'ai évité que l'utilisation de Louvois ne soit étendue à l'armée de l'air et à la gendarmerie. Ou nous arriverons à mettre au point un logiciel à même de réparer les incohérences du système, ou nous repartirons sur des nouvelles bases. J'ai lancé des équipes sur les deux pistes. Un tel travail demande du temps, mais nous devons réussir. À terme, nous devrons également recouvrer les indus, mais nous prendrons toutes les dispositions nécessaires, y compris sur le plan fiscal, pour éviter que les personnels ne soient pénalisés par les errements de Louvois.