Intervention de Hervé Gaymard

Réunion du 1er juillet 2013 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Gaymard :

Avec tout le respect que nous vous devons, madame la ministre, nous sommes partagés entre la compassion, la déception et l'étonnement.

La compassion : il y a en effet bien du mérite à tenter de nous convaincre de la cohérence d'un tel magma législatif, et plus encore après l'étrillage qu'il a subi au Sénat.

La déception : nous avions cru de bonne foi aux promesses du candidat puis du président François Hollande annonçant un acte III de la décentralisation après les lois prétendument scélérates adoptées par la droite. Nous ne pouvons donc manquer d'être déçus par ce texte qui n'ouvre aucune perspective et ne clarifie en rien les compétences. Il y aurait beaucoup à faire, pourtant, pour améliorer la répartition des responsabilités entre départements et régions en matière d'éducation, de formation et d'emploi, ou pour organiser de façon cohérente ce qui relève du développement économique et ce qui relève de l'équipement numérique. Au lieu de quoi le texte propose un échenillage des compétences facultatives évoquant un inventaire à la Prévert. On se gargarise du rétablissement de la clause de compétence générale, comme si elle était gravée dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen alors que, nous le savons tous, la réalité est bien plus prosaïque.

J'en viens à ce qui nous étonne. L'actuelle majorité, qui s'était opposée à la loi de 2010 s'agissant du modèle métropolitain, le promeut aujourd'hui : qu'est-ce qui explique ce revirement ?

Le Sénat ayant rejeté les dispositions relatives au Grand Paris, le Gouvernement en a annoncé de nouvelles pour mercredi matin, ce qui risque de créer un « conflit d'intérêts » avec le président de la Commission, qui ne souhaite pas prolonger les débats au-delà de cette matinée. Comment, en effet, pourrions-nous décider d'un sujet de cette importance dans un laps de temps aussi court ?

Le système imaginé pour le Grand Lyon – lequel absorbera le conseil général ou, à tout le moins, ne le laissera plus subsister que sous une forme résiduelle – n'a fait l'objet d'aucun débat démocratique. Il a été décidé en catimini entre le président de la communauté urbaine et celui du conseil général du Rhône, sans consultation des exécutifs locaux, du président du conseil régional, M. Jean-Jack Queyranne, et encore moins des populations. En Alsace, la création d'une nouvelle collectivité – qui, en fusionnant deux conseils généraux avec le conseil régional, aurait pour le coup constitué un « choc de simplification » – avait pourtant été soumise à référendum. Vérité sur les bords du Rhin, erreur sur les rives du Rhône ? Quoi qu'il en soit, le référendum doit être proposé à tous ou à personne. Notre rôle de législateur est d'harmoniser les conditions d'exercice de la démocratie locale.

Enfin, si nous ne sommes pas fermés par principe à toute réforme territoriale, celle qui nous est soumise ne s'accompagne d'aucune étude d'impact budgétaire. Quelles seront, en cette matière, les incidences des projets métropolitains de Paris, Lyon et Marseille ? Dans la partie consacrée à la « modernisation de l'action publique territoriale », où sont évoquées les compétences des régions – dont il sera également question dans un autre texte : n'aurait-il pas été plus cohérent de les traiter toutes dans ce dernier ? –, nous ne disposons pas davantage d'éléments financiers sur les effets de la répartition des compétences facultatives.

Nous serons donc à la fois vigilants et force de proposition sur ce texte, car nous craignons qu'il ne soit une belle occasion manquée.

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