Intervention de Lionel Tardy

Séance en hémicycle du 3 juillet 2013 à 21h30
Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur -interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au parlement européen — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c'est sans doute ce soir une des rares fois où il m'arrive de soutenir, à quelques réserves près, un texte du Gouvernement.

Autant je suis en profond désaccord sur de nombreux sujets, notamment sur la politique économique qui nous mène à la catastrophe, autant je suis en phase avec les textes portant sur la transparence de la vie publique et la limitation du cumul des mandats.

Depuis mon élection en 2007, je suis intervenu à de nombreuses reprises sur ce sujet, en déposant des amendements ainsi qu'une proposition de loi. Je me suis personnellement appliqué cette règle du non-cumul, alors que j'aurais très facilement pu avoir une place de conseiller général, de conseiller régional ou de maire.

Je suis satisfait de ce texte, car il va très loin, interdisant le cumul sans qu'il soit question d'un seuil de population en dessous duquel on pourrait cumuler, et visant non seulement les maires et les présidents, mais aussi les adjoints et les vice-présidents.

Je suis également satisfait de voir que ce texte de loi s'attaque au cumul de mandats et de fonctions annexes dans les syndicats intercommunaux et les établissements publics locaux. On empêche ainsi certains élus nationaux de maintenir leur emprise locale en étant simples conseillers municipaux mais délégués partout et présidents d'organismes HLM ou d'autres lieux de pouvoir. Cette règle devra également s'appliquer tôt ou tard aux élus locaux.

Le travail en commission a permis d'éliminer le problème des règles de remplacement par les suppléants. Je suis heureux d'avoir été entendu et que ce texte exclue désormais toute possibilité de céder son siège à un suppléant en cas de démission pour convenance personnelle.

Le seul point qui me dérange est la limitation du cumul dans le temps, qui pose un problème à la fois juridique et politique. Juridiquement, nous limitons de ce fait l'éligibilité de certaines personnes, ce qui porte atteinte à la règle constitutionnellement affirmée selon laquelle, sauf raisons très clairement motivées, tous les citoyens sont électeurs et éligibles, les seules exceptions à cette règle étant la privation des droits civiques par la justice – à cause d'une condamnation ou d'une mise sous tutelle – et l'âge en dessous duquel on estime que les citoyens n'ont pas la maturité suffisante pour accéder aux fonctions publiques.

Je pense que l'on doit en rester là, à moins d'ouvrir une brèche dangereuse. Aujourd'hui, on rend inéligibles les élus nationaux qui ont fait trois mandats, mais quelles limitations demain ? On ouvre une boîte de Pandore…

Politiquement, cela me gêne d'inscrire cette disposition dans la loi. C'est la preuve d'une absence de courage politique et d'éthique. Camus disait : « Quand on n'a pas de principes, il faut des règles. » C'est exactement le cas ici : nous créons une règle car nous sommes incapables d'autodiscipline.

On peut très bien traiter la question du cumul dans le temps sans l'inscrire dans la loi. Il suffit aux partis politiques de ne plus investir les élus ayant déjà fait trois mandats. On le sait tous, et cela s'est encore vérifié en 2012, même pour un scrutin uninominal l'étiquette et l'investiture pèsent lourd, et des sortants privés d'investiture ont été battus par un jeune candidat qui disposait, lui, de l'investiture officielle. Si on cesse d'investir les sortants ayant déjà accompli trois mandats, en choisissant à leur place des candidats plus jeunes et tout aussi compétents, les électeurs le comprendront et adhéreront à cette volonté de renouvellement des élus nationaux. Les partis politiques n'ont malheureusement pas ce courage d'agir à bon escient, au bon moment, avec le bon levier…

Malgré ce petit défaut, qui ne devrait d'ailleurs pas survivre au passage devant le Conseil constitutionnel, sauf à ce que le Gouvernement rectifie les choses en séance – ce à quoi, ai-je compris, il s'est engagé – ce texte me convient parfaitement. Je voterai donc pour.

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