Intervention de Kader Arif

Séance en hémicycle du 9 juillet 2013 à 21h45
Instauration du 27 mai comme journée nationale de la résistance — Présentation

Kader Arif, ministre délégué chargé des anciens combattants :

Et je n'oublie pas la longue succession de parlementaires qui, au fil des ans, ont proposé des textes allant dans le sens de la création de cette journée nationale d'hommage à la Résistance. Vous vous inscrivez dans leurs pas.

Parmi ces milliers de femmes et d'hommes d'honneur, il y a les dix-sept membres du Conseil national de la Résistance, réunis ce jour-là autour de Jean Moulin, sous l'autorité du général de Gaulle.

Leur oeuvre fut double.

Elle fut d'abord de porter au plus haut, au-dessus de toute autre considération, les valeurs de la République qui font encore aujourd'hui notre fierté. Leur action donna à la Résistance un nouvel élan et lui permit, malgré les risques, de frapper plus durement l'ennemi. Il n'était pas anodin, au milieu de la guerre et sous le joug féroce de l'ennemi, de rappeler dans le programme du CNR la nécessité d'assurer la pleine liberté de pensée, de conscience et d'expression, la liberté d'association, de réunion et de manifestation, le rétablissement du suffrage universel, le respect de la personne humaine ou encore l'égalité absolue de tous les citoyens devant la loi.

La force du CNR fut aussi de développer une pensée visionnaire proposant un véritable programme politique de mise en oeuvre de ces valeurs fondamentales : des réformes économiques, sociales et politiques donnant la priorité à l'accès à l'éducation pour tous et posant les bases d'un modèle social qui est aujourd'hui le nôtre, à tel point que le préambule de la Constitution de 1946, qui s'en inspire, fait partie aujourd'hui du bloc de constitutionnalité français.

Je ne reviendrai pas sur toutes les propositions. Permettez-moi toutefois d'en citer quelques-unes : l'instauration d'une véritable démocratie économique et sociale, prévoyant notamment la participation des travailleurs à la direction de l'économie ; le droit au travail et le droit au repos ; la reconstitution d'un syndicalisme indépendant ; la sécurité sociale – et bien d'autres choses.

Derrière toutes ces propositions, le triptyque « Liberté, égalité, fraternité » occupe une place centrale.

La liberté, le retour à cette liberté volée, arrachée à une France humiliée par la défaite de 1940. La liberté, si chère au général de Gaulle, qui, à l'occasion de la libération de Paris, rendait hommage à « la France qui se bat, la seule France, la vraie France, la France éternelle. » Se battre pour la liberté, confisquée hier par l'envahisseur, menacée aujourd'hui par des maux internes, ces maux qui portent le nom d'indifférence, d'individualisme et d'égoïsme.

L'égalité, principe fondamental de la République, est au coeur du combat de la Résistance et du programme du CNR. Elle porte en elle le refus des politiques racistes et antisémites qui s'abattent partout sur l'Europe occupée et en France également, avec le concours de l'État français, qui en vint même à devancer en ce domaine les désirs de l'occupant. Souvenons-nous du sens de leur engagement, alors que s'élèvent autour de nous les tentations du repli et de l'exclusion.

La fraternité, enfin. Elle est au coeur de l'oeuvre du Conseil national de la Résistance. Le rassemblement, l'unité, l'apaisement, au profit d'une ambition commune et partagée, celle d'une République démocratique restaurée. La fraternité comme capacité à se réunir, comme l'ont fait les membres du CNR, qui représentaient toute la France républicaine. La fraternité comme entraide et solidarité, comme un serment d'amitié qui porte tant le projet politique de libération du territoire national que celui de reconstruction de la France d'après-guerre.

Cette oeuvre fondatrice, il est de notre devoir de la porter à notre tour auprès des nouvelles générations. C'est tout le sens de cette proposition que je suis heureux et honoré de soutenir au nom du Gouvernement. En instituant une journée nationale du souvenir, dirigée principalement vers la jeunesse, c'est l'impératif de transmission qui est assuré.

Hier, nous commémorions le soixante-dixième anniversaire de la mort de Jean Moulin, celui qui rendit possible le CNR. Aujourd'hui, il vous appartient d'enrichir par ce texte la mémoire de la France.

Le 27 mai, chaque année, la jeunesse de France pourra, autour de ses enseignants, réfléchir sur ce qui fait qu'une nation reste forte et digne. Le 27 mai, chaque année, la jeunesse de France découvrira le nom de ceux qui ont tracé un chemin : le général de Gaulle, Jean Moulin, Missak Manouchian, Joseph Epstein, Berthie Albrecht, Danielle Casanova, Pierre Brossolette et bien d'autres encore, femmes et hommes inconnus.

Le 27 mai, chaque année, la jeunesse de France découvrira les noms des territoires de la liberté : les Glières, le Vercors, Saint-Marcel, le mont Mouchet. C'est simplement de cela qu'il s'agit aujourd'hui, simplement de cela, c'est-à-dire de l'âme de la France.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion