Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 16 juillet 2013 à 21h00
Commission des affaires sociales

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé :

Concernant tout d'abord la question de la prévention des conflits d'intérêts, l'enjeu est d'en finir avec l'ère du soupçon et de rétablir le lien de confiance entre les Français et les médicaments. En effet, cette confiance existe, mais elle est doublée de certaines inquiétudes et de certaines exigences. Il est donc important de supprimer l'idée qu'il existe de tels liens d'intérêts entre les laboratoires et les professionnels de santé : des mesures de transparence sont indispensables.

Le décret qui a été pris, dit du « Sunshine act » est issu d'un processus de réflexion. En effet, deux approches étaient possibles en la matière et qui ont d'ailleurs été en discussion au moment du vote de la loi. La première consiste à fixer un seuil au-delà duquel on considère que les avantages apportés ou les bénéfices consentis à un professionnel de santé doivent être déclarés ; en deçà de ce seuil, on considère qu'ils sont sans importance, comme par exemple, le fait d'offrir un café à un professionnel de santé. La seconde approche consiste à ne pas retenir de seuil, mais à adopter le principe de la transparence absolue, autrement dit, de dire qu'il n'y a aucune suspicion, que les relations entre les industriels et les professionnels de santé sont normales et n'ont pas à être interdites, mais qu'elles doivent juste être connues. C'est la première approche qui a été privilégiée par la loi, puisque celle-ci a retenu un seuil. Le Conseil d'État a préconisé de le fixer à 10 euros, considérant qu'en deçà, il n'y avait pas de seuil praticable. Il n'y a donc aucun fondement juridique dans la loi pour dire que c'est l'approche de la transparence complète qui a prévalu.

Concernant le pilotage du système sanitaire par l'ANSM, mon prédécesseur, M. Xavier Bertrand avait en effet mis en place un groupe de suivi de l'application de la loi, qui n'a tenu qu'une seule réunion en mars 2012. Ce comité de suivi n'était en réalité qu'une modalité du suivi de la loi, il n'était pas issu d'une prescription réglementaire. J'ai pour ma part opté pour un système de réunions informelles hebdomadaires, qui dressent un bilan régulier de la mise en oeuvre de la loi. Ce que l'on peut dire aujourd'hui, c'est que les textes indispensables ont été pris ou sont en voie de l'être, autrement dit, sont en cours de finalisation. Le directeur général de l'ANSM est par ailleurs très régulièrement reçu par moi-même et mon cabinet.

Concernant le fonctionnement de l'ANSM, sa réorganisation est relativement récente et les progrès sont encore en cours, d'autant qu'elle a concerné près de 800 agents. L'Agence est bien prioritaire au regard des enjeux de la politique ministérielle. Un travail de simplification doit être mené, pour déboucher sur une meilleure articulation notamment avec la HAS, car même les professionnels de santé trouvent que l'articulation entre les deux instances n'est pas suffisamment claire.

Concernant la base de données prévue par l'article 8, elle a pour objet de renforcer l'information de nos concitoyens : elle doit procurer une information fiable et indépendante, mais n'a pas vocation à se substituer aux bases commerciales existantes. Elle sera publiée en octobre sur le site du ministère et on y trouvera des alertes de sécurité. Le principe qui a été retenu est celui d'une mise en ligne très rapide de cette base de données, qui a vocation à être améliorée en permanence, plutôt qu'une mise en ligne retardée pour une base de données plus complète. J'ajoute que l'information relative aux dispositifs médicaux devra en effet y figurer à terme.

Sur le thème des vaccins, je suis d'accord avec Catherine Lemorton et n'ai rien à ajouter.

Concernant la visite médicale, le président du CEPS doit aujourd'hui prendre en compte le nouvel objectif de la charte, qui fixera des objectifs annuels chiffrés d'évolution des pratiques. Un cycle de négociations a été engagé avec les industries du médicament. Une charte existe déjà depuis 2004 : un avenant doit donc intervenir sur ce point d'ici la fin de l'année. Indépendamment de cette révision de la charte, je pense en effet qu'il convient de réformer la visite médicale elle-même : l'article que nous avions présenté en projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a été censuré comme cavalier social par le Conseil constitutionnel : il faudra y revenir.

S'agissant de l'accès aux données de santé, c'est bien entendu un sujet majeur. Nous devons aller vers un meilleur partage des données de santé dans l'intérêt de la sécurité sanitaire, et de la santé en général. Mais les règles doivent être précisément posées. Il faut éviter que tout cela soit d'un accès trop facile, car il y a un enjeu de confidentialité qui doit être respecté. J'attends donc bien sur ce point les conclusions de la mission confiée à Pierre-Louis Bras.

La certification des logiciels d'aide à la prescription doit être opérationnelle au plus tard le 1er janvier 2015 ; le processus se déroule de façon satisfaisante. Il n'y a pas de raison ni d'indices montrant que ces logiciels poseraient problème, en revanche, s'agissant d'une simple aide à la prescription, les problèmes éventuels peuvent venir d'une mauvaise maîtrise de ces outils par leurs usagers.

La présidente m'a interrogée sur les informations que l'ANSM peut demander aux laboratoires postérieurement à la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament : le décret relatif à la pharmacovigilance qui introduit ces études « post-AMM » a été publié le 8 novembre 2012, l'Agence peut donc d'ores et déjà les demander. Elle aura le pouvoir d'infliger des sanctions qui seront fixées dans le cadre d'un décret en cours d'élaboration.

Concernant la notice des médicaments, dans le décret de novembre 2012 sur la pharmacovigilance, il est prévu que les notices des médicaments invitent expressément les patients à signaler eux-mêmes des effets indésirables. Il faudra toutefois simplifier le dispositif prévu pour ce faire.

J'ai demandé au niveau européen la mise en place d'une procédure d'autorisation de mise sur le marché pour les dispositifs médicaux les plus à risque, le renforcement de leur évaluation par les organismes notifiés ainsi que l'encadrement de ces organismes, et la mise en place des règles de transparence. En effet, en matière de dispositifs médicaux, certaines affaires récentes nous ont montré que la transparence de l'information était nécessaire.

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