Intervention de Christophe Bouillon

Réunion du 3 juillet 2013 à 10h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Bouillon, corapporteur :

Nous avons essayé, comme le général de Gaulle avec l'Orient, d'aborder ce sujet complexe avec quelques idées simples. (Sourires)

Les déchets radioactifs existent, quoi qu'on puisse par ailleurs porter comme jugement sur la filière nucléaire : leur traitement nous incombe. Il s'agit-là de notre responsabilité première, et je note que la représentation nationale en a pris conscience depuis de longues années maintenant. Il est faux d'affirmer que la question de la gestion des déchets vient d'être découverte. Il faut la replacer dans le contexte de la construction de la filière, avec la mise en exploitation de différents réacteurs, au long des années 1970 et 1980. La première loi de 1991 a été préparée par de longues discussions qui lui sont bien antérieures. Dans le même temps, le Commissariat à l'énergie atomique et d'autres organismes ont lancé des programmes de recherche sur la gestion des déchets, ce qui a d'ailleurs valu à la France de jouer en la matière un rôle de pionnière. Je pense notamment à la vitrification et au bitumage. Si notre pays a été très tôt en capacité de disposer d'un processus de retraitement des déchets issus du combustible usé, c'est notamment parce qu'en amont il avait lancé les programmes de recherche qui ont prouvé leur efficacité. La question des déchets a donc été inhérente au développement de cette filière.

S'agissant des déchets HA-VL, à haute activité et à vie longue, dont la décroissance s'étale parfois sur des millions d'années, je souhaite répondre aux interrogations de nos collègues sur la métaphore de la porte d'accès. À mon avis, il vaut mieux que cette porte soit la plus hermétiquement close et la plus confinée possible, bref qu'elle soit quasiment infranchissable, et qu'elle offre le maximum de barrières, plutôt qu'elle soit aisément fracturable. C'est d'ailleurs le débat qui a entouré au départ les deux options envisageables : l'entreposage en sub-surface ou l'enfouissement profond. Celui-ci, avec un maximum de confinement, dans une couche géologique offrant les caractéristiques d'une grande stabilité, sur une échelle temporelle de millions d'années, me paraît du point de vue de la sûreté plus satisfaisant que la première option en surface, qui n'offre pas des conditions optimales.

On pourrait regretter la lenteur du processus, avec ses différentes échéances : 1991, 2006, 2015, 2025... Mais le temps, comme celui que nous nous sommes donné pour notre rapport, est aussi le temps long nécessaire à l'exigence de la réflexion, de la transparence et de la participation démocratique. Personne ne peut se plaindre de l'existence de ces rendez-vous, ni de la possibilité d'explorer, entre les intervalles de temps qui les séparent, des voies nouvelles, qu'il s'agisse de la technique, des aspects sociétaux ou de la recherche, qui intègre désormais les questions relatives à la mémoire du site. Soit on souhaite traiter cette question des déchets radioactifs avec un très haut degré d'exigence et, dans ce cas, cela implique des moyens financiers conséquents et du temps ; soit on considère qu'il faut l'évacuer, la « mettre sous le tapis » en attendant qu'une solution crédible et alternative à l'enfouissement émerge. Notre sentiment est qu'étant donné encore une fois l'existence de ces déchets, nous nous devons de nous donner les moyens d'en assumer la responsabilité, notamment vis-à-vis des générations futures, et que l'enfouissement géologique profond constitue un moyen pertinent de l'assumer.

Bertrand Pancher a soulevé la question de la transmutation : le législateur, en 2006, a demandé la poursuite des recherches dans ce domaine. Il faut savoir que la transmutation implique le développement de la quatrième génération de réacteurs nucléaires, dite à neutrons rapides : nous aurons donc à traiter de ce dossier – et à faire un choix – lors du débat sur la transition énergétique.

Je salue la démarche de nos prédécesseurs, qui ont prévu des rendez-vous à intervalles réguliers, car elle permet systématiquement une consultation de la représentation nationale pour décider et orienter les choix de la nation en la matière, en fonction des réponses apportées, au fur et à mesure, par la recherche. Il s'agit là d'une dimension démocratique essentielle à mes yeux. Chaque rendez-vous permet aux élus de la nation de s'exprimer et de décider.

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