Intervention de Antoine Bozio

Réunion du 9 juillet 2013 à 17h30
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Antoine Bozio, président de l'Institut des politiques publiques, IPP :

Il n'en reste pas moins qu'un arbitrage budgétaire doit être effectué.

Les droits familiaux de retraite sont de trois ordres.

Le premier est la bonification de pension pour trois enfants et plus. Le taux de majoration est de 10 % pour les parents. Plusieurs réformes ont conduit à l'homogénéisation du dispositif dans le secteur privé pour atteindre ce taux. Dans la fonction publique, la majoration est de 10 % pour le troisième enfant, puis de 5 % par enfant supplémentaire. Le montant budgétaire annuel de ce mécanisme est très important, de l'ordre de 5 à 6 milliards d'euros. Néanmoins, il ne réduit pas les inégalités de pension hommes femmes, puisque les hommes ont des pensions supérieures aux femmes, et il ne compense pas les aléas de carrière liés à la présence des enfants. En outre, les raisons fréquemment invoquées pour ce genre de dispositif, en particulier encourager la fécondité, ne sont pas fondées.

Le deuxième dispositif est la majoration de durée d'assurance (MDA). Il consiste à créditer des trimestres d'assurance à la mère, au moment de l'accouchement, et des trimestres pour éducation, par défaut octroyés à la mère, sauf si le père peut justifier d'avoir pris en charge majoritairement les aléas de carrière liés à l'éducation des enfants.

Rappelons que le calcul de la pension prend en compte à la fois le salaire de référence ou salaire moyen annuel (SAM), qui détermine le niveau de pension, et les trimestres d'assurance qui permettent de déterminer le taux – application de la décote ou pas – sur le salaire de référence. Les trimestres rajoutés ne serviront qu'aux femmes qui ont besoin des trimestres d'assurance. Par conséquent, la formule du système actuel donne une pension qui dépend soit de la distance minimale par rapport à l'âge d'annulation de la décote, soit de la distance entre la durée d'assurance cotisée et la durée d'assurance requise. Autrement dit, une femme bénéficiera du taux plein si elle a soixante-sept ans ou si elle a la durée d'assurance requise. Et une femme qui a une faible durée d'assurance sera de toute façon touchée par l'âge : si elle a, par exemple, plus de cinq ans de distance avec la durée d'assurance, rajouter des durées d'assurance ne changera rien, car c'est l'âge qui compte. Or une grande partie des femmes est dans ce cas. Ainsi, les MDA tendent à sous-compenser les carrières avec interruptions et faibles SAM, et les carrières très longues sans interruption.

Un deuxième groupe de femmes bénéficie très peu des majorations de durée d'assurance : ce sont celles qui ont eu des carrières complètes, mais avec des temps partiels. La MDA leur ajoute beaucoup de trimestres supplémentaires, mais ils ne sont pas utiles. Et la prise en compte des temps partiels, qui correspondent par nature à des salaires peu élevés, va jouer dans le calcul du salaire de référence et pénaliser ces femmes.

Au final, ces droits ne permettent pas d'améliorer le niveau de pension d'une partie importante de femmes – le rapport du COR évoque des droits qui ne sont pas utiles. Le dispositif des majorations de durée d'assurance, en ne compensant que pour des trimestres de durée d'assurance, et pas pour les salaires portés au compte qui rentrent dans le calcul du salaire annuel moyen, n'atteint pas ses objectifs.

Dans la mesure où ces différents dispositifs du système de retraite actuel ne permettent pas d'améliorer les pensions des femmes, quelles modifications peuvent être envisagées ?

Une première solution, proposée par le COR et le rapport Moreau, est de forfaitiser la bonification pour enfants. Néanmoins, dans la mesure où le même montant par enfant est attribué aux hommes et aux femmes, le mécanisme ne réduira pas significativement les inégalités de pension entre hommes et femmes.

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