Intervention de Dominique Orliac

Séance en hémicycle du 9 juillet 2013 à 15h00
Admission en qualité de pupille de l'État — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac :

Madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mes chers collègues, il nous revient aujourd'hui de nous prononcer sur le projet de loi concernant l'arrêté d'admission en qualité de pupille de l'État. Ce texte, découlant d'une question prioritaire de constitutionnalité, sert avant tout à combler un vide juridique concernant l'admission d'enfants au titre de pupille de l'État, un statut qui permet aux enfants de pouvoir être placés en vue d'une adoption.

D'après le dernier rapport publié par l'Observatoire national de l'enfance en danger en février 2013, portant sur les chiffres de l'année 2011, 2 345 enfants bénéficiaient du statut de pupille et 761 ont été placés en adoption. Si nous constatons que, plus les années passent, plus le nombre d'enfants bénéficiant du statut de pupille de l'État diminue, et nous félicitons de cette tendance à la baisse qui démontre notamment que l'aide de l'État apportée aux familles joue bien son rôle, il paraît essentiel aux radicaux de gauche que le vide juridique soit rapidement comblé. La loi actuelle permet à la famille biologique ou aux personnes entretenant un lien avec l'enfant de faire recours sur l'arrêté déclarant un enfant « pupille de l'État » sur une période de trente jours.

Toutefois, jusqu'à présent, la loi ne fait aucunement mention du fait que ce recours de trente jours doit être notifié à la famille ou aux personnes ayant un lien avec l'enfant, notamment les personnes exerçant la garde tutélaire. Il apparaît donc que certaines personnes dans l'entourage de l'enfant, sans connaissance de ce délai de trente jours, peuvent se trouver hors délai pour faire recours contre l'arrêté offrant le statut de pupille à un enfant. Le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui a donc pour objectif de préciser les modalités de recours contre un arrêté d'admission en qualité de pupille de l'État et de s'assurer que toute personne ayant un lien proche avec l'enfant pourra être informée en temps et en heure du recours qu'elle est en droit de faire.

L'adoption est un sujet sensible. Bien que la procédure d'adoption puisse couper l'enfant de sa famille biologique, elle permet cependant de redonner à l'enfant un cadre stable et une famille lui assurant la protection et l'amour dont il aura besoin tout au long de sa vie, mais principalement dès son enfance, afin de devenir un citoyen épanoui de la République. Il est donc extrêmement important que l'accès au statut de pupille de l'État soit clairement défini et que toutes les parties concernées soient tenues informées des tenants et aboutissants dans les délais impartis.

La séparation entre des parents biologiques et leurs enfants se fait très souvent dans la douleur. L'abandon de son enfant est certainement très difficile mais, si nous n'avons pas à juger des décisions de certains parents, il est de notre devoir, en tant que législateur, de nous assurer que cette transition puisse se faire le plus paisiblement et calmement possible, dans l'intérêt unique de l'enfant.

Cet arrêté prévoyant d'informer clairement l'entourage de l'enfant pouvant être admis en tant que pupille de l'État permet donc de clarifier les délais de recours et de s'assurer que la famille biologique proche puisse éventuellement reprendre à sa charge l'enfant et son destin.

Concernant la nouvelle rédaction de l'article L. 224-8 du code de l'action sociale et des familles, nous estimons donc qu'il est important, dans l'intérêt de l'enfant, d'avoir un texte qui précise le champ des personnes pouvant exercer un recours, en l'élargissant en particulier à la famille de naissance, par le père de naissance notamment. Bien que non explicité aujourd'hui dans la loi, ceci n'est pas un bouleversement du droit actuel puisque, dans la pratique, les tribunaux l'admettent déjà. Cependant, toute précision ne peut qu'être utile et ce, dans l'intérêt de l'enfant et dans celui de la famille de naissance.

Les nouvelles dispositions éteindront définitivement le droit d'agir après trente jours pour les personnes ayant reçu la notification de possibilité de recours ; il faudra toutefois veiller à ce que le plus grand nombre de personnes ayant qualité pour agir et qui n'auraient pas été en mesure de manifester un intérêt pour l'enfant avant la date de l'arrêté, faute d'en avoir eu connaissance, puissent être informées le plus rapidement possible. En effet, le projet de loi permet à ces personnes de voir leur action de recours recevable tant que l'enfant n'aura pas été placé en vue d'une adoption. De plus, le fait que le tribunal puisse toutefois autoriser le demandeur dont le recours n'aurait pas abouti, à exercer un droit de visite dans l'intérêt de l'enfant, ne peut qu'être positivement apprécié.

D'autres points du texte nous paraissent importants, notamment le fait qu'il conditionne la volonté d'assumer la charge de l'enfant à la recevabilité : cela permet d'éviter les recours abusifs. En outre, les nouvelles dispositions introduites permettront de créer les conditions pour éteindre définitivement le droit d'agir, en garantissant le placement de l'enfant dans une famille en vue de son adoption et en faisant obstacle à toute restitution ultérieure de l'enfant par la nouvelle famille adoptive. Toutes ces dispositions sécuriseront l'intérêt et la situation de l'enfant, garantiront les droits de la famille d'adoption, ainsi que les droits de la famille biologique.

Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste est, par conséquent, favorable à l'adoption de ce texte, qui apporte des précisions importantes et nécessaires concernant le risque actuel qui pèse sur le statut de pupille de l'État. Avec ce texte, la protection de l'enfant est renforcée tant au niveau de sa famille biologique que de sa potentielle famille d'adoption. Il permettra, en outre, de rendre adoptables les enfants ayant acquis le statut de pupille de l'État sur décision du président du conseil général, et permettra aussi que l'adoption qui pourrait s'ensuivre puisse se faire en toute sécurité, toujours dans l'unique perspective de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Pour conclure, les députés du groupe RRDP voteront ce texte, qui permettra enfin de combler un vide juridique important et de sécuriser le statut de pupille de l'État, mais aussi de sécuriser la famille adoptive et la famille biologique dans leurs droits respectifs. Ce texte protégera également, et avant toute chose, l'enfant et son intérêt supérieur, qui consiste notamment à pouvoir bénéficier d'une protection familiale et d'un entourage aimant et bienveillant, lui permettant de lui offrir la stabilité qu'il est en droit de recevoir, afin de lui offrir tous les outils nécessaires en vue de devenir citoyen de notre République.

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