Monsieur Riester, l'expression de purge politique est inacceptable, mensongère et insultante. Ignorez-vous quelle réalité elle a désigné au cours du XXe siècle ? Je suis d'autant moins disposée à la tolérer que je n'ai limogé ni évincé personne. La seule décision de cet ordre que j'ai prise, je la revendique : c'est d'avoir remplacé, dès mon arrivée au ministère, la présidente du Centre des monuments nationaux, responsable du délabrement de l'institution et de la souffrance des personnels, par M. Philippe Bélaval, alors directeur général des patrimoines. L'un des quatre directeurs généraux de mon administration, Mme Laurence Franceschini, ici présente, chargée des médias et des industries culturelles, vous confirmera qu'elle continue de servir le ministère de la culture comme elle le faisait sous mon prédécesseur.
Le projet de loi associera l'opposition parlementaire à la nomination des membres du CSA. C'est sans précédent. La formule que vous avez mise en place pour la nomination des présidents de l'audiovisuel public, effectuée par le Président de la République, n'avait laissé au Parlement qu'un droit de veto. Encore fallait-il, pour l'exercer, réunir la majorité des trois cinquièmes. En concertation avec les parlementaires, que je remercie pour leur travail, le gouvernement initie une démarche de confiance, sûr que, dans l'intérêt général, nous pourrons trouver les personnalités les plus aptes à mener les réformes et assumer les missions du CSA. Ce texte est court, mais j'en suis fière, parce qu'il marque une véritable avancée. Merci à M. Michel Françaix de nous avoir fait bénéficier du recul que lui donne l'expérience. Je sais d'avance que l'opposition ne reviendra pas sur notre réforme, car elle profitera à l'ensemble de la société.
Le rapporteur a suggéré de donner au CSA le statut d'autorité publique indépendante. Forte d'une personnalité juridique distincte de celle de l'État, l'institution serait responsable de ses décisions sur le plan juridique et bénéficierait d'une plus grande autonomie de gestion. C'est une bonne proposition, que le gouvernement reprendra sous forme d'amendement.
Moi aussi, je regrette que le CSA n'ait pas établi d'études d'impact avant de procéder à l'attribution des fréquences, car il doit pouvoir s'appuyer sur des données permettant d'évaluer l'opportunité économique de ses décisions.
Plusieurs députés, dont le rapporteur, m'ont interrogée sur les conséquences à tirer du « rapport Lescure ». Le texte qui vous est présenté définit la structure organique du CSA, qu'il faudra doter de capacités élargies afin de réfléchir au nouvel environnement numérique. Pour ménager la part de la concertation et de l'expertise, il faudra procéder en deux temps. Le travail sera plus cohérent et plus lisible si l'on isole le projet de loi garantissant l'indépendance du CSA, de mesures plus techniques. Dans la continuité du « rapport Lescure », nous étudierons le cas des distributeurs des services audiovisuels. Nous devrons en effet poser la question du must carry – l'obligation de distribution des chaînes –, en nous demandant quels programmes sont concernés et quelles solutions envisager. Nous devrons aussi étendre les compétences du CSA à la régulation de l'univers numérique. Ce sera l'objet de la seconde étape législative.
M. Christian Kert, M. Patrick Hetzel et M. Franck Riester ont soulevé le problème de l'indépendance financière. Ne confondons pas la tutelle budgétaire, qui s'exerce dans n'importe quelle entreprise publique, et le contrôle éditorial, qui mettrait en cause l'indépendance organique du service public de l'audiovisuel et de l'autorité qui le contrôle. C'est celle-ci que nous défendons, sachant que la contribution à l'audiovisuel public est votée par les parlementaires lors de l'examen de la loi de finances. L'an dernier, nous avons augmenté cette « redevance » de 6 euros, ce que la précédente majorité n'a jamais voulu faire. « Moi vivant, la redevance n'augmentera pas », avait lancé M. Jean-François Copé… Il est vrai qu'il a plus récemment avoué que l'apprentissage de la démocratie était assez nouveau à l'UMP. Ce sont précisément des procédures démocratiques que nous voulons mettre en place.
Mme Isabelle Attard l'a expliqué : les présidents nouvellement désignés transmettront au Parlement un rapport d'orientation, dans un délai de deux mois après le début de leur mandat. Sur ce fondement, les commissions parlementaires pourront les auditionner. Pour répondre à M. Franck Riester s'agissant des mandats en cours des présidents de l'audiovisuel public, nous avons été très clairs là-dessus : le texte ne s'applique pas aux mandats en cours, nous les laisserons se terminer et la nouvelle procédure de nomination interviendra à l'issue de chacun des mandats en cours.
Le rapporteur du CSA aura autorité pour décider si les faits dont il a connaissance justifient qu'on engage devant le collège une procédure de sanction. Le cas échéant, il dirigera l'instruction avec l'aide des services du CSA. Il disposera dans cette mission d'une large autonomie. Le poste sera occupé par un juriste désigné par le vice-président du Conseil d'État. Les frais qu'entraînera sa création seront réduits, puisqu'il s'appuiera sur les services du CSA. Quoi qu'il en soit, le dispositif sera moins onéreux qu'un contentieux auprès de la Cour européenne des droits de l'homme, auquel nous expose la jurisprudence européenne et constitutionnelle.
Sous la précédente majorité, nous avions dénoncé la suppression brutale de la publicité, qui a déstabilisé le groupe France Télévisions. Pour offrir à celui-ci une visibilité sur son avenir, il faut annoncer le plus rapidement possible que, contrairement à ce qui avait été décidé, la publicité ne sera pas supprimée avant vingt heures à partir de 2016. Dans la même perspective, j'ai indiqué clairement notre ligne budgétaire. Compte tenu de l'état des finances publiques, l'État réduira de 2 % sur trois ans la dotation du groupe, effort que celui-ci doit pouvoir supporter.
Je remercie tous les orateurs qui sont intervenus pour soutenir ce texte lequel, n'en déplaise à certains esprits chagrins, vise à défendre tant l'indépendance de l'audiovisuel public que le rôle du Parlement.