Intervention de Serge Letchimy

Réunion du 2 octobre 2012 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Je veux croire que c'est dans un esprit constructif que Mme Vautrin a soulevé un certain nombre de problèmes techniques, que je comprends d'ailleurs. Permettez-moi de me réjouir d'autre part du nombre important de collègues présents : cette participation tranche avec celle que nous observions habituellement lorsque nous traitions de l'outre-mer et je veux y voir l'expression d'une prise de conscience de l'importance que revêtent des projets de loi tels que celui-ci.

Ce projet de loi constitue une réponse à deux faits majeurs : d'une part, le mouvement de fond qui, en février 2009, exprimait un malaise extrêmement grave ; d'autre part, la situation économique et sociale de nos territoires. De tout cela résulte la nécessité, non pas d'accroître systématiquement le soutien budgétaire de l'État, mais avant tout de prendre des mesures structurelles pour aider ces territoires. Ce texte constitue une première étape extrêmement importante à cet égard. En effet, si d'autres projets de loi sont programmés en faveur de l'outre-mer, par exemple en matière d'agriculture et de logement, celui-ci n'en est pas moins fondamental pour s'attaquer à la « profitation » – je reprends là une expression créole qui décrit parfaitement ce que vivent ces territoires : des situations dans lesquelles on abuse de plus faible que soi.

Ce texte répond de manière très claire à un besoin de justice économique et sociale. Je remercie donc Victorin Lurel d'avoir eu le courage de le proposer et d'avoir organisé une concertation extrêmement large, à la fois dans chaque département et au sein de la Délégation aux outre-mer, qui s'est prononcée favorablement tout en suggérant certaines améliorations.

Quant au Sénat, il a apporté une contribution essentielle au projet de loi car la demande est double. La régulation des prix est certes absolument nécessaire pour lutter contre les systèmes d'oligopoles et de monopoles, mais le texte n'allait pas suffisamment loin en la matière, compte tenu de la gravité de la situation. Rappelons que les écarts de prix varient de 30 à 60 % alors que les niveaux de revenu sont 40 % en deçà de ceux constatés dans l'Hexagone. Dans le même temps, le taux de chômage est de deux fois et demie à trois fois supérieur – il atteint 24 %, et même 64 % chez les jeunes. Des mesures exceptionnelles sont donc indispensables.

Le Sénat a été à l'origine d'avancées notables, que nous allons prolonger en proposant des amendements supplémentaires : il a, par exemple, adopté un article visant à faciliter les échanges commerciaux entre le marché intérieur des collectivités d'outre-mer et ceux des pays voisins. Voilà qui constitue une ouverture extraordinaire permettant de favoriser les circuits courts et de diminuer les importations en provenances de régions distantes de 8 000 kilomètres. Disposer d'une base logistique nous permettra de construire une politique nouvelle, et donc de faire baisser les prix.

Le pouvoir d'injonction structurelle de l'Autorité de la concurrence et la lutte contre les exclusivités de marque sont deux dispositifs très importants, tant la complexité des sociétés empêchent d'en avoir une vue claire. Il s'agit de donner ainsi à l'Autorité de la concurrence la possibilité, non pas d'opposer mécaniquement une réponse répressive, madame Vautrin, mais d'établir un dialogue permettant d'apporter des corrections.

Quelques points restent à clarifier : il s'agit de l'engagement pris publiquement au sujet de la Nouvelle-Calédonie, notamment par le ministre chargé des relations avec le Parlement ; de l'immigration à Mayotte ; de l'accès à la contribution au service public de l'électricité (CSPE) à Wallis-et-Futuna ; et, enfin, de la possibilité de transférer aux CCI les registres de commerce. On a dénoncé dans cette dernière disposition un cavalier législatif mais je ferai valoir qu'alors qu'il faut parfois aujourd'hui de six mois à un an pour déclarer une entreprise, les CCI peuvent permettre d'y parvenir en quatre jours, ce qui peut être bénéfique au pouvoir d'achat : plus l'on crée d'entreprises et d'activité, moins il y a de chômeurs. Si des pressions s'exercent pour supprimer cet article, nous soutenons pour notre part le ministre des outre-mer, en faveur de son maintien, quitte à y apporter quelques corrections.

Même si nous avons déposé des amendements, concernant notamment l'itinérance et la réduction des frais bancaires, nous soutenons donc avec grande détermination ce texte qui constitue une première étape essentielle pour le développement de nos territoires.

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