Intervention de Jean-Ludovic Silicani

Réunion du 11 juillet 2012 à 10h30
Commission des affaires économiques

Jean-Ludovic Silicani, président de l'ARCEP :

J'en dirai peut-être un mot tout à l'heure.

Au sujet de la fibre optique et, de façon générale sur le très haut débit fixe, je crois qu'il faut avoir pour objectif que tous les ménages, toutes les entreprises et tous les services publics aient accès au très haut débit fixe dans un délai raisonnable. Il faut aussi que, le plus souvent possible, cet accès corresponde à de la fibre optique jusqu'à l'abonné. Mais je crois aussi qu'il ne faut pas avoir une vision – je ne voudrais pas que le mot choque – totalitaire sur la technologie employée. Le régulateur doit rester neutre sur la technologie. On sait que le FttH garantit les meilleurs résultats et doit être développé au maximum. Mais la compétition entre différentes technologies est souvent utile, Dans un système trop fermé et trop monopolistique, les choses peuvent rester quasiment bloquées pendant une très longue période : c'est ce qu'on a constaté, pour le téléphone en France, entre 1900 et 1975. Mais notre obligation de neutralité technologique ne nous a pas empêché de développer une réglementation propice au très haut débit. Ce développement du très haut débit peut prendre d'autres voies : Numéricable a aussi indiqué qu'il poursuivait l'opticalisation de ses réseaux le plus loin possible. Il existe aussi des technologies, comme VDSL2, qui ont pour objet d'améliorer le haut débit.

Sur ces sujets, a été mis en place, au sein de l'ARCEP, un comité indépendant qui examine l'entrée sur le marché de toute nouvelle technologie. Nous pensons que, dans les mois qui viennent, il y aura sans doute un feu vert pour le VDSL2. Cela ne signifie évidemment pas qu'il faille utiliser partout cette technologie en substitution de la fibre optique : nous veillerons au bon déploiement de la fibre optique sur l'ensemble du territoire.

J'en viens à l'arrivée du nouvel opérateur mobile. Son arrivée était-elle nécessaire ? Il y a quatre acteurs pour le fixe et le mobile dans tous les grands pays d'Europe comparables à la France. Pourquoi un quatrième arrivant créerait-il une situation particulière en France ? Par ailleurs, le prix du panier de consommation mobile était plus élevé en France que dans les autres pays, ce qui est l'inverse du fixe, ce qui pouvait justifier un peu plus d'animation concurrentielle. En outre, dès le départ, en 2000, il était prévu d'attribuer quatre licences.

J'ajouterais que les grands opérateurs historiques auraient pu, que ce soit en 2006, 2007 ou 2008, passer un accord de full MVNO avec Free, en lui donnant la possibilité d'utiliser leur réseau, ce qui aurait peut-être évité que Free ne déploie son propre réseau. Ce sont des choix stratégiques qu'ils ont fait, en bloquant l'arrivée des full MVNO. Il a fallu que l'ARCEP mette cette condition dans l'attribution des fréquences 4G pour qu'enfin il y ait des full MVNO en France, alors qu'il en existe depuis de nombreuses années dans les autres pays européens.

Ce qui a été accordé à Free est-il inéquitable ? Les requêtes, présentées par d'autres opérateurs contre la licence de Free, ont été rejetées par le Conseil d'État. L'un des arguments était le prix de cette licence (240 millions d'euros, soit un peu plus du tiers du prix pour un tiers des fréquences). Ce prix a été estimé correct par le Conseil d'Etat. Enfin, il n'y a eu qu'un seul candidat, malgré tous les efforts faits pour susciter d'autres candidatures ; ce qui montre que cette licence n'était pas si attractive que cela.

A-t-on bien étudié les conséquences de l'arrivée de Free ? Il nous a été indiqué que des études ont été faites par la direction du Trésor, en 2008, pour préparer la décision du Gouvernement. Il vous appartient d'interroger le ministre au sujet de ces études. En février 2009, M. Luc Chatel, alors ministre des télécommunications, vous a déclaré que l'arrivée d'un nouvel opérateur, selon des études, ferait croître le marché d'à peu près 7 %. Il faut un peu de recul pour voir ce qu'il en est. M. Jean-Claude Mallet, mon prédécesseur, ajoutait qu'un nouveau réseau favoriserait la création d'emplois. Nous sommes particulièrement attentifs à la réalisation effective par Free de son propre réseau. Il en résultera effectivement des créations d'emplois.

Dernière question : Free Mobile respecte-t-il ses obligations et engagements ? Nous avons effectué des contrôles, en décembre 2011 et janvierfévrier 2012, relatifs à ses obligations de couverture du réseau (27 % de la population). Il les remplit, avec 27 à 28 % de couverture. Par ailleurs, le dossier concernant l'ensemble des obligations et engagements de l'opérateur, que Free nous a fourni, comme il le devait, il y a quelques jours, est en cours d'étude. Nous indiquerons rapidement les conclusions que nous en tirons.

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