Intervention de Edouard Philippe

Séance en hémicycle du 3 juillet 2013 à 21h30
Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur -interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au parlement européen — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEdouard Philippe :

Ce n'est pas une mince affaire que celle de ce projet de loi interdisant le cumul. La discussion générale étant bien avancée, l'heure tardive, je serai bref et je me contenterai d'évoquer trois points.

Posons-nous tout d'abord une question : fallait-il une loi ? On peut être pour ou contre l'interdiction du cumul des mandats mais on peut au moins se poser la question de la nécessité de cette loi, d'autant plus qu'une loi existe déjà. Le cumul des mandats est déjà encadré par un dispositif juridique. Fallait-il aller plus loin ? Si interdire le cumul des mandats est un impératif moral, si c'est la condition du bon exercice d'un mandat, une loi n'est pas nécessaire et chacun peut, à titre individuel, parfaitement respecter cet impératif moral. Si l'on considère qu'il est dangereux de cumuler les mandats, ne nous présentons pas.

Vous avez dressé la longue liste, monsieur le ministre, de ceux qui ont fait ce choix, ils l'ont fait sans qu'une loi soit nécessaire, sans même qu'une loi soit votée. Ils l'ont fait parce qu'ils croyaient bon de se soumettre à cette obligation qu'ils s'imposaient à eux-mêmes. Ils ont obéi à un impératif moral et tout va bien.

S'il s'agit d'un impératif pratique, s'il est nécessaire d'aller jusque là pour garantir je ne sais quoi, là non plus une loi n'est pas nécessaire. Des partis politiques se sont vigoureusement engagés contre le cumul. Ils ont diffusé une doctrine, qui a été inégalement respectée. Nous avons tout à l'heure cité un certain nombre de maires issus d'une famille politique qui s'était positionnée sur ce sujet et qui avait respecté l'engagement qu'ils avaient pris. Nous pourrions en citer beaucoup d'autres qui n'ont pas démissionné mais qui n'ont pas été désavoués par leur famille politique, à qui on a confié des responsabilités. J'entendais tout à l'heure notre collègue expliquer qu'un élu local très fortement enraciné et maire pouvait privilégier son territoire lorsqu'il était à l'Assemblée nationale. Je n'ai pas vu que le Gouvernement ait hésité longtemps à confier au maire de Caen, par ailleurs député du Calvados, la présidence de la commission Mobilité 21 alors même que son territoire était également concerné par les sujets qu'il convenait de traiter.

J'observe que chez deux éminents membres du monde politique, Martine Aubry et Alain Juppé, le choix de ne pas cumuler les mandats résulte sans doute d'un raisonnement intellectuel, probablement d'une vertu, mais on pourrait aussi considérer qu'il découle d'une nécessité, liée dans les deux cas à une défaite électorale…

En matière de cumul des mandats, il n'y a pas beaucoup de vertus mais beaucoup d'intérêts. Souvent, ceux qui n'ont qu'un mandat et n'en veulent qu'un, estiment que c'est le mieux et inversement.

Mes chers collègues, à ceux qui refusent le cumul, je dirai : « Ne vous présentez pas, rien ne vous y oblige, vous aurez la chance d'être en accord avec vos convictions sans ajouter une contrainte pour l'électeur ». L'électeur peut voter pour quelqu'un qui fait ce choix, il le fait souvent. Il est aussi légitime quand il le fait que lorsque vous choisissez de ne pas vous présenter.

Je voudrais évoquer en second lieu le sujet de l'exemple individuel pour vous prouver que, justement, il ne montre rien. Nous connaissons tous, nous avons tous autour de nous, quels que soient les bancs de cette assemblée, des exemples, à droite comme à gauche, d'élus qui ont laissé une trace, qui nous ont influencés et nous ont donné l'envie de faire de la politique. Ces élus étaient des cumulards ou non.

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