Intervention de Claude Guibal

Réunion du 10 juillet 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Claude Guibal, journaliste à France Culture, ancienne correspondante de Radio France en égypte :

La société égyptienne est aujourd'hui très polarisée. Les coptes, qui ont très longtemps fait profil bas tandis que les auteurs des crimes qui les visaient bénéficiaient d'une impunité totale, ont constaté que des années de silence ne leur avaient pas apporté la sécurité et sont désormais décidés à se faire entendre. Ils ont ainsi été nombreux à rejoindre Tamarrod.

Je m'aperçois que le tableau que nous peignons est extrêmement sombre. On est loin des racines de la révolution qui demandait « pain, liberté et justice sociale », le droit à la sécurité, le droit de vivre décemment, le droit à l'éducation. Ces revendications citoyennes émanaient de millions d'Égyptiens, même s'ils étaient moins nombreux que ceux qui ont demandé il y a une semaine le départ de Mohamed Morsi. Ne les oublions pas. Une révolution est un processus long, violent, injuste, vengeur, souvent suivi d'une période de terreur. Les Égyptiens le savent. Chaque signal négatif émanant de la communauté internationale ou des médias est une épée plantée dans le dos de ceux qui sont morts au tout début de la révolution, en janvier 2011, pour réclamer les droits universels à la citoyenneté, attirant sur eux les regards du monde entier.

Vous avez raison de souligner l'importance de la démographie, monsieur Myard. C'était une plaie pour Moubarak, qui ne parvenait pas à faire face au problème. La situation est aujourd'hui catastrophique car l'Égypte possède une économie de rente qui dépend des revenus des travailleurs vivant à l'étranger et de ceux du canal de Suez, qui ont diminué, sans parler de ceux du tourisme et des hydrocarbures. Plus aucun investisseur étranger ne prend le risque de miser sur une Égypte dominée par l'instabilité.

S'agissant de l'aide internationale, les manifestants qui ont déposé Morsi la rejettent avec violence. L'aide américaine, qui dépasse le milliard de dollars, est essentiellement militaire mais bien d'autres aides en dépendent. La non-obtention du prêt du FMI a contribué à la situation actuelle. La mainmise de Moubarak sur la population découlait en grande partie des subventions, amortisseurs sociaux essentiels dont le FMI demande la suppression. Dès lors, que va-t-il se passer, alors que les pénuries sont déjà insupportables pour une grande partie de la population ?

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