Intervention de Jean-Christophe Fromantin

Réunion du 4 juillet 2013 à 11h00
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Fromantin, rapporteur :

Quatre dispositifs mériteraient aujourd'hui d'être créés ou améliorés. En amont, il conviendrait que les régions assurent une meilleure coordination de l'ensemble des acteurs impliqués, afin d'éviter que les entreprises ne se perdent compte tenu du manque de lisibilité évoqué précédemment. À l'étranger, ce travail de coordination des acteurs sur le terrain pourrait être effectué par l'ambassadeur car, s'il le fait déjà, c'est plutôt par bonne volonté que dans le cadre d'une mission. Ainsi, lorsque Patrice Prat et moi-même nous sommes rendus à Istanbul, l'ambassadeur a bel et bien réuni l'ensemble des acteurs mais ce fut plutôt pour discuter du contexte économique et politique de la Turquie. L'ambassadeur dispose pourtant de l'autorité et de la capacité nécessaires pour animer une réunion d'objectifs, qui pourrait être consacrée à vérifier qu'il n'y a pas de redondance entre les interventions des uns et des autres et que la feuille de route de l'État dans le pays en question est correctement exécutée.

La troisième famille d'acteurs regroupe les volontaires internationaux en entreprise. Ce dispositif fonctionne bien dans la mesure où il est bien calibré pour les PME, tout en étant par ailleurs utilisé par nombre de grandes entreprises. Nous avons cependant été surpris qu'aucune formation ne soit proposée à ces volontaires, ni avant leur départ à l'étranger ni par la suite. Il ne serait pourtant pas inutile de leur proposer des séminaires de formation avant leur départ, ne serait-ce que pour leur présenter la manière dont fonctionne ce dispositif, puis, une fois dans le pays d'accueil, une formation continue suffisante afin de mobiliser à leur profit l'ensemble des ressources dont dispose la France dans ce pays. Nous avons ainsi été surpris de constater, lorsque nous avons réuni les VIE à Istanbul, qu'ils n'entretenaient quasiment aucun rapport avec les structures françaises, qui pourraient bien souvent les aider à assurer leur mission de prospection.

Le dernier élément du pôle français à l'export fait l'objet d'une demande récurrente. Il s'agirait de créer des « maisons France », sortes d'incubateurs ou de centres d'affaires permettant d'accueillir les VIE des PME, de fournir aux entreprises se rendant dans un pays et ayant besoin d'un showroom pour présenter leurs produits des locaux qui n'existent pas aujourd'hui ou d'offrir aux entreprises de passage des salles de réunion ainsi qu'un support logistique. Désormais, beaucoup de PME sont aussi investisseurs ou créateurs de filiales ou de structures à l'étranger. Ces « maisons France » prendraient la forme de bureaux pouvant être loués à la journée, à la semaine, au mois ou à l'année aux entreprises, autour desquels pourraient s'agréger des services publics et privés tels que des cabinets d'avocats, de conseils ou d'experts comptables.

Enfin, dans le quatrième et dernier volet de notre rapport, nous proposons de rationaliser les dispositifs de financement et de garantie existants. L'une de nos idées-clefs consiste à offrir davantage d'assurance-prospection que de subventions. D'abord, parce que le principe d'assurance-prospection est plus responsabilisant et suppose la présentation par l'entreprise d'un plan ou d'un programme comprenant des dépenses éligibles. Ensuite, parce qu'il s'agit là d'un dispositif d'équité, compte tenu des distorsions importantes entre les collectivités qui peuvent aider leurs entreprises à exporter et celles qui ne sont pas en mesure de le faire. Le principe d'équité territoriale suppose l'adoption d'un dispositif plus homogène d'aide individuelle auprès des exportateurs, exigence à laquelle satisfont les dispositifs assurantiels – ce qui n'empêche nullement les régions de distribuer des subventions dans le cadre d'opérations collectives de filière ou de pôle.

Nous préconisons également de clarifier nos dispositifs de préfinancement. Aujourd'hui, si vous effectuez un effort de prospection de 100 000 euros, vous pourrez assurer jusqu'à 70 ou 75 % de ces dépenses, mais il vous faudra néanmoins les avancer. C'est pourquoi existent des dispositifs de préfinancement, c'est-à-dire d'avance sur la fraction assurée du dispositif de prospection prise en charge par Oséo, la Coface et les banques. Sans doute le dispositif serait-il plus lisible si ce rôle était confié à la BPI. Nous proposons d'ailleurs également que la partie de la Coface opérant pour le compte de l'État rejoigne à terme la BPI : il paraît, en effet, logique que cette banque exerce à la fois des activités d'assurance-prospection pour le compte de l'État et de préfinancement de la fraction assurée des dispositifs de prospection ou des investissements nécessaires à la réalisation du contrat à l'exportation.

Quant aux procédures, nous proposons la création d'un label d'exportateur agréé, de telle sorte que les entreprises ne soient plus dans l'obligation, chaque fois qu'elles demandent une ligne d'assurance-crédit ou une facilité à l'international, de reconstituer l'intégralité d'un dossier comportant des informations rebondantes. Ce statut, inspiré de ce que fait l'administration des douanes, vaudrait présomption de conformité et ferait gagner du temps à tous, y compris à l'administration.

Nous proposons également – et c'est là un point sensible parmi nos préconisations – d'introduire davantage de souplesse dans la définition de la « part française » des contrats éligibles aux dispositifs de soutien aux exportations. Actuellement, ne peuvent être aidées que les entreprises dont la part française est très majoritaire dans leur production. Or les chaînes de valeur sont aujourd'hui si fragmentées que, pour être compétitif, il est nécessaire d'incorporer, voire d'importer, des éléments intermédiaires d'origine étrangère. Par conséquent, une définition trop rigide de la part française pourrait s'avérer contre-productive, notamment en termes d'objectif d'emploi. Qui observe l'évolution de la part importée dans l'automobile allemande s'apercevra qu'une partie de la compétitivité de cette industrie s'explique par le fait que l'euro fort lui permet d'importer à coût réduit des biens intermédiaires et donc de concentrer ses efforts sur des produits à haute valeur ajoutée et sur le marketing. C'est ainsi que la part allemande dans l'automobile allemande est moins forte mais rapporte plus de profits et d'emplois à l'industrie allemande. Pour assouplir notre définition de la part française, nous suggérons de nous appuyer sur l'indicateur-clef de l'emploi, quitte à examiner les dossiers au cas par cas si les montants en jeu sont importants. Car ce qui nous importe sur nos territoires, c'est que l'emploi industriel se développe.

Enfin, nous proposons de placer Bpifrance Export au coeur de la relation client afin d'améliorer la lisibilité de notre outil de soutien : dès lors, en effet, que l'État met en place une sorte de front office, autant faire en sorte que les représentants de la BPI sur le terrain coordonnent les relations avec les entreprises et puissent à la fois réaliser des opérations de haut de bilan et flécher des aides à l'export ou des assurances-prospection. Il conviendrait également de créer un système informatique qui permette aux différentes administrations et acteurs publics en relation avec les entreprises de partager leurs données afin d'éviter les redondances et, parfois, le gâchis d'argent public.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion