Intervention de Guillaume Duval

Réunion du 19 juin 2013 à 17h00
Commission des affaires européennes

Guillaume Duval, économiste, rédacteur en chef d'Alternatives économiques :

Comment convaincre les Allemands et les autres pays européens de travailler avec nous afin de relancer la machine ? La transition énergétique et la conversion écologiste de nos économies me semblent en effet être les voies les plus appropriées, l'Allemagne étant beaucoup plus écologiste que nous et fondée de surcroît à penser que son industrie tirera profit d'une telle politique. Celle-ci aurait également des effets redistributifs massifs puisqu'elle concernerait au premier chef les pays méditerranéens. Je rappelle qu'avec un ensoleillement une fois et demie supérieur, la Grèce produit cinquante fois moins d'électricité photovoltaïque que l'Allemagne – c'est avec la France le pays d'Europe qui, jusqu'ici, a fait le moins d'efforts pour développer les énergies renouvelables.

Cette idée est celle de beaucoup, depuis longtemps, et pourtant elle n'avance pas. L'une des raisons en est l'attitude des responsables allemands : lorsqu'on leur propose de donner des milliards aux Grecs ou aux Espagnols pour accroître leur efficacité énergétique et pour développer les énergies renouvelables, ils vous regardent avec de grands yeux et vous demandent si vous êtes sûr qu'il s'agit là d'une bonne idée, les aides attribuées par le passé à ces deux pays n'ayant pas eu d'effets concluants.

Il est possible de contourner la difficulté en faisant valoir que le moment est propice pour créer un véritable service public européen de la transition énergétique et de la conversion écologique de nos économies, l'argent ne transitant plus par les États mais étant distribué partout en Europe par une institution ad hoc – comme le fait déjà, mais à une toute petite échelle, la Banque européenne d'investissement. Cela ne servirait pas simplement à relancer la machine économique sur le mode keynésien : l'Europe est la zone la plus anciennement industrialisée au monde, mais aussi celle qui a le moins de matières premières non renouvelables et d'énergies fossiles et, si elle n'emprunte pas cette voie, elle se condamne à mort. Il ne s'agit donc pas seulement de préserver les intérêts des générations futures ou de laisser un peu de pétrole aux pays du sud afin qu'ils se développent : chaque fois que l'économie mondiale repart, les prix des matières premières remontent et l'Europe est le continent qui en est le plus affecté, de sorte que, sans une telle politique, nous ne sortirons jamais de la crise.

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