L'histoire que je vais vous raconter est celle qui s'est écrite. Elle est donc beaucoup plus simple que celle que vous êtes en train de raconter aux Français, sous forme de balivernes, pour les années à venir.
La crise vient des États-Unis. Elle est de nature financière et prend racine dans les subprimes, un modèle spéculatif visant à faire accéder à la propriété une partie de la classe moyenne au moyen de crédits hypothécaires qui ont explosé. Crise américaine, modèle américain, banque américaine : la crise est d'abord financière. Elle a entraîné un ralentissement économique, il a donc fallu soutenir l'activité dès la première secousse.
Une deuxième a suivi, plus sérieuse et plus grave, que vous connaissez, monsieur le ministre, comme toutes ces matières auxquelles je sais que vous êtes attentif depuis de nombreuses années. Il s'agit de l'évènement que fut la faillite de Lehman Brothers. Au nom d'un aléa moral, l'administration américaine de l'époque, pour faire un exemple, a puni une banque et demandé à la banque centrale américaine de suspendre l'accès aux liquidités de Lehman Brothers. Lehman Brothers est une banque d'affaires, Lehman Brothers tombe : la récession économique est mondiale. Nous faisons jouer à l'époque les amortisseurs sociaux. La récession en France est de 2,7 %, elle est en Allemagne de 4,5 %. Elle est mondiale. Cette deuxième réplique vient des États-Unis, elle est de nature financière et résulte d'une décision de l'administration américaine ayant entraîné une interrogation globale de la part des investisseurs sur le sujet. Elle n'a rien à voir avec Nicolas Sarkozy ni son gouvernement, et pas davantage avec les choix européens de l'époque.
La crise traverse l'Atlantique et impacte très directement l'ensemble des pays partageant la même monnaie, l'euro. Pourquoi les impacte-t-elle ? Parce qu'à l'époque de la faillite de Lehman Brothers, toutes les économies avancées ont pratiqué une politique budgétaire faite de relance et de dépense publique, d'ailleurs prisée des sociaux-démocrates. Mais la relance et la dépense publique nous ont fait passer sous la ligne de flottaison, car nous étions déjà très endettés et très en déficit. Il a fallu passer à la caisse et les investisseurs ont ciblé le pays le plus fragile, la Grèce, puis testé les autres pays. Nous avons mis en place une politique qui en effet a augmenté de 20 % la dette du pays en fin de mandat. Mais il serait plus honnête de dire, cher Pierre Moscovici, que celle des États-Unis a augmenté de 29 % et il serait tout aussi honnête de rappeler par exemple que la dette globale en Grande-Bretagne a augmenté de 40 %.
Il serait honnête, en somme, de dire que sur l'ensemble de la période toutes les économies avancées ont pratiqué une politique de relance économique, c'est-à-dire de relance budgétaire visant à soutenir l'activité économique, politique qui devrait avoir toute votre attention et dont l'augmentation de la dette fut la conséquence. Je vous renvoie aux statistiques de l'OFCE et aux études de l'OCDE dans lesquelles vous trouverez la démonstration implacable que l'histoire selon laquelle Nicolas Sarkozy était à la fois à la tête de la France, de la Grèce, de la Grande-Bretagne et des États-Unis est une histoire qui ne tient pas la route du point de vue économique.