Intervention de Michel Herbillon

Réunion du 26 juin 2013 à 14h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Herbillon, co-rapporteur :

Je souhaiterais avant tout souligner le caractère chaotique de la mise au point de la proposition de résolution, du fait de discussions au sein de la majorité, ce qui a conduit à l'annulation de la réunion qui devait être consacrée à son examen la semaine dernière. Je n'ai été prévenu qu'au dernier moment de ce report. Je note par ailleurs que la version que nous examinons aujourd'hui a encore été modifiée une demi-heure avant la réunion, pour enlever la mention du « grand soir fiscal » que le groupe socialiste appelait de ses voeux avec la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG.

Si, comme Christophe Caresche, il m'apparaît nécessaire de procéder à un rééquilibrage de l'effort de redressement des finances publiques, je tiens à souligner que c'est, en ce qui me concerne, avec comme objectifs de mettre davantage l'accent sur les dépenses, d'alléger le coût du travail, de réduire les niches fiscales et sociales. Il m'apparaît également nécessaire de profiter du délai proposé par la Commission européenne pour mener des réformes ambitieuses, mais tout dépend de la définition de l'ambition que l'on a et manifestement nous n'avons pas la même ambition pour ces réformes.

Mais avant d'aborder plus en détail les réformes envisagées, je souhaiterais souligner que les prévisions de la Commission européenne me semblent plus fiables que celles du Gouvernement. La Commission européenne, tout comme le Haut conseil des finances publiques, note ainsi que le scénario macroéconomique sur lequel repose le programme de stabilité pour 2014 est trop optimiste. Il me semble en outre que, au regard des premiers résultats de l'exécution du budget en 2013, le déficit nominal sera plus proche des 4 % du PIB que des 3 % que nous avons votés et des 3,7 % avancés par le Gouvernement dans son programme de stabilité. Le dérapage s'élèverait ainsi à 20 milliards d'euros, 15 milliards sur les recettes, 4 à 5 milliards sur les dépenses, portant ainsi le déficit prévu de 60 à 80 milliards d'euros.

Ainsi que le souligne la Commission européenne, le déficit public français prévu pour 2013 est l'un des plus élevés parmi les pays de la zone euro qui ne font pas l'objet d'un programme d'assistance financière. Si celui-ci devrait, sous réserve de prendre les mesures nécessaires, baisser en 2014, la dette publique devrait dépasser 96 % du PIB et le taux de chômage atteindre 10,9 % en 2014.

Aussi, dans son analyse de la situation française, la Commission européenne ne cesse d'appeler à engager de nouvelles actions, des réformes plus ambitieuses dans notre pays.

Ces prévisions inquiétantes appellent en effet des réactions rapides et adaptées. Mais force est de constater que nous ne sommes pas d'accord sur les actions que doit mener le Gouvernement. Je citerai trois exemples pour éclairer mon propos.

Le premier concerne la réforme des retraites. Certes, nous ne connaissons pas, à ce stade, le projet du Gouvernement, mais plusieurs pistes ont été présentées la semaine dernière par la Commission sur l'avenir des retraites présidée par Mme Yannick Moreau. Nous pensons qu'un décalage de l'âge légal de départ en retraite est probablement incontournable. Cela ne semble pourtant pas figurer parmi les options envisagées par le Gouvernement. C'est quand même curieux, alors qu'il ressort très clairement de la communication de la Commission européenne sur les recommandations par pays que la France est le pays de l'Union européenne qui propose l'âge de départ à la retraite le plus bas aujourd'hui, mais également à l'horizon 2020. Le précédent Gouvernement avait fait un premier pas en portant cette limite à 62 ans, ce qui était justifié, compte tenu de l'évolution de l'espérance de vie. Au regard des comparaisons européennes, où la moyenne s'établirait plutôt à 65 ans, la piste du décalage de l'âge du départ en retraite ne me semble donc pouvoir être écartée d'un simple revers de coude. Il me semble par ailleurs qu'il convient, dans la situation économique actuelle et dans le souci d'assurer la compétitivité de nos entreprises, de ne pas alourdir les cotisations patronales.

Mon deuxième exemple concerne la nécessité de renforcer la compétitivité de la France, sur laquelle la Commission européenne insiste à juste titre. Nous avions voté une TVA anti-délocalisation. Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ne me convient pas. La Commission européenne prévoit d'ailleurs que l'impact de cette mesure ne sera pas aussi fort que l'avance le Gouvernement français.

Il me semble enfin que la situation très inquiétante de l'emploi en France appelle des mesures supplémentaires pour lutter contre la segmentation du marché du travail et qu'il convient de lancer sans tarder une réforme du système d'indemnisation du chômage et de faire de l'emploi des jeunes une priorité, en particulier l'apprentissage, qui relève, à ce stade, de l'incantation, et non du résultat.

L'opposition votera donc contre cette proposition de résolution, en particulier son point 12, qui apparaît comme un satisfecit adressé à la politique du Gouvernement, alors que la Commission européenne appelle à des réformes plus ambitieuses.

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