Intervention de Bruno Rémond

Réunion du 6 juin 2013 à 9h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Bruno Rémond, conseiller-maître à la Cour des comptes :

L'exacerbation technologique – évoquée par l'amiral et déjà stigmatisée par l'ancien chef d'état-major de l'armée de terre, le général d'armée. Bruno Cuche –, le décalage temporel, la dérive financière et, in fine, la réduction des cibles attendues par rapport aux objectifs initiaux affectent souvent la réalisation des programmes d'armement – qu'ils soient intégralement français ou effectués en coopération.

Il ne faut pas imputer à un mécanisme d'élaboration d'un projet des travers qui ne lui sont pas spécifiquement liés, mais qui découlent du programme global d'armement. Le comité des prix de revient des fabrications d'armement (CPRA) et la Cour des comptes ont constaté que les mêmes défaillances entraînant les mêmes conséquences, le dépassement identique des délais et les dérives financières comparables touchaient les programmes exclusivement français comme ceux réalisés en coopération. Si les programmes d'armement en coopération se révèlent insuffisants – malgré l'OCCAr, les objectifs d'absence de retour industriel, de diminution du coût des produits par extension des cibles et par homogénéisation des matériels n'ont pas été atteints –, ils ne sont pas plus défectueux que les mécanismes de fabrication des programmes d'armement français.

Amiral, vous nous avez affirmé que trois critères étaient nécessaires à la réussite d'un programme en coopération : un montage industriel satisfaisant, une forte volonté politique et une homogénéisation des caractéristiques. Pour le premier, vous avez cité l'exemple de l'A 400M : le montage industriel fut déficient puisque nous avons confié la totalité de ce programme si complexe à un seul responsable – Airbus –, ce qui a généré de grandes difficultés ; celles-ci ne sont donc pas dues aux mécanismes de coopération internationale. Vous avez indiqué que la troisième exigence était la moins difficile à remplir, ce que je ne crois pas ; au contraire, l'expérience nous montre qu'elle est la plus complexe à satisfaire, comme l'atteste l'exemple de l'hélicoptère NH 90 où les quatre États participant au programme ont développé des spécifications techniques répondant à des demandes particulières de leurs armées. On a rencontré les mêmes problèmes pour le Tigre, les FREMM et l'A 400M – l'armée française étant la seule à souhaiter que l'A 400M absorbe les véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI). Ce travers des programmes de coopération date de deux décennies ; auparavant, le Jaguar et le Transall avec les Britanniques ou les tripartites anti-mines avaient donné lieu à la fabrication de produits identiques pour chaque pays. À partir du moment où l'on a voulu répondre à des définitions opérationnelles et à des spécifications militaires différentes selon les États, on a grandement complexifié la réalisation des programmes.

Amiral, vous auriez pu évoquer la coopération étroite – presque secrète, mais très importante sur le plan scientifique et technologique – qui nous unit depuis bien longtemps avec les États-Unis en matière de dissuasion nucléaire.

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