Intervention de David Habib

Séance en hémicycle du 4 juillet 2013 à 9h30
Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur -interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au parlement européen — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDavid Habib :

Deuxièmement, la fin du cumul, si elle n'est pas accompagnée d'un vaste mouvement décentralisateur, renforcera Paris et l'échelon central par rapport à la province. Je vous ai entendu évoquer hier, monsieur le ministre, avec beaucoup de fougue et de talent, ces communes administrées par des maires de qualité qui ne sont pas parlementaires. Vous avez cité Montpellier, Toulouse, Lille. Or, vous le savez, le problème ne concerne pas ces communes, mais les agglomérations et les villes moyennes qui, elles, ont besoin d'un relais avec l'échelon central et les ministères et qui l'ont aujourd'hui trouvé grâce à l'existence du député-maire. Je crains, je le répète ici, que la fin du cumul soit pour celles-ci un élément déstabilisateur.

Troisièmement, sans une vraie réforme institutionnelle, sans une modification des textes qui organisent le temps et la vie parlementaire, sans une réduction du nombre de députés, cette interdiction du cumul ne permettra pas, selon moi, un rééquilibrage des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif.

Enfin, cessons de penser que cette interdiction favorisera le renouvellement, le rajeunissement et la féminisation de notre Parlement. Comme l'a évoqué précédemment notre collègue Calmette, la réforme des scrutins départementaux que vous avez voulue et que vous nous avez soumise, monsieur le ministre, entraînera un rajeunissement et une féminisation de la vie politique. Je prendrai l'exemple de notre département des Pyrénées-Atlantiques, ce que vous n'avez pas fait, madame Capdevielle. Ce département compte 650 000 habitants, plus nombreux dans le Béarn qu'au Pays Basque. Nous ne sommes que trois à cumuler des mandats. Les Pyrénées-Atlantiques comptent vingt-sept cantons et quatre femmes conseillères générales. On peut imaginer que vingt-trois le deviendront. Il y aura alors, oui, un vrai rajeunissement, un vrai renouvellement, une vraie féminisation de la classe politique. Mais ce n'est pas la règle du non-cumul des mandats, qui concernera trois personnes sur 650 000, qui nous permettra d'atteindre cet objectif.

Après avoir exposé les raisons qui m'amènent à considérer que ce texte ne devrait pas provoquer chez nous tant d'enthousiasme, pourquoi vais-je le voter ?

Vous avez souhaité, et vous l'avez précisé hier, monsieur le ministre, que cette réforme soit équilibrée. Je vous rejoins en cela : oui, en repoussant l'application de cette réforme au renouvellement général de cette assemblée, vous avez incontestablement permis à un certain nombre de parlementaires, dont je suis, de voter ce texte avec moins d'inquiétude. Ce texte occupe de plus, à tort selon moi, une place démesurée dans le débat politique. Toutefois, renoncer à légiférer sur cette question, en dépit de tous les arguments que j'ai évoqués, c'est permettre aux démagogues et notamment au Front national, de surfer sur l'antiparlementarisme. Si interdire le cumul des mandats participe de cette reprise des consciences, alors, oui, il faut légiférer. Mme Maréchal-Le Pen a dit qu'elle soutiendrait ce texte. N'ayons aucune hésitation sur ce point. Ne pas voter ce texte, c'est ouvrir la voie à celle et ceux qui mettent en cause matin, midi et soir le parlementarisme et notre démocratie. Enfin, le Gouvernement fait face avec courage à de tels défis qu'il nous faut sur ce texte comme sur d'autres confirmer, chaque jour, notre unité et notre solidarité. Je voterai ce texte parce que je soutiens l'action du Gouvernement et que celle-ci est un tout, même si elle peut appeler les réserves que je viens d'évoquer.

Notre collègue Bernard Lesterlin nous a rappelé, hier, qu'il fallait tenir ses engagements. En 2012, j'avais indiqué à mes électeurs que j'étais opposé à l'interdiction du cumul des mandats. Mais s'ils ont voté pour moi dès le premier tour, ce n'est pas parce que j'étais favorable au cumul. Inversement, cessons de penser, chers collègues socialistes, que les Français nous ont donné une majorité parce que notre parti s'était engagé à interdire le cumul.

Parce que ce débat occupe une place démesurée, il nous faut voter le texte. Adoptons-le donc rapidement et tournons la page, afin de nous consacrer au véritable enjeu. Si l'on veut parler d'efficacité de l'action politique, si l'on veut parler du travail des élus et, en particulier, de leur fonction de contrôle, débattons de ce qui mérite de l'être, à savoir de la modernisation de l'État. Ce texte en appelle un deuxième, sur la place de l'État dans nos institutions. Nous vous demandons, en conséquence, aujourd'hui, monsieur le ministre, d'organiser une réflexion pour que nous puissions, avant la fin de cette législature, légiférer sur cette question.

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