La loi dont nous suivons l'application vise à sécuriser l'usage des médicaments afin d'éviter que ne se reproduisent certains scandales sanitaires, mais aussi à restaurer la confiance de l'opinion publique en notre système de santé. La notion d'indépendance, sur laquelle la ministre a insisté, est très importante. La question des conflits d'intérêts est traitée très sérieusement par l'administration de la nouvelle Agence. En revanche, la transparence reste à assurer. La remise en question de la façon dont a été traité le règlement intérieur quant à la transparence sur les données d'études qui fondent les décisions montre que la mise en place de nouvelles structures ne suffit pas à changer les habitudes. Les salariés de l'Agence ont été traumatisés par la crise du Mediator, et les demandes de moyens supplémentaires du conseil d'administration méritent d'être entendues dans un contexte d'élargissement des missions de l'agence.
Concernant ce que l'on appelle le « Sunshine Act » à la française, c'est-à-dire la transparence sur les cadeaux, je comprends que le seuil de 10 euros apparaisse raisonnable, étant donné les contraintes posées par le Conseil d'État. Reste la question des leaders d'opinion qui, eux, ne sont soumis à aucune obligation de transparence lorsqu'ils passent des conventions avec l'industrie pharmaceutique. La présidente Catherine Lemorton et moi-même souhaitons proposer une amélioration législative sur ce point.
La transparence concerne aussi, comme vous l'avez souligné, l'accès aux données de santé, qui soulève deux questions distinctes : la possibilité pour les chercheurs de travailler sur des grands programmes de santé publique, et la surveillance en temps réel de la délivrance des médicaments. Sur ce sujet, la Caisse nationale d'assurance maladie est en conflit avec certaines grandes entreprises dont on retrouve le nom dans la présentation par la Caisse de l'évolution récente des prescriptions des contraceptifs oraux combinés. Je me suis exprimé au conseil d'administration de la Caisse en m'étonnant que certains médias aient déjà abandonné leur cheval de bataille contre les pilules de troisième et quatrième générations et soient passés à la promotion des oestradiols dits naturels.
De façon générale, la Haute Autorité de santé et l'ANSM devraient être particulièrement vigilantes sur les pratiques collectives de prescription déviantes.
Par ailleurs, j'ai été indigné, ce matin, en apprenant la façon dont, par des compromis secrets, le laboratoire Servier cherche à dissuader un certain nombre de victimes du Mediator d'aller au pénal. Cette possibilité de compromis entre le laboratoire et les victimes, qui avait été refusée à l'unanimité par les associations et par le Gouvernement de l'époque, ne peut pas être reproduite aujourd'hui dans des clauses secrètes. Il s'agit là d'un abus de faiblesse de la part de Servier. Le Gouvernement entend-il agir pour faire cesser ces pratiques ?