Intervention de Nicolas Sansu

Séance en hémicycle du 3 octobre 2012 à 21h30
Ratification du traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Motion d'ajournement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Sansu :

Oui, le TSCG et son bras armé, le MES, que la gauche avait refusé de ratifier, le 21 février dernier, ne sont pas seulement des documents sur le bon usage des finances publiques, ce sont des instruments de dérégulation.

C'est le principe même de la conditionnalité des aides qui en fait non pas un mécanisme de solidarité, mais bien un outil à l'usage des néolibéraux, pour contribuer à la casse des droits sociaux et à la déréglementation du travail, pour dresser les travailleurs contre les chômeurs, pour opposer les travailleurs des différents pays entre eux, dans une compétition mortifère. Voilà la réalité !

Il n'y a pas que le Front de gauche qui l'affirme : au-delà d'économistes des différents bords dont la renommée n'est plus à faire, trois instituts indépendants, l'OFCE, l'IMK et le WIFO, ont indiqué qu'entre 2010 et 2013, les dispositifs prévus par le TSCG ou, avant lui, par le six-pack et le pacte euro-plus, devraient aboutir à réduire le PIB de la zone euro de près de sept points.

Avec ce traité, c'est l'affirmation que la rémunération du capital prime encore sur celle de travail, c'est l'interdiction dogmatique du déficit structurel et du déséquilibre budgétaire, au risque de condamner l'investissement public, moteur de la croissance, de la création de richesses et d'emplois.

Et l'annonce parue dans un journal du soir, qui tend à accréditer l'idée que la seule variable d'ajustement dans notre pays serait le coût du travail ne manque pas de nous inquiéter. Quid du coût du capital, de ce gavage des actionnaires et des banquiers ? La pensée unique a la vie dure ! C'est la victoire, n'en déplaise à celles et ceux qui voudraient croire le contraire, de Milton Friedman sur John Maynard Keynes.

Pourtant, quelle pantalonnade que ce déficit structurel ! Le Wall Street Journal, que l'on ne saurait soupçonner d'être un agent du laxisme budgétaire, ironise sur la divergence des estimations d'écart conjoncturel – c'est-à-dire la différence entre le déficit courant et le déficit structurel – rendues respectivement à propos des finances publiques états-uniennes par la Commission européenne – toujours donneuse de leçons – et le Congressional Budget Office, commission parlementaire vigie des finances publiques aux États-Unis. Là où le CBO évalue l'écart conjoncturel états-unien à 5,3 % de PIB, la Commission européenne et ses méthodes ne voient qu'un petit 0,5 %, soit une différence du simple au décuple ! Monsieur le ministre, votre réponse, tout à l'heure, sur le déficit structurel, perd un peu de son sens…

Cela amène à deux conclusions. D'abord, chacun y met ce qu'il veut ou presque ; ensuite, on voit que la Commission européenne, qui jouera un rôle décisif dans le calcul du déficit structurel, a un calcul très restrictif du déficit conjoncturel, ce qui entraînera, mécaniquement, le lancement de procédures de redressement plus nombreuses.

Mes chers collègues, le pire serait de se laisser enfermer dans ce couloir du TSCG, qui amoindrira les possibilités qu'ont les États, les Parlements nationaux, les établissements publics et les collectivités territoriales de soutenir des projets de développement.

Et si vous avez des doutes, chers amis de la majorité, il y a un moyen simple pour ne pas commettre d'impair : il suffit de regarder qui sont les plus convaincus laudateurs du texte et qui sont ceux qui souhaitent sa remise en cause.

Les plus fervents défenseurs, nous les avons ici, à notre droite. Nos collègues de l'UMP et de l'UDI font même preuve d'un enthousiasme qui devrait suffire à faire naître des doutes sur les bancs de la gauche.

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