Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du 3 juillet 2013 à 21h30
Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur -interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au parlement européen — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, par touches successives, cette majorité modifie profondément les textes qui régissent les élus et les conditions d'exercice des mandats : loi Cahuzac dite « de transparence », forme modernisée de voyeurisme ; mode de scrutin aux élections municipales et départementales – le fameux scrutin binominal que le monde entier va nous envier – ; mode de scrutin aux élections sénatoriales, et peut-être d'autres encore à venir.

Nous attaquons ce soir l'examen du cumul des mandats – la fameuse proposition n° 48 du candidat Hollande –, non pour tous les élus, car cela serait trop simple, mais en stigmatisant, comme le Gouvernement a choisi de le faire, une catégorie d'entre eux : les parlementaires, qu'ils soient nationaux ou européens.

Voilà un texte dogmatique qui fait grincer les dents, y compris dans la majorité – du côté de Lyon ou ailleurs – et que la commission des lois a jugé utile de corseter encore davantage la semaine dernière. Elle fait ainsi preuve d'un aveuglement certain en élargissant le non-cumul à tous les syndicats mixtes, aux établissements publics de coopération intercommunale ainsi qu'aux organismes satellites des collectivités territoriales.

J'y vois une forme d'hypocrisie : il serait plus clair de dire que c'est le mandat unique qui est voulu. Si c'est le cas, alors banco, mais dès 2014, et sans que les suppléants puissent prendre le relais quand le parlementaire aura fait le choix du mandat local ! Et par conséquent, banco également pour que toutes les élections partielles se déroulent dans les semaines qui suivent ! Dès lors, évidemment, la stratégie commence à changer !

Oui, la législation relative au cumul des mandats mérite aujourd'hui d'être revue en raison de la nouvelle place des collectivités territoriales sous l'effet de la décentralisation et aussi des progrès de l'intercommunalité.

Prenons garde cependant aux comparaisons avec d'autres pays : ainsi que cela a été rappelé tout à l'heure, les structures étatiques et les pouvoirs étant différents, les organisations sont elles-mêmes différentes. C'est, une fois de plus, l'illustration que « comparaison n'est pas raison ».

Prenons garde également à ne pas céder aux sirènes de la démagogie des enquêtes d'opinion. En réformant « à l'aveugle », nous allons à l'encontre même de l'objectif poursuivi, à savoir l'amélioration du fonctionnement de notre démocratie.

Le lien entre le citoyen et l'élu est précieux : gardons-le ! C'est la clé d'une démocratie vivante et même vivace ! L'ancien Premier ministre Pierre Mauroy qualifiait le mandat local de « courroie d'enracinement » : ne déracinons pas nos élus, s'il vous plaît !

S'il n'apparaît plus défendable aujourd'hui de cumuler un mandat de parlementaire avec de grands exécutifs, a contrario le mandat unique aboutirait inévitablement à un affaiblissement du Parlement. Voulons-nous des apparatchiks issus des partis politiques, quels qu'ils soient, des « élus hors sol » loin de la société et des préoccupations des citoyens – citoyens auxquels ils auraient d'autant moins besoin de se frotter que le scrutin proportionnel aurait fait son oeuvre ?

Voulons-nous « fonctionnariser » les parlementaires qui, perdant leur représentativité citoyenne, perdraient leur rôle de contrepoids à l'égard du pouvoir exécutif ? Avec un Parlement affaibli car moins représentatif, c'est bien le pouvoir des citoyens, donc la démocratie qui s'en trouveraient affectés. En fait, à terme, en modifiant ainsi le Parlement, c'est toute la structure de la Ve République que vous voulez maltraiter ; or ni les dernières élections, ni les précédentes ne nous ont donné mandat en ce sens.

Par ailleurs, contrairement à ce qui est dit, aucune donnée, aucune étude sérieuse ne permet de conclure que le non-cumul entraînerait un changement significatif dans l'activité des parlementaires.

Le projet de loi organique dont nous allons débattre, aggravé par la commission des lois,…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion