Madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mes chers collègues, le texte que nous examinons a pour unique objet de réécrire le premier alinéa de l'article L. 224-8 du code de l'action sociale et des familles.
Il fait suite à une question prioritaire de constitutionnalité renvoyée par la cour de Cassation au Conseil constitutionnel le 6 juin 2012. Cette question portait sur la légalité des dispositions de l'article L. 224-8 du code, relatives aux recours contre l'arrêté d'admission en qualité de pupille de l'État. Le Conseil constitutionnel a, dans sa décision du 27 juillet 2012, déclaré le premier alinéa de cet article contraire à la Constitution.
Le recours contre un arrêté d'admission en qualité de pupille de l'État permet à un parent ou un proche de contester l'arrêté pour obtenir la prise en charge de l'enfant.
L'article L. 224-8 du code de l'action sociale et des familles prévoit, certes, un délai raisonnable de trente jours pour former ce recours devant le tribunal de grande instance, mais il ne prévoit aucune notification formelle de l'arrêté.
En l'absence de notification, les personnes disposant de la légitimité pour déposer un recours contre cet arrêté peuvent donc en ignorer l'existence et se trouver forcloses.
Aussi le projet de loi précise-t-il l'identité des personnes pouvant exercer un recours contre l'arrêté, en l'étendant notamment à la famille de naissance, y compris pour un enfant né sous X.
Nous ne pouvons que saluer cette avancée, qui conforte une jurisprudence timide en la matière.
De même, nous ne pouvons qu'approuver la réponse que ce texte apporte au Conseil constitutionnel : désormais, toute personne ayant un lien étroit avec l'enfant se verra notifier l'arrêté d'admission en qualité de pupille de l'État.
Pour ces personnes, le terme du délai de trente jours suivant la notification éteindra leur droit à agir. Ce délai ne sera pas applicable aux autres personnes ayant qualité à agir qui n'auraient pas été en mesure de manifester un intérêt pour l'enfant avant la date de l'arrêté, faute d'avoir été destinataires de sa notification. L'action de ces personnes sera recevable tant que l'enfant n'aura pas été placé en vue de son adoption.
Nous approuvons sans réserve la nouvelle rédaction de l'alinéa censuré par le Conseil constitutionnel.
Il apporte une garantie légale au droit des proches de l'enfant à exercer un recours juridictionnel effectif et met ainsi fin à une insécurité juridique qui leur était préjudiciable. Il est également plus favorable – il convient de le souligner – aux intérêts des enfants.
Telles sont les raisons pour lesquelles les députés du groupe GDR voteront ce texte.
Toutefois, je regrette et je dénonce ses conditions d'examen.
En effet, le 27 juillet 2012, le Conseil constitutionnel rendait la décision qui motive ce texte. Le Gouvernement disposait d'un délai confortable – une année et demie – pour légiférer sur cette question technique, puisque le Conseil constitutionnel a reporté l'effet de sa décision au 1er janvier 2014.
Ce sujet n'aurait-il pas mérité d'être très rapidement examiné et voté par la représentation nationale ? Pourquoi avoir attendu près d'un an avant de présenter ce texte, alors que son contenu concerne au premier chef des enfants fragilisés par la vie ainsi que leurs proches, parfois leurs parents ? Pourquoi avoir attendu la présente session extraordinaire, dont le programme est déjà surchargé ?
Qu'est-ce qui peut justifier que le texte du projet de loi n'ait été mis en ligne que le mercredi 3 juillet à 17 heures 15, en vue d'un examen en commission des affaires sociales le jeudi 4 à 10 heures ?
Ce n'est pas tolérable ! Ce n'est pas admissible ! Nous ne sommes pas une chambre d'enregistrement, madame la ministre. Ces erreurs, délibérées ou non, sont le signe, au mieux, d'une coupable légèreté, au pire, d'une absence totale de considération s'agissant d'un sujet qui touche à la vie de centaines d'enfants.
En tout état de cause, cela révèle encore une fois le manque de respect de l'exécutif pour la représentation nationale, quelle que soit la couleur de la majorité en place, dans les institutions de la Ve République.