Au terme de cette année passée à la tête du ministère de l'artisanat, du commerce et du tourisme, je suis heureuse de présenter à la Commission des affaires économiques les actions que j'ai engagées et celles qui sont à venir dans les prochains mois. Toutes ces actions s'inscrivent dans le cadre de l'objectif prioritaire du Gouvernement : le redressement économique de la France et l'emploi.
Plusieurs convictions ont guidé mon action au sein de ce ministère. La première, c'est le rôle essentiel des très petites entreprises – TPE – dans l'économie de notre pays. En effet, les artisans et les commerçants sont des entrepreneurs qui créent de l'emploi et favorisent la cohésion sociale. Leurs attentes et les enjeux spécifiques auxquels ils sont confrontés justifient une action ciblée et adaptée que je me suis efforcée de mener dans les trois secteurs dont j'ai la responsabilité.
Ma deuxième conviction, c'est la nécessité de prendre en compte la diversité et la richesse des territoires, en ciblant de manière privilégiée les zones rurales et les quartiers sensibles et en renouant les liens avec les collectivités locales trop souvent oubliées par le passé.
Ma troisième conviction, c'est la nécessité de faire évoluer nos modes d'intervention vis-à-vis de nos petites entreprises par un travail partenarial avec les corps intermédiaires, les organisations professionnelles, les chambres consulaires et les élus locaux. Je suis convaincue que la concertation et le dialogue sont des conditions indispensables pour l'adhésion des acteurs et le succès d'une politique qui doit répondre aux attentes de nos concitoyens.
Depuis ma prise de fonction, j'ai tenu à faire de très nombreux déplacements de terrain dans toute la France, en métropole et outre-mer, pour dialoguer avec les professionnels et engager des actions adaptées, au plus près des besoins.
Pour les artisans, j'ai présenté au conseil des ministres du 23 janvier dernier un pacte pour l'artisanat autour des enjeux stratégiques de valorisation des métiers et des savoir-faire, de transmission des entreprises et d'accompagnement renforcé et personnalisé de leur développement.
Les chambres de métiers et d'artisanat – CMA – ont été impliquées dans la mise en oeuvre des priorités de ce pacte, à travers des contrats de performance qui sont en cours de négociation.
Ces contrats permettent de déterminer les priorités des missions des chambres, dans un contexte budgétaire contraint où les aides aux entreprises doivent être repensées pour bénéficier plus directement aux acteurs économiques.
Nous créerons également des indications géographiques pour les produits manufacturés – c'était un des leviers du pacte pour l'artisanat – dans le cadre du projet de loi sur la consommation, dont l'examen a eu lieu la semaine dernière ici à l'Assemblée nationale. Mon objectif est de protéger et de valoriser les savoir-faire d'excellence de nos territoires.
S'agissant de l'innovation, j'ai confié au contrôle général et financier et au Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies une mission d'évaluation des pôles d'innovation pour l'artisanat et les petites entreprises afin d'analyser notamment les moyens qui leur permettront de conforter leur action au plan national. Les conclusions de la mission me seront rendues à la fin de l'été et nous verrons alors comment mettre à profit leurs préconisations.
Pour les commerçants, j'ai présenté le 19 juin dernier cinquante mesures pour le commerce et les commerçants. Ce plan d'action répond aux enjeux spécifiques de compétitivité de ces entreprises, de l'équilibre des différentes formes de commerce au sein des territoires et de l'accompagnement des mutations structurelles de ce secteur, dont le paysage évolue en profondeur avec la montée en puissance du e-commerce.
Pour renforcer la compétitivité de nos commerces, nous devons agir sur l'environnement de ces entreprises. C'est grâce non seulement à la BPI, mais également à un accompagnement renforcé des réseaux consulaires, que nous aiderons les entreprises dans leur recherche de financement, la gestion de leur trésorerie et la réduction des délais de paiement. Afin de préserver l'emploi, les savoir-faire et le tissu local, nous favoriserons également la transmission des commerces par une meilleure information des chefs d'entreprise et une mise en relation avec les repreneurs potentiels, comme nous l'avons fait dans le cadre du pacte pour l'artisanat. Enfin, une attention spécifique sera portée à la sécurité des commerces. Une approche globale sera mise en oeuvre, allant de la prévention à l'accompagnement des victimes : plans d'actions spécifiques pour les zones exposées, diffusion d'un guide de bonnes pratiques et label pour les assurances.
Le deuxième défi est celui de la préservation de la diversité des commerces. Nos règles d'urbanisme commercial doivent retrouver de la cohérence et de l'efficacité pour redonner du dynamisme à nos territoires.
Le premier objectif sera d'harmoniser l'instruction des permis de construire et des autorisations d'exploitation commerciale, afin de simplifier la procédure pour les porteurs de projet, raccourcir les délais et faciliter le contrôle de la réalisation des projets autorisés.
Une observation fiable des surfaces commerciales sera rétablie. Par ailleurs, les règles de l'urbanisme commercial seront étendues aux « drive », dont l'implantation très rapide dans nos territoires n'est pas aujourd'hui régulée, et la Commission nationale d'aménagement commercial pourra s'autosaisir sur des projets, particulièrement importants, de plus de 30 000 mètres carrés, dont l'impact territorial dépasse l'échelle départementale.
Pour lutter contre la standardisation de l'offre commerciale dans les centres des villes, le régime des baux commerciaux sera complété pour mieux réguler les évolutions des loyers et des charges. Les hausses fortes et brutales que nous avons connues seront lissées dans le temps et ne pourront excéder 10 % par an. Les charges feront l'objet d'une information précise et régulière des locataires, afin qu'ils puissent les maîtriser. Le droit de préemption des fonds de commerce par les communes sera facilité et juridiquement sécurisé. Les maires auront dans un premier lieu la faculté de déléguer ce droit à un opérateur public ou à une intercommunalité. Dans un second temps, une mission de diagnostic sera lancée dans les prochaines semaines, afin d'envisager d'autres modifications du droit de préemption.
Grâce à un FISAC – Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce – rénové, nous ciblerons mieux l'accompagnement des commerces dans les territoires les plus fragiles, zones rurales ou quartiers de la politique de la ville.
Enfin, Epareca démultipliera son action, à moyens constants, en développant des partenariats financiers avec des co-investisseurs, en particulier la Caisse des dépôts et consignations, avec laquelle des expérimentations sont déjà menées.
Dernier axe : nous devons permettre aux commerçants d'anticiper les mutations. Pour cela, j'encouragerai le regroupement des commerçants et je mettrai en place une instance nationale de concertation, très attendue par les professionnels, en vue d'établir une feuille de route pour le secteur, dont l'innovation constituera l'un des axes stratégiques. Elle guidera notre action pour accompagner l'évolution des métiers du commerce, afin que ce secteur reste pourvoyeur d'emplois, en particulier pour les jeunes.
Pour le secteur du bâtiment, le Président de la République a annoncé un plan d'investissement sur le logement qui prévoit des mesures d'envergure pour le logement social et la rénovation thermique. Dans le prolongement de ces annonces, je préside un groupe de travail interministériel chargé de coordonner les mesures d'accompagnement du secteur et de définir un plan d'action d'ici à la fin de l'année, qui concerne notamment la lutte contre le travail illégal en partenariat avec les organisations professionnelles, les problématiques de financement et de gestion des délais de paiement.
J'ai annoncé, il y a trois semaines, les mesures que le Gouvernement prendra pour réformer le régime de l'auto-entrepreneur. Ces annonces sont le fruit d'une concertation et d'une réflexion menées avec l'ensemble des acteurs.
Cette réforme est nécessaire, car le régime de l'auto-entrepreneur n'a pas atteint ses objectifs et a conduit à de nombreux abus : distorsion de concurrence, salariat déguisé, précarisation. Il s'agit non pas de casser ce régime – je l'ai dit et répété –, mais de le rendre efficace pour ceux qui souhaitent créer leur entreprise et corriger ces dérives.
Aujourd'hui, sur les 900 000 auto-entrepreneurs, la moitié ne déclare pas de chiffre d'affaires et 90 % de ceux qui en déclarent un sont en dessous du SMIC. Le véritable enjeu est donc bien celui de l'accompagnement.
Pour faire du régime de l'auto-entrepreneur un véritable tremplin pour les créateurs d'entreprises, nous détecterons, en vue de les accompagner, les auto-entrepreneurs à haut potentiel, sur la base d'un seuil intermédiaire de 19 000 euros de chiffre d'affaires pour l'artisanat et les services et de 47 500 euros pour les commerces. Ce seuil permettra de différencier les projets des auto-entrepreneurs et d'accompagner les projets de création d'entreprise.
Les auto-entrepreneurs qui utilisent ce régime pour se constituer un revenu d'appoint ne sont pas concernés par la réforme et leur pouvoir d'achat est maintenu.
Les auto-entrepreneurs qui dépasseront le seuil deux années consécutives seront accompagnés dans la transition vers le régime classique. L'auto-entreprise deviendra ainsi la première étape de la création d'entreprise. La simplicité du régime ne sera pas remise en cause, mais les inégalités qui subsistent seront corrigées.
Afin que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, nous renforcerons également les contrôles a priori et l'information du consommateur sur les obligations d'assurance et les qualifications requises pour certaines professions, en particulier les professions artisanales.
Cette réforme nous permettra de lutter contre le salariat déguisé et la précarisation. Le régime de l'auto-entrepreneur ne doit pas être l'outil privilégié du contournement du droit du travail. Les entreprises devront faire figurer dans leur bilan social le nombre d'auto-entrepreneurs avec lesquels elles travaillent et le volume du chiffre d'affaires réalisé avec eux. La limitation dans le temps réduit en effet les possibilités de contournement du droit du travail et découragera les employeurs qui ont recours au salariat déguisé. De plus, les contrôles a priori et a posteriori sont renforcés.
Enfin, le Gouvernement lance le chantier d'une réforme globale des régimes de création d'entreprise, et je suis heureuse que le débat sur le régime de l'auto-entrepreneur ait pu ouvrir ce chantier, qui est nécessaire pour nos entreprises et notre dynamisme.
L'objectif du Gouvernement est bien de simplifier et d'harmoniser les régimes juridiques, fiscaux et sociaux des TPE. Les mesures qui seront proposées par le Gouvernement à l'issue de ce chantier s'intégreront dans le projet de loi de finances pour 2015.
À titre de première étape d'harmonisation, le Gouvernement refondra à l'automne le régime de la cotisation foncière des entreprises – CFE –, pour une législation unique en rapport avec les capacités contributives de chacun. Enfin, l'exonération de cotisation forfaitaire minimale maladie des travailleurs indépendants sera doublée, pour rapprocher les régimes classiques du régime de l'auto-entrepreneur et lisser le basculement de l'un à l'autre en vue d'éviter des passages trop brutaux.
Vous le voyez, le Gouvernement agit pour le dynamisme de nos petites entreprises, la croissance et l'emploi !
Dans cette perspective, je prépare également pour la rentrée un projet de loi qui comprendra des mesures portant sur l'artisanat, le commerce et l'évolution du régime de l'auto-entrepreneur. Dans le droit-fil des mesures gouvernementales en faveur des entreprises, ce projet de loi vise à faciliter leur implantation en améliorant leur situation locative, clé de leur réussite en centre ville, à alléger et simplifier leurs obligations administratives et comptables et à rendre plus efficaces les leviers d'intervention de l'État dans ce secteur.
S'agissant du FISAC, comme vous le savez j'ai commandé une évaluation complète de ce dispositif compte tenu de la situation difficile – c'est un euphémisme – dans laquelle se trouvait ce fonds à ma prise de fonction.
Des travaux complémentaires ont été nécessaires tant ce fonds a été mal structuré et mal utilisé. Les résultats sont à présents connus et le Gouvernement travaille sur les options possibles. Des échanges sont en cours avec le Premier ministre dans la perspective d'une gestion optimale des crédits que nous pourrons rassembler pour répondre favorablement aux demandes déposées. Le Gouvernement s'est engagé pendant le débat budgétaire à ouvrir une négociation sur les financements de ce fonds, une fois que le rapport aura fait toute la clarté nécessaire.
Il convient de revoir le fonctionnement du dispositif, afin de mettre en place une allocation plus équitable et mieux ciblée de ces crédits qui permettent à des territoires fragiles d'être redynamisés. Mon projet de loi rendra cette refonte possible. J'engagerai prochainement une consultation des élus pour définir les futurs contours de ce fonds, dans l'objectif que le FISAC réformé soit opérationnel dès 2014.
S'agissant de la restauration, j'ai mis en place un comité de filière afin d'élaborer la feuille de route du secteur, que j'ai présentée la semaine dernière et qui a déjà fait l'objet de débats dans le cadre du projet de loi sur la consommation. Elle s'articule autour de trois priorités : mieux informer les consommateurs et promouvoir la qualité dans la restauration ; améliorer les conditions de travail des professionnels ; renforcer la formation des métiers de la restauration et développer l'apprentissage. S'agissant des plats « fait maison », les longs débats en séance publique ont révélé tout l'intérêt des parlementaires pour ce label.
En ce qui concerne le tourisme, je tiens à réaffirmer son rôle essentiel pour la croissance de notre pays et son potentiel d'emplois encore inexploité. L'amélioration de la qualité de l'accueil et de nos hébergements est un enjeu majeur pour le maintien de la primauté mondiale de la France sur le tourisme, qui s'appuie en particulier sur la professionnalisation et le sens du service des salariés de ces entreprises. Elle sera au coeur des rencontres que nous organiserons au second semestre.
Le tourisme étant également un secteur fortement créateur d'emplois, Michel Sapin et moi-même avons missionné le président de Pôle emploi pour identifier les freins qui existent encore et pourvoir les 50 000 emplois aujourd'hui vacants dans ce secteur en France. Ses conclusions seront rendues à l'automne.
Par ailleurs, je travaille sur une réforme visant à rendre enfin les vacances accessibles au plus grand nombre. J'ai mis en place, en février, des opérations pilotes dans les régions Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes, grâce au soutien des collectivités locales et de différents acteurs, pour accompagner le départ en vacances de jeunes apprentis qui n'y avaient pas accès. Une deuxième série d'opérations pilotes aura lieu cet été à l'attention des familles monoparentales. Les travaux concernant les contrats de destination, qui nous permettront de mieux structurer la filière et de définir un projet en mettant en relation l'ensemble des acteurs, se poursuivent. Certains contrats seront signés durant l'été, d'autres à la rentrée. De nouvelles collectivités manifestent leur intérêt pour cette démarche lors de mes déplacements et de mes rencontres. Je poursuivrai avec Atout France ce travail de structuration si important pour conduire une politique de promotion et de coordination efficace, si indispensable pour la promotion de la destination France.
Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les informations, évidemment non exhaustives, que je souhaitais vous transmettre.