Intervention de élisabeth Ayrault

Réunion du 26 juin 2013 à 9h00
Commission des affaires économiques

élisabeth Ayrault :

J'affirme solennellement que je n'ai reçu aucun mandat pour faire évoluer l'actionnariat de la CNR. Cela n'entre d'ailleurs pas dans le rôle de président du directoire que le conseil de surveillance de la société a bien voulu, à l'unanimité de ses membres, me proposer, et non à l'initiative de GDF Suez. Ma mission consistera à diriger l'entreprise selon son intérêt social, sans confondre celui-ci avec celui de tel ou tel actionnaire.

Il m'appartiendra toutefois, en tant que présidente du directoire, d'entretenir un étroit dialogue avec les actionnaires de l'entreprise. Si la CNR veut aborder sereinement le renouvellement de sa concession en 2023 et se développer, notamment à l'étranger, il me faudra rechercher ce que chacun de ses trois grands actionnaires peut apporter dans ce but. C‘est ainsi que je compte trouver chez GDF Suez une expertise industrielle complémentaire de celle que détient aujourd'hui la CNR ainsi que des retours d'expérience nous assurant une certaine sécurité dans notre développement. J'attends de la Caisse des dépôts et des consignations, comme des collectivités locales, qu'elles m'apportent une connaissance approfondie des territoires et favorisent notre développement économique le long du fleuve.

Compte tenu de ma carrière de manager, je dirigerai la CNR dans la continuité du plan stratégique d'entreprise arrêté par mes prédécesseurs et, je le répète encore, sans chercher à en faire évoluer l'actionnariat.

Dans la balance des forces et des faiblesses de la CNR, je ne vois en vérité que des forces. Nous ne sommes plus en 1933 et il serait difficile de rebâtir un modèle comparable. Mais je regrette qu'on ne puisse le dupliquer dans d'autres secteurs que l'énergie tant ses vertus sont grandes, permettant notamment d'associer toutes les parties prenantes, y compris les salariés, à la création de richesses par la compagnie. Cela compta d'ailleurs beaucoup dans ma décision d'accepter la candidature que l'on me proposait.

Les difficultés éprouvées dans le développement de nouveaux outils industriels, même bien acceptés collectivement comme les énergies renouvelables, sont cependant bien réelles, particulièrement dans les domaines des éoliennes, du photovoltaïque ou des nouveaux barrages hydroélectriques, et cela partout en France. Le modèle de la CNR devrait faciliter les choses car il permet de réunir autour d'une table l'ensemble des parties prenantes. Avantage dont ne disposent évidemment pas d'autres sociétés intervenant dans les mêmes secteurs. Il permet aussi de mieux impliquer le tissu industriel.

La CNR vend aujourd'hui son électricité sur le marché, répondant pour cela, dans un contexte concurrentiel, à des appels d'offres de la part des électro-intensifs. Elle ne passe pas, hors de cette procédure transparente, de marchés de gré à gré.

L'avenir de la compagnie est lié à deux grandes questions. Comment développera-t-elle ses activités jusqu'en 2023, notamment avec les collectivités locales, pour l'implantation de sources d'énergies renouvelables le long du Rhône ?

Mais s'il apparaît prématuré de discuter du contenu de la nouvelle concession, le modèle offert par la CNR durant une période exemplaire, constituera, le moment venu, son meilleur argument de négociation avec l'État. Le futur cahier des charges devrait en tenir compte.

Les réseaux de chaleur appartiennent à la collectivité, même si leur exploitation peut être confiée à des entreprises comptant des capitaux privés. C'est ainsi que la CNR n'est pas propriétaire des barrages et des autres installations de production d'énergie qu'elle exploite : ils lui sont seulement confiés pendant une durée déterminée et donc révocable. L'entreprise doit donc constamment fournir la preuve de ses compétences en matière de maintenance et d'innovation. En 2023, elle devra remettre l'ensemble de ses installations, notamment les barrages, en parfait état de marche. Pour solliciter, dans les meilleures conditions possibles, un renouvellement de sa concession, le concessionnaire doit s'être montré irréprochable.

Comment concilier la production hydro-électrique et la navigation sur le Rhône ? Les inévitables contraintes techniques de la première n'ont pas empêché le développement de la seconde au cours des dernières années : entre 2001 et 2012, le transport fluvial a progressé de plus de 60%. La CNR étant à la fois chargée de la navigabilité du fleuve et de la production d'électricité hydraulique, elle dispose d'une vision globale facilitant la gestion des différentes contraintes.

Je crois beaucoup, dans notre cas, à la prise en compte des divers équilibres qui conditionnent la situation globale d'une entreprise en évitant de « siloter » ses activités et de jouer au contraire des synergies rendues possibles par une concession intégrale du fleuve. La CNR en remplit d'autant mieux ses trois grandes missions : la production électrique, la navigabilité, l'irrigation et l'aménagement des berges.

La CNR participe évidemment et activement au débat national sur la transition énergétique, non seulement parce qu'elle produit des énergies renouvelables mais aussi parce qu'elle a développé sa capacité à gérer des énergies dites intermittentes, associant à la fois l'éolien, le photovoltaïque et l'hydraulique, lequel intervient pour ajuster l'injection électrique dans les réseaux.

Le débat sur la transition énergétique montre qu'il nous faut encore développer en France les énergies renouvelables, dont la CNR est reconnue comme une spécialiste. Elle doit donc continuer dans cette voie.

Le renouvellement de futurs appels d'offres éventuels pour le renouvellement des concessions interviendra après la parution de votre rapport, dont je ne saurais présumer des conclusions. Le Gouvernement devra ensuite se prononcer sur vos préconisations. S'il en ressort la décision d'une ouverture à la concurrence, je souhaite que celle-ci s'opère dans des conditions équitables et que la CNR n'en soit pas écartée.

Notre développement à l'étranger reste encore modeste puisque notre entreprise avait pour mission de se concentrer sur la vallée du Rhône. Elle a pu s'en extraire un peu en produisant des énergies photovoltaïque et éolienne. Mais notre seule implantation à l'étranger porte sur un barrage en Albanie. Je voudrais donc, avant toute chose, analyser le potentiel offert par l'étranger. Si celui-ci existe, il faudra cibler nos investissements et bien étudier leurs conditions de réalisation, notamment en termes d'actionnariat.

Je ne peux non plus me hasarder aujourd'hui à des prévisions précises sur l'exploitation de l'énergie tirée des courants marins, dans laquelle la CNR aurait probablement un rôle important à tenir. Son bureau d'ingénierie intégré travaillant sur de grands projets internationaux, l'entreprise pourrait, dans le cadre de sa R & D, faire avancer les projets de captation de l'énergie marine au large de certaines de nos côtes. J'en ai la conviction et en ferais volontiers un de mes thèmes privilégiés.

La ViaRhôna mobilise en effet beaucoup les élus riverains. Oui, il y a un couloir chimique et des solutions doivent être trouvées. Dans le cadre du plan d'intérêt général pour les cinq années à venir, présenté le 5 juillet prochain, nous accomplirons tous les efforts possibles pour que le calendrier puisse être tenu. Nous ferons tout pour permettre à la ViaRhôna d'aller du lac Léman à la Méditerranée.Voilà un bel exemple de collaboration entre les collectivités locales et la CNR.

S'agissant du canal Rhin-Rhône, ou des canaux Saône-Moselle ou Saône-Rhin, je n'ai pas connaissance que de tels travaux soient envisagés pour relier l'Alsace à la Méditerranée.

Je n'ai pas d'opinion particulière sur le projet récurrent de canal de Catalogne, notamment sur ses incidences environnementales. En outre, ce n'est pas la CNR qui fut sollicitée pour le faire creuser mais la Compagnie du Bas-Rhône Languedoc.

L'amélioration de l'irrigation fait partie des activités de la CNR. Nous travaillons en collaboration avec la Chambre régionale d'agriculture pour rendre les cultures moins consommatrices d'eau.

Les quatre centrales nucléaires implantées le long du fleuve justifient de réguliers contacts entre EDF et la CNR, celle-ci devant fournir en permanence assez d'eau pour refroidir les réacteurs. Apparemment, la compagnie dispose des moyens suffisants pour remplir convenablement cette mission en cas de difficultés.

Si vous approuvez ma candidature, je prendrai mes fonctions mes fonctions début juillet et je viendrai volontiers vous apporter davantage de précisions.

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